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Ciment McInnis : l'étude confirme les craintes des écologistes

Ciment McInnis : l'étude confirme les craintes des écologistes

C'est en toute discrétion que Ciment McInnis a mis en ligne la mise à jour de l'étude d'impacts environnementaux sur la construction d'une cimenterie à Port-Daniel-Gascons.

Selon les promoteurs, le ministère a approuvé le projet de 800 millions de dollars et le processus pour l'obtention des permis de construction est en cours. Depuis le dépôt de cette étude au ministère de l'Environnement, printemps dernier, plusieurs environnementalistes se sont inquiétés du fait que la cimenterie pourrait générer des émissions de gaz à effets de serre (GES) de 2 millions de tonnes par année.

L'étude confirme que tel sera le cas pour une production maximale de 2,5 tonnes de ciment.

La cimenterie utilisera du coke de pétrole et du charbon comme principaux combustibles. Le promoteur ajoute qu'il ne prévoit pas, pour le moment, utiliser de combustible de substitution, comme la biomasse. Toutefois, l'équipement en place pourrait éventuellement le permettre.

D'ailleurs, la biomasse sera, selon Ciment McInnis, le premier combustible de substitution à être utilisé, après une première année de rodage. Quelque 200 000 tonnes par année de sciure et de copeaux de bois pourraient alors prendre le chemin de la cimenterie.

Le promoteur ouvre aussi la porte à l'utilisation de vieux pneus comme combustible.

Ciment McInnis assure par contre que son projet répond aux normes de production les plus élevées en Amérique du Nord. Des stations de suivi sur la qualité de l'air seront installées pour vérifier la qualité de l'air. Le tout sera soumis au ministère de l'Environnement. De même, tout le programme de suivi des émissions atmosphériques sera soumis au ministère pour validation et approbation.

Le document était très attendu puisque le projet échappera au processus d'étude du Bureau d'audiences publiques en environnement (BAPE). Ciment McInnis a en effet racheté les actifs de Cimbec qui a abandonné un premier projet de cimenterie en 1999.

Une première étude environnementale du projet, déposée en 1995 par Cimbec, a permis à Ciment McInnis d'échapper aux consultations publiques. Le projet avait reçu à l'époque, les autorisations nécessaires du ministère de l'Environnement. Des environnementalistes ont en vain demandé au gouvernement que le projet de cimenterie soit tout de même soumis à l'analyse du BAPE.

Le président de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), André Bélisle, relève que l'étude confirme d'ailleurs leurs estimations quant aux émissions de GES. « Le projet, souligne-t-il, dont on parle aujourd'hui n'est pas comparable à celui de 1995 qui avait obtenu les autorisations. C'est l'argument qu'on a utilisé pour dire qu'on n'avait pas besoin de nouvelles études environnementales. C'est faux. Le projet a doublé. »

Il note aussi que Ciment McInnis confirme qu'elle utilisera bel et bien du coke de pétrole comme combustible principal. « La vérité est quand on utilise du coke de pétrole, commente le président de l'AQLPA, on encourage la production de pétrole des sables bitumineux. Il faut réduire la consommation de pétrole parce qu'elle cause énormément de problèmes pour la pollution de l'air. »

Concernant la production de gaz à effet de serre (GES), Ciment McInnis estime que la technologie utilisée est beaucoup plus performante sur le plan énergétique et beaucoup moins polluante que les technologies des cimenteries actuellement en production.

Le promoteur avance qu'à terme, sa cimenterie viendra remplacer d'autres usines plus désuètes ce qui génèrera moins de GES. Le transport par bateau sera aussi, selon Ciment McInnis, une source de réduction des GES. Selon l'étude, 95 % de la production sera expédiée par bateau.

« Je veux bien croire qu'elle sera plus moderne, mais c'est une cimenterie de plus », réplique André Bélisle qui croit des mesures, comme l'utilisation d'un charbon contenant moins de soufre, auraient pu aider à diminuer le bilan environnemental de la future cimenterie.

