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Les mouvements artistiques nés au Québec (4/4)

La révolution de l'n'est pas uniquement dans l'utilisation du téléphone intelligent ou de la tablette graphique, mais aussi dans sa diffusion sur les réseaux sociaux.
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Certains styles se retrouvent parfois dans plusieurs mouvements, tout comme certains «ismes» embrassent d'autres disciplines que celle d'origine. C'est le cas des arts médiatiques qui regroupent «des pratiques artistiques indépendantes dont l'objet de recherche et d'expérimentation sont motivés par l'innovation formelle et langagière liée aux technologies de l'information et des communications» selon la définition du Conseil québécois des arts médiatiques (CQAM).

Depuis plusieurs années, avec l'utilisation des nouvelles technologies, on a vu apparaître sur le marché international de l'art contemporain d'autres formes de langage artistique, notamment l'art numérique qui a eu du mal à trouver sa place dans les galeries d'art traditionnelles. C'est l'une des raisons qui a poussé certains centres de diffusion à se spécialiser dans les arts «autres» que ceux reliés aux «beaux-arts».

L'évolution des nouvelles technologies de l'information et des communications a ouvert les portes à l'ère des pixels. Or, il ne suffit pas de savoir prendre une photo avec un appareil photo numérique pour être «photographe». Il ne suffit pas non plus de savoir utiliser la fonction vidéo sur un téléphone intelligent pour être «vidéaste». En d'autres termes, n'est pas artiste qui veut, même avec un téléphone intelligent ayant une résolution photographique de 8 mégapixels et pouvant filmer en haute définition ! Depuis le début des temps, l'outil n'a jamais fait l'artiste.

Pour compléter ce quatrième volet sur les mouvements artistiques, j'ai fait une légère entorse au thème de départ qui portait sur les mouvements artistiques NÉS au Québec. Celui-ci n'est pas né au Québec, mais nous avons des précurseurs québécois pour le faire connaître.

L'Art Mobile ou Mobile Art

L'Art Mobile est un mouvement qui réunit l'ensemble des œuvres artistiques réalisées entièrement sur un appareil mobile (téléphone intelligent, tablette...) avant d'être diffusées sur le Net. Au départ, l'Art Mobile s'appelait iPhoneographie. C'est un courant qui a fait son apparition avec la commercialisation de l'iPhone en 2007. Avec le développement du marché des téléphones intelligents qui a suivi l'arrivée de l'iPhone, le nom s'est transformé pour quelque chose de moins restrictif.

La révolution de l'Art Mobile n'est pas uniquement dans l'utilisation du téléphone intelligent ou de la tablette graphique, mais aussi dans sa diffusion sur les réseaux sociaux.

L'iPhoneographie est apparue en premier sur la Côte Ouest américaine. Le courant a ensuite envahi le territoire pour se retrouver sur la Côte Est, principalement à New York, qui a toujours été un haut lieu artistique, puis en Europe auprès d'artistes œuvrant déjà dans un domaine artistique reconnu. Au Canada, MissPixels est l'une des pionnières de l'Art Mobile. Au Québec, le mouvement est pratiquement inexistant.

MissPixels (@misspixels), Erik Beck (@beckibecko) et Sven (@pixetoile) sont considérés comme des précurseurs québécois de ce mouvement particulier. Ces trois artistes mobiles travaillent chacun à leur manière et ont leur style propre.

C'est en 2012, grâce à une exposition dans un lieu de diffusion de la rue Sainte-Catherine à Montréal, que l'Art Mobile reçoit au Québec ses premières lettres de noblesse. Cette même année, ils ont fondé tous les trois le MAM (Montréal Art Mobile) qui est un regroupement d'artistes qui a pour but de faire découvrir l'Art Mobile et de le démocratiser.

«Notre mission est aussi et surtout de créer des évènements en dehors de la seule diffusion que nous offrent les médias sociaux. Nous produisons de véritables mises en scène de nos images, que ce soit sur support de qualité muséale pour les galeries ou des matériaux originaux tels des post-it (...) ou des affiches (...)» - les fondateurs du MAM.

