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Au théâtre: marcher et sauver la planète
Renaud Philippe

Il y a du monde dans les rues. Ça marche. Dans Saint-Roch, depuis jeudi dernier jusqu'à ce samedi soir, c'est pour voir ou revoir «Où tu vas quand tu dors en marchant...2». L'événement d'ouverture du Carrefour international de théâtre est gratuit. Une foule déjà conquise déambule au gré d'un parcours semé de découvertes. Les gens prêtent l'oreille, se laissent interpeler par des personnages loufoques, improbables ou terriblement humains.

Principal changement cette année, Frédéric Dubois a remplacé la performance des jeunes à la Marina par une chorégraphie exécutée par le public dans le Jardin Saint-Roch à 23h. En début de trajet, la «Vente de nuit» et le «Jardin intérieur», nous transforment en confidents, souvent en témoins gênés ou en voyeurs captivés par les pensées intimes d'êtres qui nous ressemblent. Étalage de petites et grandes souffrances, livrées à travers différentes histoires, elles expriment des manques ou des pertes.

En sautant du rire aux larmes, l'ensemble du spectacle met à nu notre désarroi ou notre passivité devant autant de situations douloureuses ou moches du quotidien.

Dans les mêmes eaux, il y a cette «Angoisse cosmique ou le jour où Brad Pitt fut atteint de paranoïa» (26-27 mai à 19h et 28 mai à 21h). L'angoisse vient ici de notre impuissance ou de notre démission devant les causes du réchauffement climatique. Comment gérer ce que nous ne cessons d'apprendre à ce sujet? Quelqu'un tel Brad Pitt le superman viendra-t-il sauver la planète à notre place? Hélas, lui-même est atteint de panique devant l'énormité de sa tâche et la mondialisation de la pollution. Ni lui ni nous n'avons de solutions miraculeuses. Nos belles intentions avortent dans le cynisme et l'inaction.

En réalité, en chacun de nous dort un messie. C'est ce que nous montrent cette femme et ces deux hommes début trentaine dans leur salon tendance avec cinéma maison. Bombardés de nouvelles inquiétantes concernant la dégradation de la planète, ils deviennent obsédés par le besoin d'agir sans qu'aucune action ne leur semble efficace. Ils fabulent. Ils imaginent des films où Brad Pitt réussirait à convertir les foules et à changer le cours des choses.

Que retenir de tout cela? A-t-on besoin de revivre au théâtre ce que l'on verra à la télé en rentrant? Peut-être que oui si, comme dans «Où tu vas quand tu dors en marchant...2», cela nous donne envie de questionner notre attitude défaitiste.

Le texte de Christian Lollike, relativement court, est moins drôle que déprimant. Michel Nadeau a voulu l'étoffer et lui insuffler de l'espoir. Il a intégré à la pièce d'abondants extraits vidéos: documentaires tragiques, témoignages d'intellectuels, voix d'artistes, montages humoristiques d'archives...Si l'usage de la video est ici juste et pertinent, son utilisation devient par contre lassante. Images tragiques ou comiques à l'écran, passages délirants ou graves sur la scène, interruptions du jeu par des pauses, tout bouscule le travail des comédiens. Ils incarnent, de surcroît, des personnages peu développés qui semblent débranchés de la réalité dans cette suite de scènes éclatées. Évidemment, ce n'est pas tout-à-fait dénué de sens ici. On appréciera d'autant plus l'excellente interprétation de Emmanuel Bédard, Claude Breton-Potvin et Hugues Frenette.

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