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Le titre à Vettel, le panache à Alonso

Le titre à Vettel, le panache à Alonso

Quand le titre de F1 se joue dans la dernière course d'une saison de 20, c'est que quelque chose a bougé. Quelque chose de bien.

Pour la première fois, il y a eu 20 courses disputées, et après ce qu'on a vécu en 2012, ça risque bien de devenir la norme. Déjà, Bernie Ecclestone tente de trouver une 20e destination pour 2013, le 21 juillet, et deux pays tiennent le point de corde, la Turquie et l'Autriche.

Entre les deux, on peut penser que le soutien de Red Bull, propriétaire d'un circuit homologué F1 (anciennement Österreichring et A1 Ring), au projet de Grand Prix F1 aura du poids, même si Bernie Ecclestone a une préférence pour Istanbul.

Le gérant de Fernando Alonso, Flavio Briatore, avait raison quand il disait que les courses rapportent alors que les essais ne sont que dépenses pour les équipes, mais il ne faut pas tomber dans l'excès inverse, et c'est exactement ce qui s'est passé.

En 2005, Ferrari avait fait 155 jours d'essais durant la saison. En 2012, Ferrari n'en a fait que trois, au circuit du Mugello (Italie), la seule séance autorisée par la FIA du 1er au 3 mai, et qui ne reviendra pas en 2013.

Les essais privés sont désormais interdits pour des questions de coûts. Avec 20 courses, nous sommes à la limite supérieure au-delà de laquelle on remplace la valeur de la rareté par le confort de l'habitude.

Le travail des hommes et des femmes de l'ombre, cloîtrés dans les usines, n'a jamais été aussi évident que cette saison. Les équipes ont travaillé fort en simulateur et en soufflerie pour palier les faiblesses de base des voitures, privées des échappements soufflés et mésadaptées aux pneus Pirelli. À cet exercice de la retouche sur la planche à dessin, les ingénieurs de Red Bull ont été les meilleurs, sous la supervision aiguisée d'Adrian Newey, l'aérodynamicien britannique devenu directeur technique.

La Red Bull RB8 souffrait d'un manque cruel de souffle (de ses échappements) et il a fallu une demi-saison pour la remettre à niveau. La Ferrari F2012 n'était tout simplement pas assez rapide, surtout sur un tour (handicapant Alonso sur la grille de départ). Elle ne s'est pas totalement débarrassée de son mal, mais le personnel de l'usine Ferrari à Maranello a décidé de rebâtir dans l'ombre une nouvelle F2012 pour le début de la saison européenne. Et par surcroît en se fiant sur une soufflerie décalibrée, donc plus nuisible qu'aidante.

Jusqu'à Singapour, Sebastian Vettel a été mis en difficulté par les écarts de sa RB8, fragilisée par un souffle trop court des échappements, par une série d'alternateurs capricieux.

Vettel a souffert et a prouvé que dans l'adversité, il pouvait se débrouiller de mieux en mieux.

Fernando Alonso a multiplié les coups de tonnerre pour maintenir son invraisemblable avance au classement des pilotes, de 44 points sur Vettel au soir de sa victoire à Hockenheim, au Grand Prix d'Allemagne.

Le pilote espagnol a offert une opposition inespérée, compte tenu des carences de sa Ferrari. Le titre s'est joué à peu de choses, et certains croient que ce peu de choses se réduit à l'accident dont il a été victime à Spa (Belgique). Pas de point ce jour-là, pas de titre au bout du compte.

On dit que Vettel a été victime du « syndrome Schumacher » après avoir écrasé la concurrence en 2011. Il a eu du mal à gérer l'inconfort en 2012, comme l'ont trahi quelques écarts de conduite et quelques déclarations à chaud qui l'ont obligé à se défendre.

N'a-t-il pas traité Narain Karthikeyan (HRT) de « concombre » en Malaisie, après que les deux se soient heurtés? S'attendait-il déjà, comme Michael Schumacher à une époque, à ce que les autres s'écartent en le voyant dans leurs rétros?

Mais quand le pilote allemand a dû lancer les dés dans l'adversité, il a joué gagnant. Ses remontées à Abou Dhabi et au Brésil sont là pour le prouver. À partir de Singapour, on a bien vu qu'Adrian Newey avait réglé le problème récurrent de la Red Bull, et Vettel, remis en selle, n'a laissé que des miettes aux autres. Il a marqué 281 points.

Au final, trois petits points d'écart au drapeau à damier du Grand Prix du Brésil. Fernando Alonso a été le vainqueur moral de cette saison 2012, avec 278 points, car l'Espagnol a disputé 18 courses sur les 20. Il a été sorti au premier virage à deux reprises, et par un pilote Lotus chaque fois, Romain Grosjean en Belgique et Kimi Raikkonen au Japon. Sa victoire à Valence qui l'a fait pleurer sur le podium reste une image forte de la saison.

Il faudra retenir sa capacité à gérer la tonne de pression inhérente à sa position de pilote numéro un Ferrari, sa capacité à réussir ses départs pour aller chercher les points manquants et pousser son rival dans ses retranchements, comme à Austin où, de la 8e place sur la grille, il s'est retrouvé 4e « en haut de la côte » (premier virage), et sur le podium quand Mark Webber (Red Bull) a abandonné.

