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Crise à Chypre: la BCE donne son ultimatum, Moscou sort les griffes

Chypre: la BCE donne son ultimatum, Moscou sort les griffes
AFP

CHYPRE - Le compte à rebours est lancé pour le sort de la petite île. Les dirigeants chypriotes doivent se prononcer jeudi sur un "plan B" destiné à empêcher une faillite de l'Etat, après le rejet par le Parlement du plan d'aide européen prévoyant une taxe sur les dépôts bancaires. Le projet devait être soumis au vote du Parlement dans l'après-midi, mais des sources gouvernementales estiment que cela pourrait être repoussé à vendredi. Il va falloir faire vite, car la BCE a donné sa "dead line" : les Chypriotes ont jusqu'à lundi pour s'entendre. Après, ce sera terminé.

Le gouvernement est engagé dans une course contre la montre, alors que les banques sont fermées depuis le 16 mars, en raison des craintes de retraits massifs de fonds. La BCE a décidé de maintenir la fourniture de liquidités d'urgence aux banques jusqu'à lundi. Après cette date, ces liquidités "ne pourront être envisagées que si un programme UE/FMI assure la solvabilité des banques concernées" (voir communiqué officiel).

Le président de l'Eurogroupe (ministres des Finances de la zone euro), Jeroen Dijsselbloem, a déclaré que la crise à Chypre constituait "un risque systémique", en insistant sur la nécessité de "protéger l'intégrité de la zone euro". Une déclaration à prendre avec des pincettes, car les taux d'emprunt à dix ans, baromètres des tensions, sont restés stables jeudi. L'Espagne affiche 4.93%, l'Italie 4.60%, la France 2.02%, l'Allemagne 1.37% et le Royaume-Uni 1.88%. Mais le risque à moyen-terme est imminent, ce que pointe l'agence de notation Fitch.

"Nous ne nous attendons pas à ce que l'instabilité chypriote se propage aux autres systèmes bancaires européens", explique Fitch dans un communiqué. L'agence explique également que toute taxe sur les dépôts bancaires, "augmente inévitablement le risque de contagion au sein de la zone euro".

  • Chypre doit toujours réunir 5,8 milliards d'euros

Alors que Chypre a dit avoir besoin de 17 milliards pour éviter la faillite, les bailleurs de fonds européens ont dit être prêts à lui prêter 10 milliards d'euros mais à condition que Nicosie mette de son côté sur la table au moins 7 milliards d'euros. Chypre doit lever 1,2 milliard grâce à plusieurs mesures, dont des privatisations et une hausse de l'impôt sur les sociétés.

Mais la proposition de taxer les fonds bancaires, qui devait réunir les 5,8 milliards restants, a provoqué un tollé et a été rejeté par le Parlement mardi soir, même si le texte avait été amendé de façon à ne plus mettre à contribution les petits déposants.

L'Europe, qui a accepté cette taxe unilatérale dans la précipitation, porte sa responsabilité dans cet échec. "La réunion de l'Eurogroupe s'est terminée très tôt samedi et la décision est le résultat d'un compromis de l'Eurogroupe", a déclaré jeudi le président de la Commission européenne, Jose Manuel Barroso.

  • Nouvelle taxe bancaire dans les cartons

Selon la chaîne publique de la télévision chypriote, le nouveau projet visant à rassembler les 5,8 milliards comprend toujours un prélèvement sur les dépôts bancaires supérieurs à 100.000 euros. Un porte-parole du gouvernement chypriote avait en outre indiqué mercredi que le nouveau plan pourrait inclure une nationalisation des fonds de pensions d'institutions publiques et semi-publiques.

Une autre solution pourrait être la contraction du secteur bancaire, avec une fusion des deux principales banques pour réduire le montant de la recapitalisation nécessaire, selon la même source. Selon des sources gouvernementales, il inclut l'établissement d'un fonds d'investissement structurel. Ce fonds sera également lié à une émission d'obligations, avec la perspective de revenus massifs que pourraient générer d'ici une décennie les réserves de gaz récemment découvertes au large de ses côtes.

Autre piste : une aide de la puissante église orthodoxe à Chypre, selon le quotidien belge Le Soir. Son chef, l'archevêque Chrysostomos II, a déclaré que l'église était prête à mettre son énorme patrimoine foncier et ses avoirs à la disposition de l'État. Les autorités envisageraient une loi restreignant les sorties en liquide du pays une fois les banques rouvertes, en principe mardi, et scindant les établissements en deux catégories, bonnes et mauvaises banques.

La mesure inédite de taxe sur les dépôts, qui met fortement à contribution les fortunes russes placées à Chypre, a provoqué la colère de Moscou. De nombreux investisseurs russes disposent de plusieurs milliards d'euros sur le sol chypriote.

  • La Russie menace de vendre ses réserves d'euros

Le premier ministre russe Dmitri Medvedev a menacé de revoir la part de l'euro dans les réserves russes si le règlement de la crise financière à Chypre proposé par l'Union européenne lésait les intérêts russes. "Entre 41% et 42% de nos réserves sont en euros et la proposition (ndlr: européenne à Chypre) non seulement était imprévisible, elle est inadéquate", a poursuivi le premier ministre. "Je vais dire tout cela à mon vieil ami José Manuel Barroso" , a conclu Medvedev qui doit rencontre jeudi matin le chef de la Commission européenne à Moscou.

Les réserves d'euros de Moscou sont d'environ 165 milliards, si elles étaient vendues cela aurait pour conséquence de faire baisser la valeur de la monnaie. Est-ce vraiment une "menace" à prendre en considération ?

José Manuel Barroso a assuré jeudi être "conscient des intérêts de la Russie" après les vives critiques russes. "En fait, la Commission européenne est en consultations avec la Russie depuis un certain temps", s'est-il défendu. Le Portugais a expliqué que le plan de sauvetage proposé samedi était le fruit d'un compromis de dernière minute. "La Russie n'a pas été informée parce que les gouvernement de l'Europe ne l'ont pas été, soyons totalement ouverts et honnêtes sur cette question", a poursuivi Barroso.

La contestation populaire à Chypre

» Les principales étapes de la crise financière à Chypre :

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