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La contrainte n'est pas un motif de défense pour une femme victime de violence

Embauche d'un tueur à gages: la contrainte n'est pas une défense
Radio-Canada

Victime de violence, une femme accusée d'avoir tenté d'embaucher un tueur à gages pour faire assassiner son mari ne peut invoquer la défense de contrainte pour éviter une condamnation, a tranché la Cour Suprême du Canada.

Mais la femme qui est à l'origine de cette cause est toutefois libre: la Cour a ordonné l'arrêt des procédures contre elle.

Alors que plusieurs s'attendaient à ce que la « défense de la femme battue » soit précisée, la décision ne vient que clarifier la défense de contrainte.

Battue par son mari qui menaçait de la tuer, ainsi que sa fille, Nicole Ryan avait voulu engager un tueur à gages pour se débarrasser de son conjoint. Mais sans le savoir, l'homme qu'elle avait voulu engager était un agent d'infiltration de la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

Elle avait accepté de le payer 25 000$ et lui avait fourni une photographie de son époux et son adresse.

Arrêtée et accusée d'avoir conseillé la commission d'un crime, Mme Ryan avait plaidé que malgré tous ses appels à la police et aux centres d'aide pour victimes, personne ne l'avait aidée. Elle soutenait qu'elle n'avait pas le choix, et que sa tentative pour faire tuer son mari avait donc été faite sous la contrainte.

Mme Ryan avait été acquittée par la Cour supérieure et la Cour d'appel.

La Cour suprême, à l'unanimité, a rejeté ses arguments. Elle juge que ce moyen de défense de contrainte peut seulement être invoqué lorsque la victime est un tiers innocent.

« À notre avis, le moyen de défense fondé sur la contrainte peut être invoqué lorsqu'une personne commet une infraction sous la contrainte d'une menace proférée dans le but de la forcer à commettre cette infraction. Ce n'était pas le cas de Mme Ryan. Elle voulait faire tuer son mari parce qu'il menaçait de les tuer, elle et sa fille, et non parce que quelqu'un la menaçait dans le but de la forcer à le faire tuer », insiste la Cour suprême.

Malgré cette conclusion, la Cour a jugé que ce cas exceptionnel méritait une réparation exceptionnelle. Elle ordonne l'arrêt des procédures.

La Cour a conclu (huit juges en faveur et un dissident) qu'il serait injuste d'imposer à Nicole Ryan un autre procès. Et cela, en raison des mauvais traitements qu'elle a subis aux mains de son mari et des interminables procédures en justice qui se sont étirées sur près de cinq ans.

« Nous estimons également que l'incertitude entourant le droit en matière de contrainte, conjuguée au changement de position du ministère public entre le procès et l'appel, a porté atteinte au droit de Mme Ryan à une défense équitable ».

Le plus haut tribunal du pays écorche aussi la police. « Il est aussi troublant de constater, à la lumière du dossier, que les autorités compétentes ont semblé démontrer un plus grand empressement à intervenir pour protéger M. Ryan qu'à réagir à la demande de Mme Ryan lorsqu'elle sollicitait leur aide pour mettre un terme au règne de terreur que lui imposait son époux », est-il écrit dans le jugement.

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