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À la demande du lobby des armes, le ministre Blaney affaiblit les contrôles sur les fusils d'assaut

Depuis sa nomination au poste de ministre de la Sécurité publique il y a un an, Steven Blaney a pourtant été informé à plusieurs reprises des graves préoccupations de la Gendarmerie royale du Canada à l'égard de divers modèles d'armes à feu circulant au pays.
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Depuis sa nomination au poste de ministre de la Sécurité publique il y a un an, Steven Blaney a été informé à plusieurs reprises des graves préoccupations de la Gendarmerie royale du Canada à l'égard de divers modèles d'armes à feu circulant au pays.

La GRC lui a notamment souligné le cas de certains fusils de calibre .50 qui sont catégorisés comme armes « non restreintes » - c'est-à-dire accessibles aux détenteurs de simples permis de possession pour armes d'épaule. Les armes de ce calibre sont tellement puissantes qu'elles peuvent percer des véhicules militaires, et plus aisément encore les gilets pare-balles standard des policiers.

Le problème, c'est que le législateur prévoyait que les nouveaux modèles d'armes seraient catégorisés - en tant qu'armes prohibées, restreintes, ou à autorisation non restreinte - au moment de leur introduction sur le marché. Mais puisque « la dernière mise à jour date de 1995, » ces armes tombent par défaut dans la catégorie des armes non restreintes. Les armes non restreintes sont tellement peu contrôlées que la police ne sait même pas qui en possède (sauf au Québec, où le registre des armes d'épaule survit grâce à une injonction de la Cour).

Parallèlement, la GRC effectuait une enquête sur d'autres armes semi-automatiques: la gamme entière des « Swiss Arms » ainsi que diverses versions du modèle « CZ858 » - soit le type d'arme utilisé lors de l'attentat contre Pauline Marois le soir des élections de 2012. (Le présumé tireur, propriétaire légal de l'arme, est accusé du meurtre prémédité du technicien Denis Blanchette. Il y aurait certainement eu beaucoup plus de victimes si l'arme ne s'était pas enrayée après un seul coup de feu.)

Vu leur capacité à « être converti en une arme à feu entièrement automatique dans une période de temps relativement courte avec une relative facilité », c'est-à-dire capables de décharger de multiples balles en succession par une seule pression sur la gâchette, la GRC a statué à la fin février que ces deux catégories d'armes sont bel et bien prohibées.

Cette décision est tout à fait conforme à la loi fédérale, qui interdit spécifiquement les armes automatiques, ainsi qu'au jugement de la Cour suprême de 1993 qui décrétait que les armes semi-automatiques pouvant être converties en mode automatique sont tout aussi illégales, celles-ci étant « conçues dans le but de tuer et de mutiler un grand nombre de personnes de façon rapide et efficace. » N'importe quel chasseur sérieux sait que de telles armes de guerre n'ont pas leur place dans nos forêts.

Or même si bien au courant de la décision imminente de la GRC, le ministre s'en est montré fort étonné, professant avoir « été troublé d'apprendre que des bureaucrates non élus ont décidé d'interdire certaines armes importées de Suisse. »

Conformément à la tradition des conservateurs sous Harper, il a immédiatement précisé quels intérêts priment à ses yeux, en émettant une déclaration adressée spécifiquement aux propriétaires d'armes à l'effet que « notre gouvernement conservateur est de votre côté et va toujours défendre les droits des honnêtes propriétaires d'armes à feu, » les remerciant même « pour leurs années de fidélité »!

Peu après, le gouvernement a annoncé une amnistie de deux ans pour les propriétaires de ces armes prohibées. Le ministre a également promis une révision « urgente » de la décision de la GRC et, le pire, a dit vouloir prochainement introduire une solution « permanente » afin de « de protéger tous les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois de ce type de décisions rétroactives et imprévisibles. »

Au lieu d'applaudir la GRC pour avoir agi dans l'intérêt public, nous avons droit à un autre exemple du mépris total des conservateurs envers les hommes et les femmes d'honneur de la fonction publique qui ne cherchent qu'à faire leur devoir - dans ce cas-ci, faire respecter une loi en vigueur dont l'objectif est de « protéger le public contre les armes dangereuses qui sont conçues spécialement pour tuer ou mutiler des gens. »

Nous les consœurs et confrères des 14 victimes du massacre à l'École Polytechnique, qui luttons depuis 1989 pour un meilleur contrôle des armes, nous ne pouvons que condamner l'immense trahison que représente la position du ministre Blaney face aux valeurs québécoises et canadiennes de paix et de non-violence (une trahison d'autant plus troublante sachant que Blaney lui-même étudiait le génie dans une université québécoise en même temps que nous!)

Mais tant et aussi longtemps que d'autres citoyens ne réagiront pas à des décisions aussi irresponsables, c'est la vision du lobby des armes qu'il continuera à imposer à tout le pays.

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