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Twitter : les journalistes de Radio-Canada et vous

Twitter : les journalistes de Radio-Canada et vous

Twitter, j'embarque ou pas? Au moment où Radio-Canada accueille son 300 000e abonné sur le réseau, les journalistes de la société dévoilent leur rapport à ce drôle d'oiseau. Selon vous, Twitter représente-t-il un progrès pour le journalisme?

Un texte de Lili Boisvert.

Gérald Fillion tweete depuis trois ans. « Au début, j'ai hésité à m'inscrire, puis finalement, en voyant le phénomène grandir, je me suis informé et j'y ai pris goût ». Depuis, l'animateur de RDI Économie publie une dizaine de messages par jours et il est suivi par plus de 30 000 personnes. En plus de son émission, de ses interventions à la radio et de son blogue, Twitter vient s'ajouter à la brochette de canaux de diffusion dont l'homme à tout faire de l'économie dispose.

Du côté du Club des ex, l'animateur Simon Durivage n'est peut-être pas un mordu, mais il s'informe de plus en plus sur Twitter. « J'ai plusieurs colonnes d'abonnements, et je les ai toujours dans le visage, tout l'après-midi », dit-il. « C'est une forme de journalisme, on ne peut pas le nier. »

Ce nouvel outil de travail est particulièrement intéressant pour l'actualité de dernière heure, note pour sa part le chef de pupitre web Marc-Antoine Ménard. Lorsqu'un événement d'ampleur survient, les fils Twitter sont soudainement inondés d'information.

Très rapidement, à partir des différentes sources auxquels il est abonné, il peut vérifier et contre-vérifier des informations. « Ça se fait en quelques secondes, quelques minutes. Mais les fondamentaux du métier restent », prévient-il.

C'est d'ailleurs lors d'événements forts comme des crises, des tremblements de terre ou encore pendant des élections que le compte de Radio-Canada sur Twitter fait le plein d'abonnés. La réactivité des internautes donne alors des indications importantes aux journalistes, notamment sur les sujets que le public aime et sur ce qui le fait réagir.

En tête des sujets qui suscitent l'intérêt sur Twitter, on trouve la langue, l'éducation, les questions constitutionnelles et la consommation. Il y a aussi des enjeux qui intéressent moins, constate Hélène Mercier, chroniqueuse aux réseaux sociaux pour l'émission radio Pas de midi sans info. L'environnement ou les Autochtones, par exemple, ont peu la cote.

La proximité avec le public sur le réseau social peut aussi servir de source d'inspiration pour les journalistes. Mme Mercier y trouve souvent des idées d'invités ou de sujets. Florent Daudens, journaliste aux réseaux sociaux, aime également la facilité avec laquelle il peut y entrer en contact avec des sources. « En dix minutes, on peut trouver quelqu'un au Japon qui parle français », s'enthousiasme-t-il.

La journaliste judiciaire Isabelle Richer apprécie quant à elle le contact avec son réseau sur Twitter, qu'elle compare à une vie parallèle. « Ça crée une communauté. C'est assez amusant ».

Quand Twitter énerve

La proximité n'a toutefois pas que de bons côtés. Si les commentaires positifs du public mettent de bonne humeur et que les critiques constructives font réfléchir, des remarques désobligeantes à l'attention des journalistes circulent aussi sur le réseau. Ceux dont la notoriété est grande se font souvent picosser.

Le public aussi n'est pas toujours réceptif aux gazouillis du réseau. Si Twitter a un potentiel addictif très grand pour les professionnels des médias, il peut également aliéner une frange du public.

Hélène Mercier tente ainsi de ne pas systématiquement mentionner que le commentaire d'un auditeur qu'elle lit en onde provient du réseau. Après tout, Twitter est une entreprise. « C'est comme si on disait 20 fois dans une émission Nike ou Adidas », raisonne la chroniqueuse.

Le pourcentage de personnes qui utilisent le réseau porte aussi à douter de sa représentativité. Selon les chiffres de 2012 du centre de recherche Cefrio, 10 % des Québécois sont sur Twitter, soit 800 000 personnes. À l'échelle canadienne, il y aurait 12 millions de comptes au pays (pour 35 millions d'habitants), selon les chiffres de Semiocast, qui fait de la gestion de marque sur les réseaux sociaux. Ce nombre inclus cependant des entreprises.

La politique en 140 caractères

Est-il possible pour un journaliste de prendre le pouls des politiciens sur Twitter? Les messages y sont énoncés si succinctement qu'on peut facilement y perdre la nuance ou la profondeur.

« Le fait qu'un message est synthétisé en 140 caractères, c'est sa force et sa faiblesse. Si le message est bien énoncé, ça vient te chercher tout de suite, ça a beaucoup d'impact, puis ça circule partout. Donc c'est un avantage. Mais après ça, il faut aller voir derrière », explique Marc-Antoine Ménard.

Il y a aussi le risque de prendre des citations hors de leur contexte, dit le chef de pupitre, qui se souvient d'une citation de Micheal Ignatieff qui circulait sur Twitter, selon laquelle l'ancien chef du parti libéral considérait que la souveraineté du Québec était inévitable. « La citation était exacte. Mais ça découlait d'un raisonnement de 10 minutes de M. Ignatieff, le professeur d'université - parce qu'Ignatieff est retourné à ses anciennes amours. Ce n'était quand même pas le Vive le Québec libre du général de Gaulle ».

Certains partis politiques sont aussi mieux représentés que d'autres sur le réseau, parce qu'ils y investissent davantage de ressources. « On le voit qu'Option nationale et Québec solidaire ont des militants en ligne, souligne Hélène Mercier. Ils ont vraiment une présence qui semble plus organisée sur les réseaux sociaux. » La chroniqueuse doit donc tenir compte de ce débalancement lorsqu'elle choisit des commentaires qu'elle lit en onde.

L'info à vol d'oiseau

Même si une multitude de personnes et d'organisations sont actives sur Twitter, les médias traditionnels y sont très présents et abondamment suivis. Ces derniers peuvent donc attirer tout un nouveau trafic sur leurs contenus.

Certains textes publiés par Radio-Canada peuvent d'ailleurs parfois obtenir jusqu'à 80 % de leur visibilité à partir des réseaux sociaux, souligne Florent Daudens. Ces textes pourraient ne pas apparaître sur le site web et ils seraient quand même lus, dit-il.

Radio-Canada Info est le premier compte média sur Twitter au Canada. Comment expliquer son succès? La qualité et la crédibilité, estime Gérald Filion. « En 2013, la valeur ajoutée d'un média, c'est sa crédibilité. On n'a jamais eu accès à autant de sources d'information, de canaux d'information et de possibilité de s'informer. En même temps, on n'a jamais été aussi mal informés », dit-il. La rigueur dans la transmission d'une information reste donc la clé, selon lui.

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