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Profession : entraîneur de football

Profession : entraîneur de football

David Lessard jubilait sur le terrain des Carabins au sifflet final samedi dernier.

Le jeune entraîneur-chef de 35 ans, qui venait de remporter la victoire la plus significative de son court règne à la barre du Vert & Or, distribuait généreusement les accolades.

Un texte d'Antoine Deshaies

« Les gens avaient peut-être des raisons de ne pas nous inclure dans l'élite provinciale, mais là j'espère que ça va changer. »

Le modeste triomphalisme de David Lessard s'est arrêté au terrain ce jour-là. Au retour de l'équipe à Sherbrooke, il a rappelé aux joueurs dans l'autobus que leur casier devait être impeccable avant de rentrer chez eux.

Pas de bière ni de champagne pour lui et ses collègues entraîneurs. Comme seule récompense, il s'est obligé à laisser son portable au bureau pour ne pas travailler de la soirée. Il a toutefois regardé le match entre l'Université de l'Alabama et LSU à la télé. On ne sort pas le football du gars.

« C'est un accord que j'ai conclu avec ma copine. Le samedi soir, je n'ouvre pas l'ordinateur à la maison. C'est difficile, surtout après de belles performances. J'ai toujours tellement hâte de préparer le prochain match.

« Je suis chanceux que le logiciel Hudl existe. Ça me permet de faire de l'étude vidéo à la maison. C'est vraiment une invention au service des couples du football! »

Tombé dans la marmite

Le coaching, David Lessard en raffole. C'est son métier à temps plein depuis six ans et un rêve d'enfance.

« Dès l'âge de 12 ou 13 ans, je voulais devenir entraîneur. Le sport était au centre de ma vie, mais j'étais déjà conscient que je n'avais pas les capacités physiques pour gagner ma vie comme athlète. »

Il a surtout joué au hockey, puis au football. Sans grand succès.

« Avoir été mon propre entraîneur, je me serais retranché assez vite, dit-il à la blague. Je n'étais pas rapide, pas athlétique. »

Le diplômé en psychologie de l'Université McGill a fait ses débuts comment entraîneur à l'école secondaire Gérard-Filion en 1998 avant de prendre les commandes de l'attaque des Lynx du Cégep Édouard-Montpetit en 2002.

Si ironiquement sa victoire du week-end contre Danny Maciocia et les Carabins l'a révélé au grand public, c'est vêtu de bleu qu'il est véritablement devenu un entraîneur de football.

L'ancien entraîneur-chef Jacques Dussault lui a un jour demandé de prendre la ligne offensive sous son aile. Lessard s'occupait jusque-là des porteurs de ballon.

« J'ai dit à Jacques que je ne connaissais pas ça, que je ne me voyais pas faire ça. Il m'a répondu que si je voulais être considéré comme un vrai coach de football, je devais être polyvalent. Ç'a été l'élément déclencheur, le début de ma quête continue du savoir. »

« C'est Jacques qui m'a donné ma première vraie chance. C'est comme une première blonde, on n'oublie pas ça. »

Lessard n'a pas quitté les Carabins en mauvais termes, loin de là. Avant le match de samedi, il a chaleureusement enlacé son ancienne patronne chez les Carabins, Manon Simard.

« C'est une femme extraordinaire avec une sagesse exceptionnelle, confie-t-il. C'est une excellente gestionnaire qui m'a beaucoup influencé. Le poste d'entraîneur, c'est pratiquement un job de gestionnaire d'une PME. Manon a beaucoup de valeur à mes yeux. »

Année d'apprentissage

Avant le mois de septembre, David Lessard n'avait jamais dirigé une équipe universitaire. Sa principale expérience à titre d'entraîneur-chef avait été cumulée avec l'équipe du Québec.

Dix matchs plus tard, Lessard voit déjà une petite différence.

« Je suis un peu plus alerte dans mes décisions lors des matchs. Mais la plus grande différence, c'est au plan de l'organisation. Au début j'avais peur de ne pas être capable de tout faire, aujourd'hui j'arrive mieux à jongler avec mes tâches. »

Il prend ses décisions en collégialité avec ses adjoints qu'il rencontre tous les matins.

« C'est important d'être sur la même longueur d'onde et d'avoir l'esprit ouvert. Quand on décide seul, des fois on se concentre sur des éléments précis et on en oublie des évidents. »

Il admet avoir un petit côté Jacques Mercier, le légendaire personnage de la série Lance et Compte, même si les colères à la mi-temps des matchs ne sont pas sa recette préférée.

« Je me fâche seulement quand les joueurs manquent d'intensité, ce qui est assez rare. Ça ne sert à rien de crier après des jeunes qui donnent tout ce qu'ils ont. Quand je me choque, c'est plus souvent pour des banalités comme un vestiaire en désordre. »

La discipline trône en haut de sa liste de commandements. Pour lui, la discipline de ses joueurs dans la vie se reflète sur le terrain.

« Un gars qui perd le focus dans ses études ou dans son entraînement le perdra forcément en match quand tout se déroule tellement rapidement. »

En mission à Québec

Le Vert & Or disputera samedi la deuxième finale de la Coupe Dunsmore de son histoire contre une équipe que les Estriens n'ont jamais battue.

« C'est sûr que ce serait la victoire la plus importante depuis la création de notre programme. »

Sur son terrain, le Rouge et Or est invincible à ses 56 derniers matchs. Aussi bien dire une éternité. Peu d'acteurs du football universitaire québécois peuvent se vanter d'avoir battu l'Université Laval au Stade Telus.

David Lessard le peut.

« J'étais là en 2004 avec les Carabins tout comme mon partenaire Jean-Vincent Posy-Audette, le coordonnateur défensif de l'équipe. »

Il est la preuve vivante qu'une victoire est possible. Peut-être évoquera-t-il ce match pour fouetter sa troupe comme Serge Savard l'a fait samedi à Montréal.

Membre de la corporation du Vert & Or, Savard a été invité à prendre la parole dans le vestiaire de l'équipe. Le Sénateur a évoqué la dernière conquête de la Coupe Stanley du Canadien en 1993, une équipe de travaillants, qu'il a mise en relation avec les joueurs du Vert & Or ignorés de l'équipe d'étoiles.

Une équipe à l'image de l'entraîneur qui travaille un peu dans l'ombre de Glen Constantin et Danny Maciocia.

Jusqu'à samedi dernier du moins.

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