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Le bonheur des autres

Le bonheur des autres

Quel est l'impact de l'arrivée massive en Europe des joueurs de la Ligue nationale en lock-out? Sur les patinoires russes ou tchèques, le calibre de jeu en est-il grandement amélioré? La venue de ces athlètes de pointe a-t-elle un effet important aux guichets? Radio-Canada Sports présente cette semaine, en provenance de Moscou et de Prague, une série de textes sur le phénomène. Aujourd'hui : l'impact sur le calibre de jeu dans la KHL.

MOSCOU - Le conflit de travail dans la Ligue nationale de hockey (LNH) est la source de pleurs et de grincements de dents en Amérique du Nord. Les partisans doivent prendre leur mal en patience, tandis que plus de 500 joueurs sont encore privés de salaires.

Un texte d'Alexandre Pouliot-Roberge

Deux centaines d'autres joueurs du circuit Bettman ont réussi à réduire les effets du lock-out pour eux. Ils ont opté pour le Vieux Continent. La majorité d'entre eux doit se contenter de jouer pour garder la forme en échange du paiement de leurs assurances. En Suisse, en Allemagne, en Finlande et en République tchèque, les clubs des ligues locales sont à des années-lumière d'avoir les budgets de ceux de la LNH. Les joueurs en lock-out ne se plaignent pas de leur sort, mais ils ne sont guère dans une meilleure position financière que leurs collègues restés en Amérique du Nord.

Un circuit d'outremer se distingue des autres. La Ligue continentale de hockey (KHL) en est à sa cinquième année d'activité, et plusieurs de ses clubs peuvent se targuer d'avoir des budgets dignes de la LNH. Ce circuit aux visées paneurasiennes est, durant le conflit de travail, la meilleure ligue de hockey du monde. Le circuit compte 26 équipes, dont 20 en Russie, ainsi qu'une au Bélarus, au Kazakhstan, en Lettonie, en Ukraine, en Slovaquie et en République tchèque.

Outre Evgeni Nabokov et Nikolai Khabibulin, tous les joueurs en lock-out russes n'ayant pas été rétrogradés dans la Ligue américaine de hockey (AHL) y ont trouvé refuge. En plus des Alexander Ovechkin, Ilya Kovalchuk, Pavel Datsyuk et Evgeni Malkin, quelques joueurs nord-américains s'y sont aventurés. En Sibérie, on trouve l'ailier des Maple Leafs de Toronto Joffrey Lupul avec l'Avtomobilist d'Ekaterinbourg.

Cette immigration n'est pas sans conséquence sur le circuit.

Un calibre plus relevé

Les joueurs dans la KHL s'entendent tous pour dire que le calibre du circuit est sous-estimé en Amérique du Nord. Le gardien de but du Traktor de Tcheliabinsk Michael Garnett a défendu la cage des Thrashers d'Atlanta pendant la saison 2005-2006. Le natif de Saskatoon est catégorique : « il y a beaucoup de joueurs de troisième et de quatrième trios dans la LNH qui ne réussiraient pas à gagner un poste ici. »

Le calibre est tout de même plus relevé depuis l'arrivée des vedettes d'Amérique du Nord. Un autre gardien canadien, Jeff Glass, qui joue pour le Sibir de Novossibirsk, le confirme. L'acquisition de Pavel Datsyuk et de Mikail Grabovski donne plus de force à l'attaque du mythique club de l'Armée rouge (CSKA de Moscou). « Leur première ligne est indéniablement meilleure », confie le cerbère de Calgary après avoir affronté le CSKA dans la capitale russe.

Les vedettes russes ont effectivement beaucoup de succès depuis leur arrivée dans la KHL. Avec le Dinamo de Moscou, Alexander Ovechkin a amassé 7 buts et 10 aides en 17 matchs. Evgeni Malkin montre une récolte de 10 buts et 21 passes en 21 joutes avec le Metallurg de Magnitogorsk. Après 18 affrontements, Pavel Datsyuk a 6 buts et 17 aides au compteur avec le CSKA. Quant à Ilya Kovalchuk, il en est à 10 buts et 18 passes en 19 rencontres avec le SKA de Saint-Pétersbourg.

