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La crise d'ado 2.0 et le djihad

En Occident et ailleurs, le cynisme du capitalisme sauvage, qui a dégradé les idéaux des Lumières, favorise ces engagements.
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Depuis l'avènement de l'organisation État islamique, des parents médusés découvrent que leurs adolescents ont une seconde vie virtuelle cachée, islamiste.

En effet, nous découvrons tous les jours que des adolescents se convertissent à un islam extrémiste, jusqu'à envisager de partir en Syrie ou dans n'importe quel coin du monde pour aller faire le djihad.

Ils prient, ne mangent plus de porc, ne voient plus les copains, les filles se voilent et finissent, pour la plupart, par refuser d'aller à l'école. Ils passent leur vie sur Internet, où une petite horde d'amis les soutiennent dans leur nouveau combat «héroïque» de radicalisation. Dans le cas des adolescentes, ce n'est pas d'une radicalisation religieuse dont il est question mais bien d'une radicalisation amoureuse sur fond de djihad.

Le point commun de cette nouvelle crise d'ado 2.0 et du djihad est la naissance d'une autre identité. Aux questions «qui suis-je?», «que vais-je devenir?», qui permettent de rejeter les valeurs des parents et de choisir celles qu'ils intègreront à leurs propres valeurs, les images et les contacts virtuels offrent à ces adolescents des réponses quasi immédiates par le biais d'identifications imaginaires, intenses et fortes. En effet, Internet leur permet de se forger leur propre identité, comme une armure pour changer de corps, d'existence, de destin à la carte. Tout comme dans un jeu vidéo.

Les groupes djihadistes ont bien compris le processus, simple et peu coûteux, qu'ils n'hésitent pas à utiliser comme une arme de guerre contre l'Occident. Désormais, quelques clics sur Internet suffisent pour faire l'amour (pour les filles) ou la guerre (pour les garçons) en Syrie. Pourtant, ils n'ont aucune idée de ce qui s'y passe réellement. C'est seulement lorsqu'ils arrivent sur place et qu'ils sentent l'odeur de la guerre et du sang qu'ils réalisent qu'ils ont atterri en enfer. Terrorisés, ils cherchent à sortir de là, mais, hélas, le plus souvent, il est trop tard.

Sont-ce des histoires banales d'adolescents en crise qui se forgent une identité de substitution pour rationaliser le malaise qu'ils ressentent au sein de leur famille? Il y a des histoires d'adolescents qui se séparent de leur famille en se trouvant une autre famille dans le sport, la drogue, la sexualité et les gangs. La dangerosité de cette crise d'ado 2.0, c'est la certitude qu'ont les adolescents que l'arrière-plan djihadiste sur Internet détient la vérité, et de façon plus virulente. Alors, ils se mettent hors d'atteinte en se cantonnant dans une foi inébranlable, proche du délire. Ils ne sont pas dans la séparation mais dans la rupture. Ce n'est pas un fait qui touche uniquement les musulmans ou des familles défavorisées. Il y a des histoires d'adolescents radicalisés qui n'étaient ni défavorisés, ni musulmans.

On peut donc comprendre que la sensibilité au préjudice de l'idéal blessé n'est pas le propre d'une classe et peut fasciner les non musulmans prêts à arracher leur dignité par la violence.

En Occident et ailleurs, le cynisme du capitalisme sauvage, qui a dégradé les idéaux des Lumières (la raison, critique sociale et politique, critique religieuse, la foi dans le progrès, l'aspiration au bonheur, l'aspiration à la liberté et à la tolérance), favorise ces engagements.

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