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Cameron favorable à un référendum sur le maintien ou pas du Royaume-Uni dans l'Union européenne

Les Anglais vont voter pour sortir ou non de l'Europe
AFP

ROYAUME-UNI - David Cameron jette une pierre, ou plutôt un rocher, dans la mare. Il va le promettre ce jeudi dans une grande déclaration: un référendum national aura bien lieu en Grande-Bretagne à l'horizon 2015-2017... Mais seulement si l'actuel Premier ministre est réélu. Le leader du parti conservateur met donc en balance de sa réélection le sort du Royaume-Uni dans l'Union européenne.

Les médias britanniques en avaient déjà profité ces derniers jours pour faire monter la tension, n'hésitant pas à présenter le discours qu'il déclamera ce jeudi comme un texte de "désengagement" dans l'Europe. Des extraits, rendus publics la semaine dernière, ne contenaient pas l'annonce largement attendue de l'organisation d'un référendum sur les nouveaux termes de la relation entre le Royaume-Uni et l'Union Européenne. Elle était pourtant sur toutes les lèvres, ce que David Cameron vient de confirmer.

Confronté à un fort euroscepticisme dans son camp et dans le pays, David Cameron prononcera son speech depuis Londres. Ce qui est une première, pour une allocution concernant un discours-clé sur l'Europe. En 1988, Margaret Thatcher s'était exprimée à Bruges, Tony Blair à Varsovie en 2000, tandis que Winston Churchill avait appelé à des "Etats-Unis d'Europe" à Zurich en 1946.

Le timing est toutefois étonnant: l'annonce de David Cameron semble aller dans le sens inverse de l'opinion publique. En effet, traditionnellement hostiles à l'Europe, les Britanniques sont plus pro-européens ces derniers temps.

Selon un sondage YouGov (partenaire du HuffPost) réalisé le 21 janvier dernier, 40% d'entre eux eux souhaiteraient rester, et 34% partir de l'Union européenne si un référendum leur était proposé. C'est la première fois que les pro-européens l'emportent dans ce sondage. Ils étaient en effet 51% à vouloir quitter l'Europe en novembre dernier. Cliquez ici pour accéder à l'évolution du vote depuis 2010.

Cameron écartelé dans son parti

Le patron des "Tories" a surpris tout son monde. Il avait pourtant exclu de demander aux électeurs s'ils souhaitaient que leur pays reste ou non dans l'Union européenne. Si référendum il y avait, la question devait être plus vague, en évoquant plutôt "les relations entre la Grande-Bretagne et l'Union européenne."

La question est brûlante outre-Manche. Le dirigeant conservateur est soumis aux pressions de sa puissante aile eurosceptique qui s'inquiète de la concurrence de plus en plus menaçante du Parti de l'indépendance (UKIP). D'après un sondage publié début janvier dans le journal Sunday People, l'UKIP pourrait reléguer les conservateurs à la troisième place lors des élections européennes de 2014. En tout, c'est 63% des Britanniques qui appellent à un référendum portant clairement sur le maintien ou non de leur pays dans l'UE.

Dans des extraits du discours qu'il devrait prononcer mercredi et qui ont été rendus publics la semaine dernière par ses services, David Cameron juge qu'il y a trois défis pour l'Union Européenne: la crise de la zone euro, le manque de compétitivité face à la concurrence de pays émergents et le fossé entre l'Union européenne et ses citoyens. Faute de réforme, le Royaume-Uni pourrait "dériver" vers la sortie de l'Union européenne, avertissait le responsable le chef du gouvernement.

Une volte-face de dernière minute

Les parlementaires n'hésitent pas non plus à se montrer menaçants, réclamant le rapatriement d'un certain nombre de pouvoirs de Bruxelles à Londres. Un groupe de députés conservateurs a même été constitué, baptisé "Fresh Start" (nouveau départ), et affirme avoir le soutien d'environ 120 parlementaires. Au rayon des peurs évoquées: "les inévitables conséquences de la crise financière pour la zone euro" et "l'union fiscale et bancaire."

La frange pro-européenne du Parti conservateur et les milieux d'affaires donnent a contrario de la voix pour prier David Cameron de résister aux appels en faveur d'une sortie de l'UE, qui serait à leurs yeux catastrophique pour l'économie britannique. Les libéraux démocrates, alliés des conservateurs au sein de la coalition gouvernementale, affirment de leur côté leur position pro-européenne, ce qui pourrait générer de nouvelles tensions dans le gouvernement.

"Pour le moment, je crois que beaucoup de gens se disent : 'Je souhaite rester en Europe mais il y a des aspects de la relation qui ne me conviennent pas, je veux donc que cela change.' C'est mon point de vue", avait indiqué David Cameron à la fin 2012. Mais l'idée à fait du chemin, les échéances électorales aussi.

Le beurre et l'argent du beurre

La grande question, en réalité, c'est jusqu'où est prêt à aller le gouvernement britannique pour obtenir le beurre et l'argent du beurre. Londres tire depuis quarante ans des avantages économiques importants de son adhésion à l'UE grâce au marché unique. Il faut rappeler qu'environ la moitié des exportations britanniques vont vers le reste de l'Union. Le Royaume-Uni reçoit aussi de nombreux investissements, notamment des constructeurs automobiles, et enfin les services financiers tirent des bénéfices de leur accès simplifié au marché européen.

Si la Grande-Bretagne se contentait d'être membre du Marché unique (et donc quitter l'UE), elle n'aurait pas à participer à la PAC (Politique agricole commune) ni à la politique commune de la pêche. Des économies substantielles pour les contribuables de Sa Majesté, qui donnent actuellement 13 milliards par an à l'Europe (14,5 pour l'Italie, 19 pour la France, 21 pour l'Allemagne).

Un comportement schizophrène, qui fait toutefois trembler la City. En effet, le coût le plus important serait celui de ne pas pouvoir influencer la réglementation financière. Se contenter du Marché unique empêcherait de peser dans la prise de décision. La City, premier centre financier du monde, sera-t-elle capable de maintenir sa position si elle est perçue comme de plus en plus isolée ? Un argument de poids pour le camp des pro-européen, mais le temps semble déjà compté.

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