Ces fabuleuses statistiques ne sont pas seulement le fruit du grand talent des joueurs immigrés. Les vedettes de la LNH gagnent beaucoup à jouer avec celles déjà établies dans le circuit.

Kovalchuk a pour complices les jeunes Vladimir Tarasenko et le petit-fils du mythique entraîneur-chef de l'équipe nationale soviétique Viktor Tikhonov, qui porte le même nom que son grand-père. Pavel Datsyuk a pour compagnon de trio l'ancien de Remparts de Québec Alexander Radulov. Ce dernier a été champion marqueur de la KHL lors des trois dernières saisons. Evgeni Malkin, lui, profite de l'expérience du champion marqueur des deux premières saisons, Sergei Mozyakin.

Le hockey demeure un sport d'équipe, même pour les surdoués de la LNH dans la KHL.

Pas aussi facile pour tout le monde

Ovechkin, Datsyuk, Malkin et Kovalchuk sont donc des machines offensives autant dans le circuit Medvedev que dans celui de Bettman.

Le retour au bercail se passe bien pour eux, mais d'autres ont la vie plus dure.

Ilya Brizgalov en est un bon exemple. Le gardien de but des Flyers de Philadelphie signe beaucoup d'autographes, mais ne garde pas souvent les buts. Il a défendu la cage du club de l'Armée rouge six matchs pour récolter seulement deux victoires. Sa moyenne d'efficacité n'est que de 90 %. Son coéquipier Slovaque Ratislav Stana domine la ligue avec un taux d'efficacité de ,942.

Le gardien de l'équipe nationale russe est donc grassement payé à réchauffer le banc.

Les joueurs étrangers ne s'adaptent pas toujours bien au style de jeu différent de la KHL. Les patinoires olympiques, de quatre mètres plus larges que celles de la LNH, en dépaysent plusieurs.

Cette difficulté d'adaptation a coûté leur emploi à plusieurs joueurs nord-américains par le passé. Des vedettes de la Ligue américaine s'y sont cassé le nez. Chris Bourque, fils du membre du Temple de la renommée Raymond Bourque, n'a pas passé le test avec l'Atlant de Mytichtchi en 2010-2011. Il pourra se consoler en constatant qu'il n'est pas le seul. Après une maigre récolte de 1 but en 12 rencontres avec le Dinamo de Minsk, le centre des Jets de Winnipeg Evander Kane a lui aussi été congédié.

Les joueurs nord-américains attribuent leur difficulté au style de jeu russe.

L'ancien capitaine des Remparts de Québev Josh Hennessy avoue que les joueurs russes sont difficiles à suivre. « Ils bougent tout le temps. Ils changent de place. Ils aiment tourner en rond », explique le Bostonien. L'ancien des Bears de Hershey, le Québécois Alexandre Giroux, abonde dans le même sens. « Des fois, j'ai l'impression que je suis couvert et hop, je ne le suis pas », explique-t-il.

Le fait d'avoir joué dans la LNH sur une base constante ne change rien à ce processus d'apprentissage. Joffrey Lupul a chanté le même refrain après son premier affrontement, dimanche soir. « Je pense qu'après m'être adapté, je pourrai montrer mon meilleur hockey », affirme-t-il à R-Sport après une défaite de 3 à 0 contre l'Avangard d'Omsk.

Il est difficile de prédire si Lupul subira le même sort qu'Evander Kane. L'impact sur le jeu et les succès des joueurs en lock-out s'analyse au cas par cas.

On peut tout de même constater deux grandes tendances.

La première est que la majorité des joueurs européens s'adaptent au jeu de la KHL et qu'ils ont un impact déterminant sur le sort de leur équipe.

La deuxième est que les quelques joueurs nord-américains y font leur chemin de croix.

N'empêche que globalement, la KHL présente un meilleur produit cette année, entre autres grâce au lock-out, et que les répercussions risquent de ne pas se limiter à cette saison. Les joueurs permanents des clubs du jeune circuit eurasien doivent monter leur jeu d'un cran lorsqu'ils affrontent les membres de l'AJLNH. Cela ne peut qu'avoir des conséquences positives sur leur progression à long terme.

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