Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Cinq prévisions pour le Moyen-Orient en 2015

Cinq prédictions concernant le Moyen-Orient pour 2015... même s'il est risqué de s'aventurer dans des prévisions pour cette région du monde!
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Il serait imprudent de faire des prévisions à long terme sur le Moyen-Orient. Voici les miennes pour l'année qui s'annonce.

1. Daech perdra de sa puissance et de son influence

Je ne pense pas que Daech soit un Etat viable. Il n'a aucune cohérence idéologique, pas d'institutions politiques et sociales sérieuses, pas de processus électoral digne de ce nom, aucune capacité à gérer la logistique indispensable pour gouverner, et aucune chance d'établir des relations officielles avec ses voisins de la région. De plus, il s'est aliéné une majorité des musulmans sunnites du monde entier, indépendamment de la profonde insatisfaction que l'on retrouve chez les sunnites irakiens et syriens.

Dans un monde idéal, Daech s'effondrerait de lui-même, c'est-à-dire sans qu'une intervention extérieure massive - notamment occidentale - ne lui donne l'occasion de renforcer ses convictions idéologiques. Pour être battu sans appel, le concept de Daech, tel qu'il est énoncé et mis en œuvre, doit échouer clairement de lui-même aux yeux des musulmans de la région.

2. Le rôle de l'Iran dans la région ne fera que croître

En dépit de tous les obstacles, je crois à la réussite des négociations entre les Etats-Unis et l'Iran. Les deux pays ont désespérément besoin d'un succès dans ce domaine. La normalisation des relations diplomatiques a déjà bien trop tardé et elle est indispensable à la stabilité du Moyen-Orient.

De plus, l'Iran et la Turquie sont les deux seuls "vrais" gouvernements de la région fondés sur des principes de légitimité populaire, en dépit de tous leurs défauts. La Turquie est un État démocratique, l'Iran, un État semi-démocratique (les élections présidentielles, même si elles ne sont pas parfaitement représentatives, y sont vraiment importantes).

Contrairement aux dirigeants arabes, ces deux États répondent de manière favorable aux aspirations des peuples de la région. Le Golfe va devoir se faire à l'idée d'un Iran normalisé. Les deux pays n'ont jamais vraiment été en guerre, en dépit des propos bellicistes tenus ici ou là depuis un siècle. L'Iran est une puissance post-révolutionnaire, porteuse d'une vision du monde où le Moyen-Orient serait réellement souverain et libéré de la domination occidentale, ce qui n'est pas vraiment le cas des pays arabes. L'influence de l'Iran va également s'accroître en termes de soutien aux tentatives régionales de contrer les efforts d'Israël, qui souhaite maintenir les Palestiniens sous domination permanente.

3. L'influence du Président turc, Erdogan, entamera son déclin

Après avoir été un Premier ministre brillant pendant la première décennie au pouvoir de l'AKP (Parti pour la justice et le développement), il est aujourd'hui empêtré dans des accusations de corruption et laisse libre cours à sa paranoïa face à tous ceux qui osent le critiquer ou défier une autocratie de plus en plus portée aux visions chimériques. Il est en train d'endommager les institutions du pays et de détruire son bilan et celui de son parti. Je continue à espérer que les grandes institutions turques, même affaiblies, permettront néanmoins au pays de rester foncièrement démocratique et non-violent jusqu'à ce qu'Erdogan perde la confiance du peuple, ce qui pourrait survenir plus rapidement qu'on ne le pense.

4. La Russie jouera un rôle majeur - et globalement positif - dans les tractations diplomatiques au Moyen-Orient

La capacité de la Russie à jouer un rôle diplomatique (et technique) majeur pour résoudre le problème du nucléaire iranien, et sa grande influence en Syrie, contribueront de manière significative à résoudre les deux conflits prioritaires et à haut risque affectant toute la région. Il est essentiel que ce rôle soit accepté et intégré, au lieu d'être perçu comme une simple extension d'un conflit mondial de type "guerre froide", dans lequel les pays occidentaux ont une part de responsabilité. Ils ont persisté à générer des confrontations contre-productives en tentant d'imposer l'OTAN à l'Ukraine. Vous imaginez la réaction des Américains si un traité de coopération militaire entre le Mexique et la Chine permettait aux Chinois de positionner des armes et des troupes sur le territoire mexicain?

5. Les talibans continueront à étendre leur emprise sur le gouvernement afghan

Après treize années de guerre en Afghanistan, les États-Unis n'ont pas réussi à stabiliser la totalité du pays ou à marginaliser les talibans. Bien plus qu'un mouvement islamiste, ceux-ci se sont, en quelque sorte, substitués aux nationalistes pashtouns en Afghanistan (même s'ils ne sont pas acceptés en tant que tels par l'ensemble de cette ethnie). Les Pashtouns ont beaucoup perdu quand les États-Unis ont renversé les talibans en 2001, et l'inclusion de talibans modérés dans le nouveau gouvernement est essentielle à la stabilité du pays. Les talibans vont essayer d'accroître leur influence politique dans les négociations à venir sur le partage du pouvoir. Il n'est pas réaliste de les en exclure: la stabilité du Pakistan dépend en partie d'un tel accord.

Allez, j'ai pris suffisamment de risques de me tromper pour une année entière.

Ce blog, publié à l'origine sur Le Huffington Post (États-Unis), a été traduit de l'anglais par Bamiyan Shiff pour Fast for Word.

L'Etat islamique, c'est quoi?

L'État islamique en 7 points

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.