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Évasion fiscale et évitement fiscal: du pareil au même?

Tel un chat qui court après sa queue, les gouvernements engageront plus de fonctionnaires pour enrayer l'évasion fiscale et/ou le travail au noir. Ces fonctionnaires seront payés à même les taxes et les impôts de qui croyez-vous?
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Le journal Le Soleil du 9 mars nous apprenait que la firme comptable KPMG a approché le fisc québécois afin d'obtenir une entente pour des clients qui ont placé plus de 130 millions$ à l'île de Man, un paradis fiscal.

Dans une entente confidentielle dont Radio-Canada a dévoilé le contenu, l'Agence du Revenu du Canada (ARC) a obtenu que ces clients paient leur dû en impôts sur leurs investissements extraterritoriaux non déclarés. En échange, aucune pénalité ne leur sera imposée et aucune accusation criminelle ne pèsera contre eux.

Selon les lois canadienne et québécoise, on parle ici d'évasion fiscale, un crime passible d'amende et de peine de prison, pour les fautifs. L'ARC serait au-dessus des lois? On peut au moins se poser la question? La firme comptable qui a élaboré les structures financières frauduleuses sera-t-elle poursuivie? Permettez-moi d'en douter.

Un porte-parole de l'ARC a affirmé à Radio-Canada que l'entente servait l'intérêt public, sous prétexte que ces «longs litiges sont coûteux» et que leur issue est incertaine. De quel intérêt public parle-t-on ici? Cette vingtaine de multimillionnaires sans scrupules se sert de l'argent produit par l'évasion fiscale pour s'engager les services d'avocats et de conseillers financiers grassement payés afin de cacher une partie de leur fortune dans des paradis fiscaux.

Ces avocats et conseillers tordus sont passés maîtres dans l'art de faire traîner ces supposés litiges devant les tribunaux pour exempter leurs clients de payer les impôts dus tout en les soustrayant à des poursuites criminelles et pénales bafouant ainsi les lois canadienne et québécoise. Quels beaux stratagèmes!

Il est vrai que ces poursuites sont coûteuses, mais qui paie en définitive pour les impôts impayés? Ce sont nous les contribuables qui, à chaque paie ou chaque année, en achevant nos rapports d'impôt, constatons la voracité de nos gouvernements à nous soutirer toujours de plus en plus d'argent. Nous n'avons pas le choix, les lois fiscales nous y obligent.

Il y a ici deux poids deux mesures: d'une part, les lois fiscales pour certains riches crapuleux avec ce que cela sous-tend, c'est-à-dire les échappatoires de toutes sortes, et d'autre part les lois fiscales pour le reste des contribuables.

«L'amnistie offerte par l'Agence du revenu du Canada (ARC) à ces multimillionnaires oblige Revenu Québec à faire de même», soutenait le ministre des Finances Carlos Leitao.

Voilà tout a été dit: un aveu d'impuissance, une volonté de ne rien faire et un ministre qui ne semble doté d'aucune colonne vertébrale. Québec cautionne-t-il ainsi la fraude? Il y a de quoi être en colère, me semble-t-il?

Le lac Champlain

Jeudi le 17 mars, l'émission Enquête de Radio-Canada nous apprenait que des gens fortunés naviguent sur le lac Champlain à bord de bateaux luxueux sans jamais payer les taxes de vente et/ou les droits de douane sur leurs bateaux.

Des milliers d'embarcations sont en cause, cela en toute impunité et avec l'accord et la bénédiction d'un sous-ministre responsable de l'Agence des services frontaliers du Canada, cela signifie avec l'accord tacite du gouvernement canadien et par voie de conséquence le gouvernement québécois.

Faut-il le dire, il n'en coûte pas un sou pour enregistrer un bateau de plaisance au Canada et le permis est valide pour dix ans. Ce sont les contribuables qui toutefois paient la note, non seulement pour les taxes et droits de douane impayés, mais aussi pour l'administration reliée à la gestion de ces dossiers.

En consultant le journal Les Affaires du 19 mars 2016, j'apprends qu'une trentaine de PDG ont «épargné» plus de 53 millions de dollars d'impôt. Une moyenne de 1,78 million$/ par individu. Du même souffle cet article nous informe qu'en plus de ces «économies», ces derniers (ces privilégiés) ont payé au fédéral un taux d'imposition marginal de moins de 43 000 dollars.

Est-il normal qu'un dirigeant d'entreprise empoche des gains de 38,4 M$ et «économise» 7,1 M$ en une seule année? C'est pourtant ce qu'a réalisé un de ces 30 PDG en 2015 [1]. C'est peut-être légal, mais pour tout citoyen ordinaire qui paye ses taxes et ses impôts, cela paraît tout à fait immoral.

L'évasion fiscale est un crime alors que l'évitement fiscal est légal nous dit-on. La nuance entre ces deux notions est si mince qu'on y perd son latin. Les définitions qu'en fait l'ARC sont tout à fait sujettes à interprétation, tellement qu'on peut renoncer à comprendre. En définitive l'objectif à atteindre est, dans les deux cas, de payer le moins d'impôts possible.

«Panama Papers»

Ces derniers jours on nous a dévoilé le scandale planétaire des «Panama Papers» où un seul bureau d'avocats du Panama, la firme Mossack Fonseca, d'où sont issus 11,5 millions de documents confidentiels qui détaillent des informations sur un phénomène d'évasion fiscale inédit de plus de 214 000 sociétés «offshore», ce n'est pas rien.

Plus de 12 chefs d'État connus dont plusieurs sont encore en fonction sont impliqués et formellement identifiés. Que dire des dirigeants de ces 214 000 sociétés? Peut-être retrouverons-nous des dirigeants de compagnies canadiennes dans ces documents? Rappelons-nous qu'il y en a plusieurs milliers de cabinets d'avocats qui ont pignon sur rue et qui exercent ce type de pratiques illégales. Parions que nous ne sommes pas à l'abri de telles pratiques douteuses.

La finalité de ces comportements illégaux est assumée par le payeur de taxes, dont je suis. Surtout ne nous surprenons pas que la pratique du travail au noir s'intensifie après de tels comportements douteux et de telles révélations.

Tel un chat qui court après sa queue, les gouvernements engageront plus de fonctionnaires pour enrayer l'évasion fiscale et/ou le travail au noir. Ces fonctionnaires seront payés à même les taxes et les impôts de qui croyez-vous?

Voilà pourquoi je suis en c....

[1] Michael Roadh PDG de CGI

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