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Radicalisation des jeunes: sommes-nous sérieux?

Ignorer l'islam politique en parlant de radicalisation chez les jeunes musulmans au Québec, c'est se tromper de cible.
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La Ville de Montréal a récemment annoncé la création d'un centre de prévention de la radicalisation. Le premier ministre du Québec a convoqué les «représentants» supposés (tous autoproclamés) de la «communauté musulmane» pour qu'ils l'aident à lutter contre la radicalisation des jeunes musulmans.

Mais aucun des acteurs mobilisés contre la radicalisation n'aborde, volontairement ou non, la question suivante: qui finance cette radicalisation et qui en profite? Au lieu de cela, ils se contentent de parler de la lutte contre, à la fois, l'intégrisme et l'islamophobie, bien que l'intégrisme en soi (à la base purement religieux et apolitique, consistant à vivre en observant des dogmes de façon stricte, comme cela existe chez des concitoyens des autres confessions et idéologies au Québec) n'est pas un danger pour la société, pas plus que la prétendue islamophobie disproportionnellement médiatisée par certains groupes d'intérêt, au Québec et ailleurs.

Pourtant, depuis la lutte menée par les talibans contre l'Union soviétique en Afghanistan et jusqu'à la création de l'organisation État islamique, une des priorités de la radicalisation des jeunes musulmans et des nouveaux convertis est de créer un large bassin, dans les pays musulmans et en Occident, permettant de recruter des djihadistes afin de soutenir la réalisation des projets politiques des différentes factions islamistes. Ce qui unit tous ces mouvements et les États qui les soutiennent est une idéologie totalitaire violente dont l'objectif est l'établissement d'États islamiques qui appliquent les lois «divines» de la charia dans toutes les sphères de l'activité humaine et dans le maximum de territoires, jusqu'à faire advenir le royaume de Dieu partout sur la terre.

À part quelques «loups solitaires», tous les mouvements terroristes et les individus qui commettent des actes terroristes ou aspirent à en commettre sont logistiquement liés aux mouvements ou aux États islamistes.

Ignorer l'islam politique (l'islamisme) en parlant de radicalisation chez les jeunes musulmans au Québec, c'est se tromper de cible. Et si les «représentants» de la «communauté musulmane» ont une bonne raison de le faire, quelle est la raison derrière le mutisme de nos politiciens à l'égard de ce fait idéologique qu'est l'islamisme?

On mentionne souvent l'influence des imams radicaux sur la radicalisation des jeunes, mais pas assez, voire pas du tout, le rôle très important des chaînes de télévision islamistes par satellite et des sites Internet, tous financés par les États ou des groupes islamistes, tout comme les livres sur l'islam qu'on retrouve dans les librairies en Occident et en Orient, en grande majorité édités pas des maisons d'édition financées par l'Arabie saoudite ou le Qatar.

La lutte contre la radicalisation politique des jeunes ne servira à rien si l'on est incapable d'asseoir les valeurs démocratiques et laïques. Est-ce que le multiculturalisme ou l'inter-culturalisme, dont l'objectif est de rapprocher les cultures et de reconnaître leur apport en les intégrant, sont devenus à ce point des instruments d'autoflagellation pour la culture majoritaire, otage des revendications religieuses qui ont clairement pris le dessus sur l'enrichissement culturel collectif. L'esprit d'ouverture culturelle semble désormais confisqué, servant à accepter les dérives et les excès des dogmes religieux et des comportements en opposition avec les valeurs démocratiques, laïques et de respect des droits de la personne.

Il faut reconnaître, et avec force, qu'en Occident et dans les pays arabes comme la Tunisie, l'islamisme radical ne cache pas ses objectifs: abattre la liberté, le pluralisme et la laïcité, puisque les slogans propagés par les islamistes sont: «La démocratie est l'œuvre des mécréants et le laïc est l'ennemi de Dieu».

Donc, lutter contre la radicalisation des jeunes sans lutter contre l'idéologie qui les attire et sans être conscient des instruments qu'elle emploie, est une lutte stérile et inutile.

De plus, en mentionnant la source du problème, on dissocie l'islam (une religion comme une autre lorsque pratiquée en privé ou dans les lieux de culte) de l'islam politique. On ne stigmatise plus le simple croyant et on lève la tutelle exercée sur lui par des groupes et des individus qui prétendent le représenter.

La lutte contre la radicalisation doit se jouer sur deux fronts: un qui surveille les sources de financement des groupes, des institutions et des individus; et un autre, plus important encore, qui consiste à affirmer l'attachement des Québécois de tous horizons à la démocratie et aux droits de la personne.

Considérant l'aspect multiconfessionnel, multi-idéologique et multiethnique de notre société, l'État québécois et la société civile doivent affirmer leur neutralité, ne serait-ce que pour ce bien «vivre ensemble», et donc, nécessairement :

  • Traiter tous les citoyens sur le même pied d'égalité, sans aucune distinction religieuse, tout en affirmant que dans une société moderne, civile et civilisée, la religion, au même titre que les positions politiques ou philosophiques, est une affaire privée; ce qui implique aussi que l'État ne transige désormais avec aucune organisation à caractère religieux ou ses prétendus représentants.
  • Reconnaître à tout individu le droit de vivre et de pratiquer sa religion librement, en tout respect des droits de la personne, dans la sphère privée; la religion, au même titre que les idéologies politiques et tout signe ostentatoire relatif à un dogme (politique ou religieux) ne devant pas être exprimée dans la sphère publique, notamment dans l'administration et particulièrement à l'école.
  • L'expression religieuse à l'école publique, qu'elle soit par le corps professoral ou par les élèves, constitue, directement ou indirectement, du prosélytisme et il est de notre devoir collectif de protéger les enfants d'une telle influence. C'est d'autant plus vrai qu'une démocratie moderne doit définir l'école comme un endroit d'apprentissage où l'on laisse Dieu à l'extérieur pour faire toute la place au savoir, aux connaissances et à la culture, incluant les valeurs démocratiques et laïques, l'esprit de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, du pluralisme et de la diversité. Face à l'obscurantisme et à la pensée unique qui sous-tend la radicalisation. L'enseignement à l'école doit inciter à la réflexion et favoriser le doute, et non pas les certitudes dogmatiques.
  • Être conscient face à l'endoctrinement subtil exercé par la propagande islamiste, diffusée par des dizaines de canaux de télévision transmis par satellite et sur Internet et de ses effets.
  • Mettre terme à tout accommodement à caractère religieux, au nom du respect de tous dans la diversité qui nous caractérise et dont nous sommes riches.

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