C'est (très) dommage que Ferrari ait dû casser un scellé FIA de la boîte de vitesses de la voiture de Felipe Massa pour qu'il écope d'une pénalité et permette à Alonso de partir du côté propre de la piste... Réglo, mais limite honnête.

Alonso a choqué Vettel en disant qu'il s'était battu contre Adrian Newey en fin de saison. C'est pourtant la stricte vérité. Si Alonso a porté littéralement Ferrari sur ses épaules cette saison, alors que l'aérodynamicien britannique a remporté le titre de « joueur le plus utile à son équipe ».

McLaren, au-delà des sept victoires

En dehors du duel pour la couronne mondiale, le manque de réussite de McLaren a été tout aussi retentissant que le retour gagnant de Kimi Raikkonen (Lotus).

Les deux victoires de Jenson Button en ouverture et en fermeture de championnat ne peuvent pas faire oublier le manque de réussite de Lewis Hamilton.

Malgré ses sept victoires (dont trois d'affilée), l'équipe créée par le Néozélandais Bruce McLaren a clairement gaspillé sa dernière chance de pouvoir profiter de l'expérience de deux champions du monde.

Bien sûr, Hamilton a brillé à Montréal sur un circuit qu'il aime particulièrement, mais trop de pépins ont miné ses chances de se battre pour le titre, et l'ont peut-être poussé à quitter le confort du cocon pour aller voler de ses propres ailes chez Mercedes-Benz.

Le rayonnement de la marque allemande a joué pour beaucoup dans sa décision. Et il se découvrira mieux à servir qu'à se faire servir.

Jenson Button a été trop souvent empêtré dans ses soucis d'adhérence. Ses 7 points en 6 courses, entre le Bahreïn et l'Angleterre, ont miné sa saison. Mais il a gardé en tout temps son attitude zen.

L'équipe aura tout de même au Texas dépassé Ferrari pour le nombre total de victoires en F1. Ferrari en a 180 et McLaren en a maintenant 182, grâce aux victoires de Hamilton à Austin et de Button à Sao Paulo.

La première victoire de McLaren remonte à 1968 (en Belgique) avec son fondateur au volant...

Il aura les coudées franches en 2013, année du 50e anniversaire de l'équipe, pour imposer son style et sa façon de travailler. C'est en tout cas ce qu'il espère. Sergio Perez apprendra le métier dans un rôle de soutien.

Le départ de Hamilton est certes un handicap, mais après avoir été coiffé au poteau par le fantasque pilote finlandais Kimi Raikkonen, qui a terminé 3e au classement des pilotes derrière Vettel et Alonso, McLaren voudra peut-être tenter une nouvelle approche. À la Ferrari.

Raikkonen, c'est certainement la bonne histoire de l'année 2012.

Grâce à une régularité remarquable, il a marqué des points dans 19 des 20 courses et a été, après les prétendants au titre, le seul des autres à avoir franchi la barre des 200 points (avec 207).

Sa bravoure dans le combat est intacte, tout comme son irrespect chronique. Sa victoire à Abou Dhabi a récompensé Éric Boullier qui avait parié gros en convaincant le propriétaire de l'équipe, Gérard Lopez, à accepter les conditions du gourmand Finlandais. Il a coûté plus cher que prévu, a admis M. Lopez, et heureusement, a rapporté gros. Mais Ferrari ne le sait que trop, l'humeur de Kimi Raikkonen dépend directement de la qualité de la voiture.

Sa personnalité déroutante n'a en tout cas pas fait peur à Coca-Cola, dixit M. Lopez, qui cherchait une façon d'entrer en F1. Ce sera chez Lotus par le biais de sa marque de boisson énergisante Burn.

Lotus qui serait sur le point de signer une entente avec le groupe industriel américain Honeywell. Le succès du Grand Prix des États-Unis à Austin permet de cogner à de nouvelles portes.

On ne pourra pas reprocher à Bernie Ecclestone de ne pas avoir fait preuve d'obstination pour ramener les États-Unis au calendrier F1. Ce premier rendez-vous texan a fait mouche, avec un circuit complexe, un public intéressé et une course disputée.

Bernie Ecclestone s'est fait très discret en début de saison en raison des négociations pour renouveler les Accords Concorde, qui définissent le cadre commercial du Championnat du monde de F1. Des négociations longues et difficiles, notamment avec Mercedes-Benz, car entreprises sur une base individuelle avec chaque équipe.

Puis, on a senti l'homme d'affaires britannique de 82 ans essoufflé, rattrapé par des poursuites et des soupçons de corruption qui menacent son autorité. Il sait que ses jours sont comptés. Quand il est allé saluer Sebastian Vettel en coulisse pour le féliciter de son troisième titre, plusieurs y ont vu le dernier geste public du Roi (bientôt) déchu.

Conséquence du procès du banquier allemand Gerhard Gribkowski, l'Allemagne et la Grande-Bretagne ont formé un comité conjoint pour éplucher le dossier fiscal de M. Ecclestone. Il serait sur le point de perdre son poste à la tête de la F1 (que lui a laissé le groupe d'investissements CVC Capital, qui détient la majorité des parts de la F1 depuis 2006). Déjà, une course à sa succession est lancée...

La saison 2013 pourrait voir l'omniprésent Bernie Ecclestone quitter la scène, obligé. Il dit avoir encore un millier d'idées et n'a aucune intention de prendre sa retraite, mais la justice pourrait l'y forcer.

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