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Quand Lauren Bacall a commencé sa carrière au cinéma, elle était très jeune - 19 ans - et ne connaissait rien d'autre que l'innocence de sa propre splendeur. Un béret, un tailleur pied de poule, une cigarette, un regard sensuel et pénétrant, et c'était tout.
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Lauren est partie. La mort d'une légende, particulièrement d'une star américaine, est toujours un objet d'affliction et de souvenir. Particulièrement ces temps-ci où les atrocités internationales nous incitent à nous réfugier, lâchement, mais humainement, dans le rêve et l'identification dans la beauté et l'intelligence.

Quand Bacall a commencé sa carrière au cinéma (elle avait été brièvement ouvreuse, comme sortie du tableau de Hopper), elle était très jeune - 19 ans - et ne connaissait rien d'autre que l'innocence de sa propre splendeur. Un béret, un tailleur pied-de-poule, une cigarette, un regard sensuel et pénétrant, et c'était tout. Avec tout de même la minceur (d'où son surnom de Slim) et l'allure d'un mannequin qu'elle a été aussi. Mais ce regard est devenu mythique. Le réalisateur Howard Hawks qui l'avait engagé pour Le port de l'angoisse lui demandait de le porter sur Humphrey Bogart et de prononcer des phrases simples et ambigües: «Vous savez siffler, Steve? Vous rapprochez vos lèvres et vous soufflez.» Les lèvres, l'essoufflement de l'amour physique, il y avait là toute l'ambiguïté nécessaire pour passer à travers les mailles du filet de la censure très à cheval à l'époque sur la sexualité.

C'est ainsi qu'on fabrique un des chefs d'œuvre du film noir américain, c'est ainsi que nait l'étincelle entre deux êtres, même s'il y a une grande différence d'âge et 50 techniciens qui vous entourent sur un plateau. Ce qui faisait l'affaire des publicistes, c'est que le regard - « the look » comme on a ensuite appelé Lauren - a fait fondre Humphrey Bogart pourtant marié et que les deux amants se sont épousés après le divorce de Bogey et ne se sont plus quittés jusqu'à sa mort à lui.

Pour l'apprentissage du cinéma, c'était bien simple : il suffisait à Lauren de regarder Howard Hawks et de l'imiter. Au besoin, on recommençait. Mais les phrases étaient courtes et l'adolescente bonne élève. Et de toute façon son charme était inné. Ce charme, ce chic, cette classe, la voix déjà rauque en tout cas basse, l'insolence de la jeunesse consciente de sa propre beauté. Le film sort. Le scénario est embrouillé, on n'y comprend pas grand-chose, mais Hawks est un maître qui change de genre à chaque film et à chaque fois signe un chef d'œuvre qui deviendra un classique.

Ensuite, Bogart, déjà au firmament, veillera sur la future carrière de Lauren. Elle aura deux périodes: jusqu'à la mort de Bogart et, ensuite, une longue vie après sa mort. Elle sait jouer depuis longtemps, elle est une star, elle est très drôle, elle a pu être très féroce, elle est devenue la femme américaine telle que le cinéma nous l'a fait connaître de mille façons, elle les incarne toutes. Elle aura de quoi écrire un jour ses mémoires. Comme disait John Ford, entre l'histoire et la légende, imprime la légende. Promis, John!

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