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Frank Zampino a assisté au mariage des enfants de deux mafieux notoires en 1991

Frank Zampino a assisté au mariage des enfants de deux mafieux notoires en 1991

EN DIRECT - L'ex-président du comité exécutif de la Ville de Montréal, Frank Zampino, a admis devant la commission Charbonneau qu'il a assisté au mariage du fils de Frank Cotroni et de la fille de Joe Di Maulo, Milena, le 6 juillet 1991. MM. Cotroni et Di Maulo sont deux mafieux notoires, et le nom de Cotroni était assurément bien connu à l'époque en raison des travaux de la CECO.

Un texte de François Messier et Bernard Leduc

Pris de court par la question de la procureure Sonia Lebel, Frank Zampino a dit être offensé que la commission tente d'inférer des liens qui n'existent pas. Il soutient avoir assisté à ce mariage en raison de l'insistance d'un travailleur d'élections, Mario Di Maulo, qui était un cousin de Joe. Il n'a pu se souvenir s'il avait reçu un carton d'invitation sur lequel on aurait pu lire le nom des invités.

« Ce n'était pas la décision la plus brillante du siècle », a concédé Frank Zampino, qui était maire de Saint-Léonard à l'époque, mais « il n'y avait aucune arrière-pensée ».

La procureure Lebel lui a aussi demandé s'il était exact qu'il avait envoyé une lettre à Jimmy Di Maulo, le frère de Joe, pour obtenir du financement électoral dans les années 1990. « Je n'ai absolument aucun souvenir de ça », a répondu le témoin, avant de préciser qu'il ne ne pouvait ni affirmer ni exclure avoir fait une telle chose, puisque des organisateurs électoraux font souvent signer des séries de lettres du genre.

Joe Di Maulo, figure importante du crime organisé montréalais depuis plus de 50 ans, a été assassiné en novembre 2012 à Blainville. D'abord affilié au clan calabrais des Cotroni, il s'est plus tard rangé derrière la famille Rizzuto, d'origine sicilienne, lorsque le chef du clan calabrais, Paolo Violi, a été assassiné en 1978.

Zampino introduit à la politique par Michel Bissonnet

La procureure en chef de la commission, Sonia Lebel, avait précédemment interrogé Frank Zampino sur ses débuts en politique. Comptable de formation, M. Zampino dit avoir été introduit en politique municipale à St-Léonard en 1986 par Michel Bissonnet, alors député libéral, mais aussi ancien maire de cette ville. Il explique que son entrée en politique est « un pur hasard »

C'est alors qu'il a connu Bernard Trépanier qui a travaillé dans l'équipe qui a organisé son élection comme conseiller dans l'équipe du maire Raymond Renaud. Mais c'est Claude Dumont qui était l'organisateur en chef du parti

M. Zampino soutient ne connaître la réalité des élections clé en main que par les journaux et que cela n'a donc pas eu lieu à St-Léonard.

Aucune rumeur d'élections clé en main n'entourait Claude Dumont, précise-t-il. Il dit avoir été par la suite élu maire de St-Léonard à la suite d'une scission au sein du parti. C'est ce même M. Dumont qui s'est occupé de l'organisation de la campagne qui le portera à la tête de la ville en 1990. M. Dumont jouera aussi un rôle dans le financement de cette élection, mais M. Zampino lui-même dit ne pas avoir été impliqué dans cet aspect des choses. Il sera par la suite réélu en 1994 et en 1998, année où il accède à la tête de la STCUM, ancêtre de la STM.

Sur Frank Zampino lire aussi : Qui savait quoi? La collusion en 17 citations et « Un jour, justice sera rendue », un bilan de l'administration Tremblay-Zampino

« l'homme le plus puissant de Montréal »

Après avoir méthodiquement remonté une piste semée d'allégations, mais aussi de démentis, la commission Charbonneau entend Frank Zampino, « l'homme le plus puissant de Montréal », pour reprendre les mots de Rosaire Sauriol, vice-président démissionnaire de Dessau. Il est interrogé par la procureure en chef, Me Sonia Lebel.

Frank Zampino a été nommé président du comité exécutif de la Ville de Montréal dès l'arrivée au pouvoir d'Union Montréal, à l'automne 2001, et a occupé ce poste jusqu'à sa démission, en mai 2008. Il était, à ce titre, le bras droit du maire déchu Gérald Tremblay. Il a aussi été maire de la Ville puis de l'arrondissement de Saint-Léonard de 1990 à 2008.

Sa réputation, intacte au moment de quitter la politique, a été entachée une première fois en avril 2009, lorsqu'il est révélé qu'il a séjourné sur le yacht de l'entrepreneur en construction Tony Accurso en février 2007 et 2008.

Le scandale de ce séjour dans les mers du Sud avec le propriétaire de Simard-Beaudry et Rosaire Sauriol de Dessau, qui avaient raflé le lucratif contrat des compteurs d'eau de la Ville, le force à démissionner de Dessau, où il avait été embauché à titre de vice-président et chef de la direction financière quelque mois plus tôt.

Mais c'est son arrestation en mai 2012 par l'UPAC pour fraude, complot et abus de confiance dans le dossier Faubourg Contrecoeur, en compagnie notamment de Bernard Trépanier et Paolo Catania, qui sème un doute profond sur son intégrité. Le procès, attendu, devrait nous en apprendre davantage.

Son nom a par la suite été évoqué par de nombreux témoins devant la commission Charbonneau. Quatre hauts dirigeants de firmes de génie-conseil ainsi que l'employé d'une cinquième firme ont tous dit qu'un système de partage de contrats publics contre argent comptant à Union Montréal existait à la Ville dans les années 2000.

Selon leurs témoignages, Bernard Trépanier gérait ce système, avec l'aval de Frank Zampino. Mais un seul d'entre eux en a parlé avec M. Zampino lui-même, Rosaire Sauriol, qui a longtemps fréquenté ce dernier :

Bernard Trépanier a de son côté rejeté sur ses détracteurs la quasi-totalité des allégations en lien avec le système décrit par les hauts dirigeants de firmes de génie.

Surtout, il a insisté à plusieurs reprises sur le fait que son ami Frank Zampino ne savait rien ni n'avait été impliqué dans l'octroi de contrats publics et le financement du parti.

M. Zampino a par ailleurs été accusé devant la commission par Elio Pagliarulo, un ex-ami et partenaire d'affaires de Paolo Catania, d'avoir touché un pot-de-vin de 555 000 $ de ce dernier en lien avec le dossier Faubourg Contrecoeur, ce que l'ex-président du comité exécutif a nié.

Enfin, et sans être exhaustif, mentionnons qu'au moment de sa démission dans la foulée du scandale des compteurs d'eau en septembre 2009, l'ex-directeur général de la Ville, Claude Léger, disait au maire Tremblay : « Écoutez, Monsieur le Maire, vous puis moi, on a le même problème. Vous avez fait confiance à M. Zampino, c'était votre bras droit. Moi, je lui ai fait confiance, c'était mon patron ».

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