Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Le vrai ménage ou la disparition

Si l'on analyse les résultats du scrutin du 7 avril, on constate qu'avec 30 circonscriptions gagnées, le PQ peut se dire qu'il a eu de la chance. Car, non seulement a-t-il perdu ses élections, mais il aurait pu être carrément rayé de la carte.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Selon moi, Jean-Martin Aussant, l'ancien chef et fondateur d'Option nationale, fait partie des gens qui ont le mieux résumé ces derniers jours l'immense défi qui attend le Parti québécois : se reconstruire. Sur son compte Twitter, l'ancien député de Nicolet-Bécancour a synthétisé sa pensée en affirmant: «Tout prétendant s'entourant des mêmes éléments qu'un chef déchu est voué à la déchéance. Vrai ménage, ou disparition». En effet. Si l'on analyse les résultats du scrutin du 7 avril, on constate qu'avec 30 circonscriptions gagnées, le PQ peut se dire qu'il a eu de la chance. Car, non seulement a-t-il perdu ses élections, mais il aurait pu être carrément rayé de la carte. Je fonde ce jugement sur une comparaison des résultats des élections de 2012 et 2014 dans les 30 comtés que le PQ a remportés le 7 avril.

Le PQ recule, partout

Si on jette un coup d'œil à la carte des résultats 2014, on constate une prédominance du rouge libéral. À première vue, on est porté à croire que le PQ a réussi à conserver ses forteresses dans plusieurs régions du Québec. Pourtant, le PQ est en déclin, y compris dans ces comtés. Dans Gaspé, le député péquiste sortant, Gaétan Lelièvre, l'a remporté avec 3513 votes d'avance sur son adversaire libérale, contre 5972 en 2012. Dans Rimousi, c'est 3140 votes de majorité contre 8721 en 2012. Au Lac-Saint-Jean, c'est 4828 votes de majorité contre 9268 en 2012. Ou encore dans Abitibi-Ouest, où François Gendron l'a remporté avec seulement 1652 votes de majorité contre 7307 en 2012. Bref, même dans ses forteresses, le vote péquiste a reculé.

Dans la région de Québec, le PQ était déjà en 2012, à l'exception de Taschereau, rayé de la carte. Mais en 2014, il y perd des plumes encore plus. Agnès Maltais l'a échappé belle avec une avance de seulement 451 votes sur son concurrent libéral, contre 4227 voix de majorité en 2012. Dans Jean-Lesage, le PQ a fini troisième alors qu'il était arrivé deuxième en 2012, et le vote péquiste a reculé même dans les comtés de la région de Québec où il avait fini 3e en 2012. Comme dans Louis-Hébert où il est passé de 21,31% à 18,4%, Lévis (20,05% à 16,6%), et j'en passe.

On sait aussi que le PQ ne va pas chercher beaucoup d'appuis sur l'île de Montréal. Le 7 avril, il a reculé encore plus. Diane de Courcy a été défaite dans Crémazie (par une avance de 2548 votes libéraux). Nicole Léger, Maka Kotto, Jean-François Lisée et Carole Poirier ont réussi à garder leurs sièges, mais, encore une fois, avec un écart beaucoup plus petit qu'en 2012. Bref, prenez n'importe quel comté gagné par le PQ en 2014, et vous verrez que l'appui y a reculé depuis 2012.

La nécessité de repenser le projet national québécois

Devant un tel scénario, c'est toute la raison d'être du PQ qui doit être mise en question. Les ténors péquistes ont beau accuser les médias et les libéraux d'avoir joué sur la peur du référendum, le fait est que devant un tel résultat, ce sont les militants du PQ qui doivent avant tout se regarder dans la glace. Je ne dis pas que l'idée de la souveraineté et de l'indépendance est morte au Québec. Le Québec forme une société distincte en Amérique du Nord, et il est tout à fait normal qu'une bonne partie de la population exige plus d'autonomie et une «voie» distincte au sein de la fédération canadienne.

Le mouvement nationaliste québécois figure au rang des mouvements nationaux les plus puissants en Occident. C'est un mouvement qui a existé avant le PQ, que s'est approprié le PQ, et qui continuera d'exister après le PQ. Depuis sa fondation en 1968, une question principale a défini le discours national au Québec : quel niveau de décentralisation devrait-on établir entre Québec et Ottawa (voir à ce sujet l'étude de Hudson Meadwell : The Politics of Nationalism in Quebec, 1993)? Pour les indépendantistes les plus convaincus, le Québec doit se séparer du Canada. À l'autre extrémité, il y a ceux qui pensent que le Québec ne devrait pas bénéficier de plus de décentralisation, et voudraient même voir une centralisation accrue des décisions à Ottawa. Les années où le Québec est passé proche de devenir un pays indépendant sont des années où des leaders comme René-Lévesque et Lucien Bouchard ont su faire rêver une génération, et nourrir l'espoir d'un pays. Un pays construit non pas sur la peur de l'Autre, la crainte identitaire ou les chicanes constitutionnelles, mais sur l'espoir de se donner une voie indépendante dans le respect des droits et libertés de tous.

Charte des valeurs, projet de loi 14, l'idée d'interdire aux Québécois francophones de fréquenter les cégeps anglais, la peur du déclin du français, etc. Autant de signes qui témoignent du repli identitaire du PQ. Le 7 avril au soir, Bernard Drainville a dit : «C'est fini la charte». S'il veut survivre, le PQ doit aussi dire au revoir à l'ensemble du repli identitaire sur lequel s'est fondé le projet de charte, et se reconstruire sur de nouvelles bases. Après tout, l'indépendance du Québec est la raison d'être du PQ. C'est une raison d'être tout à fait louable, si elle est bien justifiée.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.