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Présidentielle américaine: Ted Cruz, le plus saignant à droite

Ted Cruz est un intellectuel anti-intellectuel, si tant est que ça puisse exister. Et c'est peut-être exactement ce qu'il faut aujourd'hui au parti républicain.
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L'assistance devait être acquise au sénateur Rand Paul. Le millier de jeunes apprêtés rassemblés dans la salle réservée pour l'occasion à Washington étaient membres de Youth for Liberty, une association étudiante fondée par Ron Paul, père de Rand.

Le public a approuvé par ses rires les moqueries de dortoir que le sénateur a débitées contre le gouvernement. Mais Rand Paul n'est pas parvenu à enflammer la salle. Pas plus que Mike Lee, le très sérieux sénateur de l'Utah, fils d'un avocat général de l'ère Reagan.

Celui qui l'emporta à l'applaudimètre, qui les fit se lever, attisa leurs railleries et qui les mit en ébullition contre les ravages commis par les libéraux fut Ted Cruz.

Arpentant la scène à la manière d'Elvis (un Elvis qui aurait participé à un débat universitaire de Princeton tout en étant un brillant étudiant en droit à Harvard), Ted Cruz était la braise que ces conservajeunes (conservageeks) rêvaient de rencontrer ou de devenir.

Il y a un peu plus d'un an, le nouveau sénateur du Texas était encore rejeté à droite de la droite après sa tentative vaine (dans les deux sens du terme) de bloquer les institutions afin d'empêcher la mise en œuvre de l'Obamacare.

La majorité de ses concitoyens (y compris les leaders républicains du Congrès) percevaient Ted Cruz comme un rebelle vaguement inquiétant, et John McCain, papi grincheux officiel de l'establishment du GOP, l'avait qualifié de "cinglé".

Mais les membres de Youth for Liberty apprécient son mépris pour les doyens du parti, ainsi que sa détermination à mettre des grains de sable dans les rouages du système.

Et c'est de ces sentiments - rejet systématique de toutes les idées "libérales", et dégoût du système et de toutes ses manifestations - que Ted Cruz espère tirer l'énergie qui pourrait, pense-t-il, l'emmener jusqu'à la présidence.

La colère débridée ne remporte généralement pas les primaires présidentielles, et encore moins l'élection présidentielle elle-même. À la Maison-Blanche, les gens veulent de l'espoir et de l'exaltation, pas seulement de l'indignation. Le président est tout de même censé faire tourner la machine.

Pour certains, il émane de Cruz, 44 ans, un halo inquiétant de menace joviale. Son score lui vaut pour l'heure à peine plus qu'un astérisque dans les sondages du parti républicain, loin derrière des personnalités moins apocalyptiques comme Scott Walker et Jeb Bush.

Mais il faut le prendre au sérieux, pour plusieurs raisons.

La première est que son approche énervée pourrait être dans l'air du temps. Même si les électeurs dépendent de plus en plus de l'État et du système politique - et peut-être justement pour cette raison - leur considération pour cette machinerie ne cesse de se dégrader.

Ted Cruz n'apprécie aucun des deux partis, comme la plupart des Américains.

Et il a les outils pour attaquer.

Cruz est un personnage à l'esprit aiguisé et précis, que même ses professeurs de droit d'obédience libérale à Harvard observaient avec un mélange d'admiration et d'effroi.

Il s'est formé dans le bouillon de culture intellectuel de l'affrontement de deuxième génération, travaillant sur la stratégie des conservateurs, au sein de la Federalist Society.

Il a éreinté l'establishment du Texas. Qui le déteste pour ça. Ce qui ne l'empêchera pas de lever beaucoup d'argent dans cet état.

C'est un conservateur tous azimuts, dans tous les grands domaines de la politique : culture, fiscalité, politique monétaire ou encore politique étrangère.

Par ses positions, Cruz offre le jackpot conservateur : anti-avortement, ultra-climatosceptique, à droite du Likoud sur tout ce qui concerne Israël, anti-immigration à l'excès, favorable à l'accroissement des dépenses militaires, etc...

Fils d'un prédicateur baptiste qui a fui le Cuba de Castro, il est libertarien, conservateur au sens traditionnel et faucon. Ses conceptions sont pleines de contradictions philosophiques et tactiques, mais il n'y prête pas attention et poursuit sa route.

Sa panoplie de prises de position clivantes et son appétit font de lui, sur le papier, un moteur potentiel dans les premiers états de primaires et de caucus, où les militants les plus convaincus comptent le plus.

C'est une bête académique, avec deux diplômes obtenus dans les universités les plus prestigieuses.

Mais il annonce sa candidature dans l'entreprise évangélique de la famille Falwell, la Liberty University de Lynchburg, en Virginie.

Fondée par feu le révérend Jerry Falwell, cette institution n'enseigne pas la théorie de l'évolution, elle éduque à ce que son site internet appelle "une vision forte et créationniste jeune-terre de l'histoire de la Terre".

Ted Cruz est un intellectuel anti-intellectuel, si tant est que ça puisse exister. Et c'est peut-être exactement ce qu'il faut aujourd'hui au parti républicain.

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