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Un toast à l'eau de qualité

Est-ce que les promoteurs de l'industrie gazière sont réellement prêts à ingurgiter un tel cocktail chimique; pas du «», mais de la véritable eau de fracturation? J'aurais plutôt tendance à leur proposer un vrai, à défaut de quoi, ils pourraient bien en devenir, des zombies! Sachons choisir nos tord-boyaux!
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À messieurs John Gorman, vice-président de Halliburton Canada, Michael Binnion, président de l'APGQ et Nicolas Marceau, ministre des Finances du Québec

Dans l'annonce de la 5e conférence annuelle de l'Association pétrolière et gazière du Québec, il est écrit que c'est «en buvant un verre contenant du liquide de fracturation que John Gorman d'Halliburton entend conclure son allocution». Je suis de ceux qui ont fait du piquetage devant l'Hôtel Sheraton le matin du 28 octobre parce que la qualité et la disponibilité de l'eau sont, selon moi, mises sérieusement en péril par l'immature technique de fracturation hydraulique.

J'avoue que certains de mes concitoyens ont souvent mis les promoteurs de l'industrie gazière au défi de boire un verre d'eau provenant d'un puits fracturé. Jusqu'à maintenant, du moins au Québec, tous ont décliné ce défi estimant, sans doute, que ce geste était trop périlleux pour leur santé.

En buvant un additif de fracturation, qu'il ne faut pas confondre avec de l'eau de reflux de la fracturation, John Gorman veut, probablement, tenter de convaincre les sceptiques que les activités de son industrie ne représentent pas un danger pour la santé de la population. Mais, même si les produits chimiques représentent moins de 1% du volume d'eau, disons 0,5%, ils sont loin d'êtres inoffensifs; un poison à 5000 ppm, ça peut tuer rapidement! Parmi ceux-ci, et je choisis ceux qui ont été utilisés au Québec, on retrouve des sels (sulfonates) de benzène et de toluène, du triméthylbenzène, du nitrilotriacétate de sodium, des dérivés quaternaires de quinoléine, du méthanol, du naphta; enfin plein de bonnes choses capables de nous intoxiquer en un tour de main.

Des centaines de produits différents ont été utilisés par l'industrie pour forer et fracturer la roche en Amérique du Nord. Et il ne faut pas oublier que ces produits ont la capacité de réagir entre eux, ou avec ceux présents dans le sous-sol, pour produire d'autres substances. En plus, toutes ces substances chimiques peuvent se dégrader en de nombreuses autres... Une étude de l'Agence de protection de l'environnement américaine (l'EPA) en rapporte, page 125, un total de 1027, pour les seules années 2005 à 2010, et ce nombre pourrait augmenter de plusieurs centaines au fur et à mesure que les analyses se poursuivent.

Alors, est-ce que M. Gorman est réellement prêt à ingurgiter un tel cocktail chimique; pas du « Clean Stuff », mais de la véritable eau de fracturation? J'aurais plutôt tendance à lui proposer un vrai zombi, à défaut de quoi, il pourrait bien en devenir un! Sachons choisir nos tord-boyaux, voyons!

Comme l'industrie refuse de divulguer la composition chimique complète du mélange de fracturation, pour la bonne raison qu'elle ne la possède pas, la seule façon de jouer honnêtement cette comédie serait de boire un verre d'eau provenant d'un des rares puits - long travail ici - où l'eau de fracturation ne mettrait vraiment pas sa santé en danger. Ou... pour des raisons d'économie, de toutes sortes, simplement ajouter un colorant alimentaire «pour faire semblant»?

Bref, est-ce que John Gorman est prêt à laisser un expert en toxicologie (ou un coroner!) analyser le reste d'eau au fond de son verre? Si une firme de génie-comptable comme Samson Bélair/Deloitte & Touche ne peut certifier qu'il s'agit bien d'eau de fracturation recueillie à la tête d'un puits qu'il a ingurgité, toutes les personnes qui connaissent le dossier risquent d'être persuadées que ce toast est une mascarade de mauvais goût. Au même titre que le site Internet que M. Gorman nous recommande : le oilandgasinfo.ca, en anglais exclusivement, et commandité par le Petroleum Services Association of Canada, représentant «nearly 260 oil and gas services companies that employ more than 80 000 people, many of whom live and work near small communities in western Canada »...

Alors, ce toast, est-ce vraiment une farce burlesque faite avec un verre d'eau potable où on a ajouté un peu de colorant alimentaire? Monsieur Gorman, membres de l'APGQ, bureaucrates et ministres des divers gouvernements, levez avec sérieux vos verres remplis d'eau de fracturation certifiée ayant été puisée à la tête d'un puits, je vous y invite. Si vous voulez convaincre la population de l'innocuité de l'eau de fracturation, j'aimerais que vous montiez ensuite sur scène avec les femmes de votre vie (conjointe, fille, belle-fille, etc.) qui sont enceintes et qu'elles boivent, elles aussi, un verre de cette eau qui contient vraisemblablement des centaines de produits chimiques.

Si vous refusez d'imposer ce «challenge» à ces êtres en formation, issus possiblement de vos gènes, pourquoi imposez-vous ce risque aux enfants de plus de 15 millions de Nord-Américains qui vivent actuellement à moins d'un mille (1,6 km) d'un puits fracturé?(5) En anglais, il est courant de dire : «What is sauce pour the goose is sauce for the gander», ce qui est bon pour l'un est bon pour l'autre...

Si vous êtes incapables de relever ce défi, c'est que ce toast est un vulgaire «stunt» publicitaire dont l'objectif est de leurrer les citoyens avec des antonymes de la vérité ! C'est que, dans vos entrailles, et dans les entrailles des personnes qui vous sont le plus chères, vous reconnaissez implicitement les faits scientifiques que des personnes comme moi, et d'autres tentons d'établir et de mettre au jour.

Pour ma part, je lève mon verre à tous ces enfants des générations à venir et à leur droit d'avoir accès à une eau potable de qualité!

Merci à Marc Brullemans pour son aide au sujet de la toxicité des produits

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