MissPixels

Née à Boisbriand (Québec) en 1970, MissPixels évolue dans le milieu des arts visuels depuis plus de 20 ans. Illustratrice, directrice artistique et blogueuse pour un journal culturel, MissPixels est considérée comme une pionnière de l'Art Mobile au Canada. C'est en 2009 qu'elle s'est tout naturellement tournée vers le iPhone comme principal médium d'expression artistique.

En 2010, le Wired Magazine nomme deux de ses œuvres Best SmartPhone Photo. À la même époque, le MoMA (Museum of Modern Art de New York) diffuse sur Twitter son œuvre intitulée «4th of July». Cette large diffusion (plus de 400 000 abonnés) a contribué à solidifier la notoriété de ce nouveau mouvement artistique.

MissPixels a participé à de nombreuses expositions collectives dans plusieurs pays, dont l'Italie, l'Australie, les États-Unis, l'Angleterre, l'Espagne, l'Allemagne et le Canada. C'est en 2012 qu'elle fait sa première exposition solo dans un centre d'exposition. Depuis l'artiste a eu l'occasion de présenter son travail dans plusieurs pays. En 2012, le Canadian Geographic publie une série d'images inédites qu'elle a créées pour illustrer un article dans leur magazine. En 2013, ces images remportent un prix au prestigieux National Magazine Award. Depuis novembre 2012, on retrouve des reproductions de ses œuvres à la boutique du Musée d'Art Contemporain de Montréal.

Son travail s'articule autour de séries où se révèle une dualité : la célébration de l'éclectisme urbain dans une mise en scène de banlieue.

« La confrontation visuelle des textures, l'exagération du bruit numérique, l'utilisation d'éléments graphiques ainsi que la juxtaposition des couleurs vives à des univers réalistes alimentent ce conflit ». - MissPixels

Influencée par son environnement web, MissPixels travaille avec les imprévus que la technique peut provoquer. L'artiste enrichit ainsi le concept de dualité. Par la recherche, elle intègre à ses concepts un environnement typographique (les hashtags des médias sociaux). L'artiste s'approprie graphiquement ces signes pour définir un lieu, un évènement, un contexte, etc. Elle les positionne de façon stratégique, indexant et classifiant ses œuvres avant même leur diffusion. Les images de MissPixels sont créées et éditées exclusivement avec son appareil mobile, aucune image n'est donc retouchée à l'ordinateur. Aujourd'hui, elle vit à Mirabel d'où elle rayonne.

Erik Beck

Il est né en 1965 à Montréal et vit aujourd'hui à Sherbrooke. Après une enfance où sa créativité s'exprime par le biais de la musique, de la chanson et du théâtre, il poursuit des études universitaires en photographie et en sculpture. Actif en cinéma et en radio, il devient compositeur, acteur et régisseur. Il signe plusieurs installations sonores et performances avant de rejoindre les rangs d'un important réseau de livres et de disques. Ayant appris la photographie argentique, il s'est forgé un langage visuel avec lequel il travaille encore aujourd'hui. Après un hiatus de 22 ans, il aborde la photographie numérique via la photographie mobile.

En 2011, il expose à l'International iPhoneography Show à la New York Soho Gallery for Digital Art. Dans la foulée : San Francisco et Berlin - et il vient de terminer une série d'expositions à Montréal et à Sherbrooke.

Son travail a été récompensé par un Premier Prix dans la catégorie «Appstractions» du Mobile Photo Awards. Son travail transcende l'imperceptible en contemplatif.

« Trouver des détails urbains souvent cachés et les montrer sous forme de tableaux, mettre en valeur des microcosmes si souvent fréquentés, mais si souvent inaperçus. Marcher sans but précis, sans itinéraires, se mettre volontairement dans un état d'errance est primordial afin de préserver l'intuition et la spontanéité. » - Erik Beck

La liberté (planifiée) permet d'accéder à une perception différente. C'est une étape souvent exécutée au rythme de la ville : réflexe, intuition et spontanéité... Ensuite, vient l'étape de la transformation des images. L'artiste opte pour la lenteur d'exécution, créant une ambiance, une atmosphère ; les contrastes naissent et se multiplient. La contemplation naît.