Compte tenu de son ampleur, il faut voir l'acceptabilité sociale dans son ensemble, pas juste pour les gens de Port-Daniel-Gascons, fait valoir le président de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique.

Vaste projet

Le rapport remis par Ciment McInnis donne en effet la pleine mesure de cet important projet industriel qui modifiera considérablement le paysage de la baie de Port-Daniel.

La capacité de l'usine sera de 2,2 millions de tonnes de ciment de type Portland, avec une possibilité d'augmentation de 15 %. Des résidents devront vivre avec le va-et-vient des camions, le dynamitage et la présence de cheminées.

Plusieurs préoccupations ressortent du rapport notamment sur le bruit durant la phase d'exploitation. Un suivi spécifique sera mis en place au cours de la première année afin de respecter les normes.

Ciment McInnis précise que le dynamitage s'effectuera à certains moments choisis afin de limiter les perturbations auprès des habitants de Port-Daniel-Gascons. Le site est situé à proximité de secteurs résidentiels et de la route 132. Trois sismographes seront installés de manière permanente sur le terrain de résidences bordant la route 132 ou celle de l'Anse-McInnis pour vérifier le taux de vibrations.

Le promoteur admet dans son étude que le dynamitage sera perceptible et que des éclats pourront même atteindre la route 132 et les bateaux de plaisance dans la baie. Des mesures de sécurité seront mises en place.

De l'aveu même du promoteur, la préservation des eaux souterraines constitue l'enjeu environnemental le plus important de l'exploitation de la cimenterie. Les taux de phosphore seront mesurés lors de la construction et le résultat des mesures sera un préalable à la demande de certificat d'autorisation du ministère de l'Environnement pour l'exploitation de la cimenterie. Des vérifications seront effectuées dans un rayon de un kilomètre du site.

Par ailleurs, les promoteurs assurent que la cimenterie aura des impacts mineurs sur la faune, la flore et les cours d'eau environnants.

Le promoteur s'est engagé toutefois à créer des programmes de surveillance et de suivi environnemental, pendant la phase de construction de la cimenterie et lors de la production. Un département des plaintes sera aussi créé.

L'étude, préparée par Génivar, a été déposée en avril 2013 au ministère de l'Environnement.

Par la suite Ciment McInnis a répondu à 300 questions, portant sur 45 points, en provenance du ministère de l'Environnement et du Secrétariat Mi'gmawi Mawioni .

Pour répondre à ces préoccupations, les promoteurs ont pris 70 engagements. Ciment McInnis mettra aussi en place 80 mesures d'atténuation durant les phases de construction et d'exploitation.

Impacts économiques

Ciment McInnis s'engage à privilégier l'embauche locale et régionale.

Les commerces et entreprises de la région seront favorisés. L'entreprise se montre aussi ouverte à collaborer à des mesures de formation de la main-d'uvre. Ciment McInnis met aussi l'accent sur la communication et les relations avec la communauté.

L'entreprise cible clairement ces mesures comme des priorités pour atténuer les impacts de son projet sur le milieu humain.

Au total, 180 à 200 personnes travailleront à la carrière ou à la cimenterie. Un montant de 577 millions sera investi au cours des deux prochaines années pour construire l'usine. Quelque 600 personnes travailleront sur le chantier au plus fort de la construction. Ciment McInnis estime qu'au total le projet génèrera 450 emplois directs ou indirects dans la région.

Les promoteurs souhaitent lancer les travaux d'ici la fin de l'année. La production commerciale au début de 2016.

Un soutien de 350 millions de dollars, sous forme de garantie de prêt, a été demandé au gouvernement du Québec. La demande est à l'étude.

Ciment McInnis est la propriété de Beaudier inc. à 67 %, une société de gestion de la famille Beaudoin qui est par ailleurs propriétaire de Produits récréatifs Bombardier. Le reste de l'actionnariat est détenu par les anciens promoteurs de Cimbec.

Il n'y a pas eu de nouveau projet de cimenterie depuis 31 ans au Québec.

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