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À l'ombre de la misère

Le 25 décembre, lors de mon retour à Bamako après un séjour au nord du Mali, mon collègue malien m'a demandé si j'allais célébrer le temps des Fêtes. Je l'ai regardé et lui ai demandé ce que je pourrais bien célébrer dans un pays où il y autant de misère. Il n'a pas répondu.
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Le 25 décembre, lors de mon retour à Bamako après un séjour au nord du Mali, mon collègue malien m'a demandé si j'allais célébrer le temps des Fêtes. Je l'ai regardé et lui ai demandé ce que je pourrais bien célébrer dans un pays où il y autant de misère. Il n'a pas répondu.

Que ce soit pendant le temps de l'Eid ou bien de Noël, la pauvreté, elle, ne prend jamais congé et ses impacts dans un pays comme le Mali, où il n'y a pas de filets sociaux, sont terribles.

Au Nord du Mali, plusieurs enfants souffrent de malnutrition chronique. Lors d'une de mes récentes visites de villages entre Mopti et Gao, j'ai été touché de voir tant d'enfants aux ventres bombés et aux yeux exorbités. Un représentant médical m'a indiqué que sur son territoire de quelques villages, 28% des enfants de 6 mois à 5 ans souffraient de malnutrition, dont 93 cas sévères et 347 modérés.

En effet, selon les résultats préliminaires de la cinquième Enquête démographique et de Santé du Mali (EDSM-V), qui a été réalisée de novembre 2012 à février 2013, grâce à des fonds provenant du gouvernement du Mali, de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) et de la Coopération canadienne, une moyenne de 38% des enfants maliens souffriraient de malnutrition chronique, dont 19% avec une forme sévère qui touche sérieusement leur croissance normale et qui apporte un risque élevé de morbidité et de mortalité. Le niveau de retard de croissance augmente rapidement avec l'âge. Il est de 15 % chez les enfants de moins de 6 mois, se chiffrant ensuite à 24 % chez ceux de 9-11 mois. Puis, il continue de grimper pour atteindre un plateau de 48 % à 18-23 mois, qui se maintiendra après cet âge.

Malheureusement, le répit ne sera pas pour cette année puisque les résultats préliminaires récents des évaluations de besoins en sécurité alimentaire, réalisées par l'unité nutrition Unicef au Mali, mettent en garde contre le fait que plus de 1,35 million de personnes vivant dans le nord du pays sont présentement confrontées à une insécurité alimentaire modérée ou grave, et que cette situation risque de se détériorer l'été prochain avec la combinaison d'une période de sècheresse déjà avancée et un hivernage récent beaucoup moins productif qu'à l'habitude.

Les populations du Sud ne sont pas épargnées. Dans la région urbaine de Bamako, on y retrouve beaucoup des gens qui ont quitté les villages à la recherche d'emplois qui sont, la plupart du temps, inexistants. Ainsi donc, les facteurs sociaux économiques responsables de la pauvreté extrême forcent plusieurs familles à utiliser leurs enfants, parfois en très bas âge, pour générer de l'argent, soit en mendiant dans les rues, soit en travaillant dans des lieux insalubres comme dans les dépotoirs, afin de récupérer des déchets qui peuvent être revendus. Ces familles, elles, n'ont d'autres choix que de vivre à l'ombre des lieux insalubres et infects. Conséquemment, ces situations ne font qu'augmenter les problèmes médicaux comme le paludisme et de nombreuses autres infections chez des enfants avec une santé déjà très hypothéquée. Et le problème de la malnutrition ne s'en trouve toujours pas plus réglé.

À bien y penser, pour le Nouvel An, en plus d'avoir une pensée pour tous ces enfants, je saluerai la grâce avec laquelle les Maliens vivent à l'ombre de la misère et réussissent malgré tout cela à trouver un bonheur de vivre.

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Avril 2018

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