Depuis peu, Erik Beck travaille sur des assemblages polyptiques où il tente de dégager un nouveau dialogue sémantique, une nouvelle facture graphique qui émanerait de ces jumelages aléatoires. Ses œuvres sont présentées, imprimées sur papier ou sur toile.

Sven

Il est né à Paris (France) en 1973 et vit à Montréal depuis 2007. Musicien, metteur en scène et photographe, c'est un artiste multidisciplinaire ayant des aptitudes marquées pour l'audiovisuel et le multimédia. C'est également un chasseur d'images.

Ses premières œuvres, il les intitule « Images bruit». Ses images sont le résultat d'une longue recherche. Plusieurs années de réflexions et d'expérimentations ont été nécessaires pour décomposer ses images par bloc de pixels. En utilisant des techniques de compressions numériques, il a détourné les outils d'encodage, utilisés habituellement en postproduction, pour mettre en relief les imperfections de l'image. Le traitement, parfois accidentel, rend les pixels amplifiés. L'artiste utilise l'appareil mobile dans un premier temps comme méthode de prise de vue. Sa série « Éclipse» a été réalisée à l'aide d'une multitude d'applications disponibles sur son téléphone intelligent et sur sa tablette graphique. Le résultat du travail donne parfois lieu à des œuvres purement abstraites «qui subliment cet espace indéfini, ce fameux bruit, entre l'image et sa perception». Dans cette série le carré noir renvoie au mouvement fondé par Kasimir Malevitch, le Suprématisme, dont l'iconographie moderne, représentée par le Rectangle noir ou encore par le Carré noir sur fond blanc, ramenait l'art à quelques éléments qui mettaient en évidence le rapport entre la forme et l'espace qui l'entoure.

«Écran bombé, coins arrondis, image en noir et blanc. Pas de doute possible nous sommes au 20ème siècle, fin 70's. Devant le téléviseur en bakelite orange Telefunken Porti 1200 LS, je reste subjugué par une petite lueur au beau milieu de l'écran alors que je viens d'éteindre le poste. Quelques précieuses secondes encore, une minute peut-être, et ce point blanc disparaît. Je rallume et j'éteins immédiatement. Je rallume, j'éteins... et voilà que brille encore mon étoile.

Je comprendrai bien plus tard que ceci fut mon premier contact avec un pixel.» - Sven

Pour l'artiste, la photo n'est pas seulement une prise de vue, c'est une trace, un souvenir, une émotion visuelle.

Conclusion

Cette série à 4 volets, sur les mouvements artistiques, n'est pas une présentation exhaustive de tout ce qui se fait dans la province. Lorsque j'ai débuté mes recherches sur le sujet des mouvements artistiques nés au Québec, j'ai contacté plusieurs artistes, quelques-uns seulement ont répondu à mes messages - ce qui n'a pas permis de présenter plus de 7 mouvements différents, alors que j'aurais pu en écrire davantage car il en existe d'autres. Parfois un seul artiste, comme Charles Carson, cumule les mouvements artistiques: Le Carsonisme et le Mosaïsme (dont je n'ai pas parlé dans cet article). Parfois, les mouvements se ressemblent, mais se distinguent par la démarche. Il est évident qu'il ne s'agit ici que d'un «échantillon» des mouvements artistiques québécois que la population peut découvrir dans certains lieux de diffusion.

Si vous pensez être un artiste instigateur (ou une artiste instigatrice) d'un nouveau mouvement artistique, il est important qu'on établisse publiquement le lien entre vous et le "isme" découvert, car d'autres artistes peuvent le faire avant vous.

Toutes les images sont diffusées avec l'autorisation des artistes

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