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Commission Charbonneau : Yves Themens poursuit son témoignage

Yves Themens, jour 2
PC

Yves Themens nie en bloc les allégations faites à son endroit tant par ses anciens collègues Luc Leclerc et Gilles Surprenant que par l'ex-propriétaire d'Infrabec Lino Zambito devant la commission Charbonneau.

Le témoignage du responsable de la planification de l'ensemble des travaux de construction à la Ville de Montréal entre 2004 n'a pas permis d'établir qu'il aurait joué un rôle dans le mécanisme de collusion et de corruption mis sur pied par des entrepreneurs en construction.

Ces allégations, qui lui ont valu d'être suspendu sans solde par la Ville de son poste actuel de chef de section, contrôle des matériaux et expertise.

M. Themens a notamment nié les allégations de Gilles Surprenant selon lesquelles il aurait déjà brandi devant lui « une liasse de billets de 100 $ bien cordés », en disant qu'elle venait de Tony. M. Surprenant dit avoir compris qu'il s'agissait de Tony Conte, de Conex Construction, aujourd'hui décédé.

« C'est totalement faux. Je ne comprends pas comment M. Surprenant peut alléguer des choses comme ça », a déclaré l'ingénieur.

Il a par ailleurs affirmé n'avoir jamais entendu parler, avant la commission, d'argent touché de façon frauduleuse par Luc Lerclerc et Gilles Surprenant.

Deux agents techniques chargés de la surveillance des chantiers à la Ville de Montréal, Michel Paquette et François Thériault, suivront Yves Themens à la barre des témoins, après le contre-interrogatoire de l'Association des constructeurs du Québec et de la Ville de Montréal.

Les deux hommes ont aussi été suspendus par la Ville de Montréal dans la foulée des allégations faites par Lino Zambito devant la commission Charbonneau.

M. Themens a admis qu'il avait lui aussi reçu des bouteilles de vin et des billets de hockey. Il dit ne pas avoir été invité à manger cependant, outre pour un repas de Noël d'Infrabec lors duquel il a pris une bière. La commission a en outre permis de faire ressortir que M. Themens a joué au golf avec des entrepreneurs, parfois lors de tournois organisés par ces derniers.

Le témoin a également dit qu'il n'avait pas constaté par lui-même la hausse du coût des contrats de construction à la Ville. L'affaire est apparue au grand jour, dit-il, quand La Presse et Radio-Canada ont commencé à faire des révélations en 2009, notamment sur l'existence du « Fabulous Fourteen », un groupe d'entrepreneurs faisant de la collusion.

les prix ont commencé à baisser dès l'année suivante, un phénomène qu'il attribue, pêle-mêle, à ces révélations, à la création de l'escouade Marteau, au fait que la liste des soumissionnaires n'était plus disponible et au faible volume de travaux commandés par la Ville.

Ils ont d'ailleurs constaté que, dans les pavages et trottoirs, les prix soumis par les entrepreneurs étaient devenus inférieurs à l'évaluation de la Ville.

Aucun rôle clair dans des stratagèmes douteux

Yves Themens a nié avoir fourni aux entrepreneurs la liste des soumissionnaires potentiels pour un appel d'offres, après qu'elle eut cessé d'être publique.

Lino Zambito avait soutenu que l'ingénieur lui fournissait cette information en 2007 ou en 2008. La liste, expliquait-il, était essentielle pour truquer l'appel d'offres.

L'ingénieur dit qu'il a bel et bien transmis de telles informations à plusieurs entrepreneurs au fil du temps, dont des responsables des firmes Soter, ATG, TGA et CSF, mais que cela était parfaitement légal jusqu'au 30 octobre 2009. Il a même dit s'être renseigné à ce sujet auprès du service juridique de la Ville.

M. Themens soutient que ces listes ont été publiques entre le 27 août 1999, et le 30 octobre 2009, date à laquelle des modifications à la Loi sur l'accès à l'information sont entrées en vigueur, dans la foulée de modifications législatives consécutives au rapport Coulombe.

