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Trépanier payé par Dessau alors qu'il était à Union Montréal

Trépanier payé par Dessau alors qu'il était à Union Montréal

Un texte de François Messier

Bernard Trépanier a reçu des honoraires de 900 000 $ de Dessau entre 2002 et 2010, dont quelque 150 000 $ alors qu'il occupait le poste de directeur du financement d'Union Montréal (2004-2006), selon des documents préparés par la commission Charbonneau à partir de données obtenues de la firme de génie-conseil.

Ces sommes ont été versées à Bernard Trépanier directement ou à sa compagnie Bermax, qu'il a gérée seul de 2002 à 2010.

Bernard Trépanier a lui-même admis qu'il gagnait environ 82 000 $ en tant que directeur du financement d'Union Montréal, un poste obtenu au printemps 2004 et qu'il a été forcé de quitter en février 2006, selon le témoignage livré lundi par le trésorier du parti, Marc Deschamps.

Interrogé sur le travail qu'il a fait pour obtenir cette somme, Bernard Trépanier a affirmé qu'il avait fait appel à un intermédiaire qui avait déjà travaillé pour Transports Canada et qui était en mesure de remplir des documents permettant à Dessau de se classer pour obtenir des contrats auprès d'Aéroports de Montréal (ADM). L'affaire a fonctionné et Dessau a obtenu des contrats.

Liste des paiements effectués à Bermax et Bernard Trépanier par Dessau entre 2002 et 2010

« Si tu [réussissais] l'examen pour te classifier, t'obtenais des mandats pour trois ou quatre ans dans les disciplines ou tu te classifiais comme il faut », a expliqué Bernard Trépanier. Dessau s'est bel et bien reclassé par la suite, a-t-il dit. Une fois classée, la firme obtenait un montant de contrats garanti. L'ex-argentier d'Union Montréal a laissé entendre qu'il était payé en fonction des contrats obtenus par Dessau.

Le procureur Gallant s'est néanmoins étonné que Bernard Trépanier ou Bermax aient reçu 100 000 $ de Dessau par année pour ce seul travail. Il a noté n'avoir vu que deux factures de 6000 $ et 8000 $ faites à l'intermédiaire, et qu'on pouvait voir la mention « remboursement de prêt » sur les chèques.

Bernard Trépanier a rétorqué qu'il payait son intermédiaire en argent comptant pour ses services. Il a estimé qu'il devait lui envoyer environ 5000 $ à tous les deux mois. Il a précisé ne jamais lui avoir fait de prêt. Il dit que la mention relevée par le procureur Gallant était inscrite à la demande de l'intermédiaire.

Le procureur Gallant avait précédemment présenté une lettre que Rosaire Sauriol, le numéro 2 démissionnaire de Dessau, a envoyé à Bernard Trépanier le 20 janvier 2004. On y stipule que Bernard Trépanier devra faire « toutes les représentations nécessaires pour le compte de Dessau-Soprin auprès de chacune des différentes villes sélectionnées par Dessau-Soprin pour le développement de projet d'ingénierie. »

Le témoin a cependant « juré » qu'il n'avait jamais ce travail de démarchage, et qu'il avait uniquement travaillé dans le dossier d'ADM, un élément auquel Rosaire Sauriol ne fait pourtant aucunement référence dans sa lettre. Le témoin a d'ailleurs dit qu'il ne se souvenait pas de cette lettre.

Outre Dessau, Bermax a obtenu au fil des ans des contrats de la Ville de Saint-Jérôme, de la firme de publicité OMNI, des firmes de génie-conseil SM et Tecscult, de la compagnie Nepcon, et d'Octane Communication.

Bernard Trépanier continuera d'être interrogé mercredi matin.

Bernard Trépanier, « faux bénévole » avoué

Plus tôt, Bernard Trépanier a admis qu'il a souvent été un « faux bénévole » lorsqu'il a travaillé comme organisateur politique dans plusieurs municipalités de la grande région de Montréal dans les années 90. Il admet notamment avoir été payé en argent comptant par des partis dans le cadre d'élections à Ville Saint-Laurent (pour Bernard Paquet), à Saint-Jérôme (pour Denis Germain et Marc Gascon) et en partie aussi à Boisbriand (pour Georges Dubois).

M. Trépanier, qui est devenu directeur du financement d'Union Montréal en 2004, soutient que les élections qui étaient organisées dans ces municipalités à cette époque étaient des élections « clé en main ». Autrement dit, ce sont des firmes de services professionnels (ingénieurs, avocats, comptables), qui « misaient » sur des équipes électorales, dans le but « d'obtenir des mandats » de la Ville.

Bernard Trépanier nie avoir fait du financement politique à cette époque. Il soutient que le budget des élections était déjà défini lorsqu'il était recruté comme organisateur politique par une équipe ou une autre. Sa tâche consistait à établir une stratégie avec l'argent qu'il avait à sa disposition, puis à la mener à bien, notamment en faisant du porte-à-porte.

À Montréal, Bernard Trépanier dit avoir commencé à faire de l'organisation politique pour Frank Zampino dans Ville Saint-Léonard en 1989, après que Claude Dumont, qu'il avait connu plutôt dans les rangs du Parti progressiste-conservateur, les eut présentés l'un à l'autre.

Il dit l'avoir toujours travaillé pour Frank Zampino par la suite, mais à titre « bénévole ». Il a expliqué qu'il avait développé une relation d'amitié avec Frank Zampino dès 1989, et que son équipe électorale était comme une « famille ». En 2001, il travaillera pour lui aux côtés d'un « jeune Tony Tomassi ».

M. Trépanier dit qu'il a aussi travaillé bénévolement pour donner un coup de main à l'équipe de Gilles Vaillancourt lors de sa première course à la mairie de Laval. Il s'occupait du secteur Chomedey. Le témoin dit avoir fait peut-être une autre élection avec M. Vaillancourt.

Bernard Trépanier avait commencé à expliquer à la commission son long parcours professionnel. L'ex-argentier d'Union Montréal a d'abord été introduit à la politique en travaillant comme attaché politique pour différents ministres conservateurs entre 1984 et 1987.

M. Trépanier soutient qu'il n'a pas fait de financement politique avant le printemps 2004, alors qu'il obtient le poste de directeur du financement à Union Montréal.

Trépanier n'entend pas collaborer avec la commission

L'avocat de M. Trépanier, Me Daniel Rock, a déjà fait savoir que son client n'a pas rencontré les enquêteurs ni les procureurs de la commission Charbonneau. Il a cependant précisé que son client n'est « pas gêné » de se présenter devant la commission, et ne cherche pas à « l'esquiver ».

Bernard Trépanier est accusé de complot, d'abus de confiance, de fraude et de fraude envers le gouvernement dans le scandale du projet immobilier Faubourg Contrecoeur.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a obtenu mardi matin une ordonnance de non-publication préventive sur la partie de son témoignage qui portera sur ce dossier.

Un texte de Bernard Leduc et François Messier