Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

«Les autres», à Canal D : la grande séduction de Stéphane Gendron

«Les autres», à Canal D : la grande séduction de Stéphane Gendron
Courtoisie Canal D

C’est en se décrivant comme un idéaliste que Stéphane Gendron, maire de la petite municipalité d’Huntingdon, dans le Haut-Saint-Laurent, a accueilli les journalistes, mardi matin, au visionnement du documentaire Les Autres – Les immigrants peuvent-ils sauver Huntingdon?, que diffusera Canal D le 20 octobre prochain.

Élu pour la première fois au début des années 2000, Gendron s’est investi corps et âme, pendant toute la durée de son mandat, pour attirer les immigrants dans sa ville, afin d’éviter que celle-ci ne s’éteigne à petit feu après des pertes d’emplois drastiques en 2004. Il l’affirme lui-même : sa mission se compare à l’histoire du film La grande séduction… et prendra bientôt fin, puisque l’homme a choisi de ne pas briguer la mairie une quatrième fois en novembre.

Dans le portrait réalisé par le cinéaste Vincent Audet-Nadeau, on s’attarde au sort des 35 000 immigrants économiques qui arrivent chaque année au Québec, en passant par la croisade du coloré politicien, qui s’est fait connaître par ses prises de position controversées et ses coups d’éclats médiatiques. Celui qui, cet été, n’hésitait pas à blaguer sur le fait qu’il aime écraser des chats avec sa voiture, a les yeux pleins de bonté et de respect lorsqu’il parle des musulmans et autres nouveaux arrivants qui pourraient repeupler sa localité et la revivifier.

«La réalité, chez nous, c’est que j’ai 60 décès pour 30 naissances. Si je n’ai pas d’immigrants qui viennent s’établir, c’est terminé pour la ville de Huntingdon et pour plein d’autres communautés en région. Si c’est ça qu’on veut, on met la clé dans la porte, et bonsoir la visite. Mais moi, ce n’est pas ça que je veux…», fait-il notamment valoir.

Pour convaincre les étrangers de s’installer dans son patelin, Stéphane Gendron a joué le grand jeu. Il s’est rendu dans plusieurs lieux de regroupement, dont le Centre canadien islamique Al-Jamieh, pour leur faire miroiter les avantages de déménager dans son coin : la proximité de Montréal et de l’autoroute 30, un accès à des maisons à 140 000$, un congé de taxes de 5 ans, des écoles et les infrastructures très développées, etc. Il s’est battu pour faire ériger une mosquée et a même offert des tours guidés de Huntingdon en autobus pour vanter l’endroit.

«Vous êtes l’avenir du Québec», a-t-il martelé sans relâche à ses interlocuteurs. Devant la caméra, il a insisté sur le courage de ces personnes souvent très instruites, dotées d’un «front de bœuf», travaillantes et motivées, qui se sont déracinées de leur pays d’origine et ont dû apprendre une nouvelle langue pour repartir à zéro.

Emplois rares

Or, les immigrants sont plutôt portés, lorsqu’ils débarquent ici, à opter pour les grands centres, notamment en raison de la rareté des emplois en région. Des études prouvent qu’il faut de 4 à 5 ans aux nouveaux arrivants pour se trouver un gagne-pain dans leur champ d’expertise, et qu’un retour aux études est souvent nécessaire pour y parvenir. Le taux de chômage est deux fois plus élevé chez cette tranche de la population, et la situation économique générale complique la recherche de boulot, d’autant plus que l’expérience acquise ailleurs est difficile à évaluer pour les employeurs d’ici. Mais Stéphane Gendron persiste et signe. À un certain moment, il va même jusqu’à déclarer que, s’il était premier ministre, il obligerait les immigrants à se poser dans les banlieues et à la campagne, et il est certain que ceux-ci obtempéreraient de bonne grâce.

Les Autres – Les immigrants peuvent-ils sauver Huntingdon? distille par ailleurs des informations très intéressantes sur l’immigration économique au sens large, sur le processus d’intégration qui attend les citoyens canadiens de demain, sur la manière dont le gouvernement ne sélectionne que «la crème de la crème» de ces gens, qui sauront contribuer à la croissance économique du pays. Et le constat demeure le même dans les propos de chaque intervenant du documentaire : l’emploi sera toujours le nerf de la guerre pour favoriser l’immigration à l’extérieur de Montréal.

Gendron rend les armes

Las de ces vains combats, Stéphane Gendron ne cache pas qu’il abandonnera la mairie d’Huntingdon avec un sentiment d’échec, désabusé face à l’avenir. «Après moi le déluge», a-t-il laissé tomber, mardi. Il a d’ailleurs quitté la ville pour s’établir plus près des frontières américaines. Professionnellement parlant, il anime toujours à la radio, sur les ondes de CHOI, et projette de retourner à la télévision en janvier; il dit avoir reçu des offres en ce sens, et travaille également sur d’autres idées en collaboration avec Canal D.

Et que pense-t-il du tollé entourant la Charte des valeurs québécoises? «C’est un débat complètement inutile et frustrant. C’est comme si on venait démolir je ne sais pas combien d’années de tentatives de rapprochement pour une question vestimentaire…» Les opinions de celui qui prônait la religion de la laïcité lors de son premier passage à Tout le monde en parle, en 2004, ont visiblement évolué avec les années…

Les Autres – Les immigrants peuvent-ils sauver Huntingdon?, un documentaire d’une durée de 90 minutes, sera présenté à Canal D le dimanche 20 octobre, à 19h, et en rediffusion le vendredi 25 octobre, à 10h.

À VOIR AUSSI:

Télévision

La rentrée culturelle (Automne 2013)

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.