Yves Themens a assuré sous serment qu'il n'a jamais transmis de liste à quiconque après le 30 octobre 2009.

Les allégations auxquelles il fait face avaient poussé la Ville de Montréal à le suspendre avec solde le 2 octobre de son poste actuel de chef de section, contrôle des matériaux et expertise. Son salaire lui a finalement été retiré le 5 novembre.

Pas de modification d'appels d'offres

Yves Themens a aussi affirmé sous serment qu'il n'a jamais modifié un document d'appel d'offres, comme l'a allégué un ex-ingénieur responsable des plans et devis dans le domaine des canalisations, Gilles Surprenant.

« Si c'était fait [des modifications aux appels d'offres], c'était fait par un addenda de l'ingénieur responsable de l'appel d'offres », a-t-il dit. « Chaque ingénieur était responsable de son appel d'offres. C'était signé, scellé par l'ingénieur responsable de son dossier ».

Gilles Surprenant a plutôt déclaré à la commission qu'Yves Themens collaborait avec lui pour gonfler les estimations du système informatique Gespro ne correspondant pas aux prix que souhaitaient obtenir les collusionnaires dans le domaine des canalisations.

M. Surprenant a affirmé que dans de tels cas de figure, il écrivait des notes explicatives « en collaboration avec M. Themens, qui était chargé, lui, de transmettre les dossiers vers le comité exécutif de la Ville de Montréal ».

« On mettait des notes explicatives, puis moi j'écrivais un texte, puis ça arrivait que M. Themens corrigeait mon texte ou me disait : "Mets ça, puis ça va bien passer" », a raconté Gilles Surprenant.

Mardi, M. Themens a insisté sur le fait qu'il n'avait jamais « vu ou détecté » de « stratagème » pour gonfler les coûts avec les notes explicatives. « Ça ne m'a pas sauté au visage que M. Surprenant en particulier faisait des choses... [...] Je n'ai pas été capable de détecter ça ».

Un voyage de golf avec Tony Conte

Yves Themens a par ailleurs admis qu'il avait joué au golf avec l'entrepreneur Tony Conte pendant une semaine en mars 2005, à Cuba. Ses collègues Luc Leclerc et Gilles Surprenant complétaient le quatuor.

M. Themens a dit que M. Leclerc avait passé une première semaine de vacances seul avec son épouse, et que M. Surprenant et lui devaient aller le rejoindre pour jouer au golf pour une deuxième semaine.

Selon l'ingénieur, c'est Luc Leclerc qui l'a appelé pour lui demander s'il avait objection à ce qu'un « autre joueur » se joigne à eux. Il s'agissait finalement de Tony Conte. M. Themens a donné son accord.

« Ça n'a pas été organisé par M. Conte, c'est M. Leclerc qui m'a invité et je n'ai pas eu d'objection », a-t-il expliqué à la commission.

Luc Leclerc, un ex-ingénieur chargé de la surveillance des travaux à la Ville, avait aussi déclaré que M. Themens avait participé à un autre voyage de golf en compagnie d'Éric Giguère du groupe Soter. Cette allégation a été niée mardi par M. Themens.

M. Themens n'a pas mentionné ce voyage, et la procureure Roy ne lui a pas posé de question à ce sujet.

Luc Leclerc avait aussi dit croire qu'Yves Themens savait que Gilles Surprenant et lui avaient joué au golf avec le parrain de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto, lors d'un voyage organisé par Tony Conte en République dominicaine en 1997.

Cette question n'a pas été abordée non plus mardi.

Prochains témoins

Deux agents techniques chargés de la surveillance des chantiers à la Ville de Montréal, Michel Paquette et François Thériault, suivront Yves Themens à la barre des témoins.

Les deux hommes ont aussi été suspendus par la Ville de Montréal dans la foulée des allégations faites par Lino Zambito devant la commission Charbonneau.

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