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On achève bien les chevaux en «Mort Ici»...

Les rodéos de St-Tite sont aussi merveilleux que le Grand Prix automobile de Trois-Rivières, cette célébration de la pollution tant sonore qu'environnementale qui a lieu tous les étés à proximité d'un quartier résidentiel et du Centre hospitalier régional.
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Un cheval est mort récemment au cours d'un rodéo qui avait lieu à St-Tite. La colonne vertébrale de l'animal s'est brisée alors qu'il éjectait un cavalier qui s'amusait de sa souffrance devant des milliers de spectateurs qui en redemandaient en hurlant de joie.

Il est coutume dans Le Nouvelliste d'être à peu près toujours dithyrambique envers les activités prétendument «sportives» de la région qui amènent leur lot de publicités pour le quotidien régional. Il ne serait plus imprimé s'il ne pouvait compter que sur la rubrique nécrologie qui doit pourtant prendre cinq pages, signe manifeste d'une population vieillissante.

Les rodéos de St-Tite sont aussi merveilleux que le Grand Prix automobile de Trois-Rivières, cette célébration de la pollution tant sonore qu'environnementale qui a lieu tous les étés à proximité d'un quartier résidentiel et du Centre hospitalier régional. Ce sont des sports tellement payants qu'on devrait avoir honte de les remettre en question.

Du coup, un chroniqueur du Nouvelliste et d'autres hommes à tout faire de l'industrie touristique sont montés aux barricades pour défendre le rodéo. Le directeur de Tourisme Mauricie s'en est pris aux «hurluberlus de Montréal» qui se portent à la défense des animaux. Il a annoncé quelques jours plus tard qu'il allait bientôt quitter ses fonctions. Peut-être lui a-t-on fait remarquer que les amants de la nature de Montréal viennent dépenser des sous dans la région pas seulement pour boire de la bière devant des chevaux maltraités.

Jean-Marc Beaudoin, le chroniqueur vedette du Nouvelliste, laisse entendre que les chevaux ne peuvent pas formuler des mots. Par conséquent, on ne saurait dire ce qu'ils ressentent. On ne peut même pas le deviner. Seraient-ils heureux somme toute?

On pourrait dire la même chose des grenouilles. Les ferait-on fumer jusqu'à ce qu'elles explosent qu'elles ne vous diraient pas un mot. Peut-être qu'elles aiment ça, non? Et si un adolescent s'amusait à arracher les ailes des mouches, un passe-temps tout à fait anodin, bien sûr, eh bien parions qu'elles ne diraient rien elles aussi. Il faut être un «hurluberlu de Montréal» pour penser que les animaux et les insectes peuvent parler. Vous pouvez donc les faire souffrir à coeur joie. D'autant plus qu'il n'y a pas que le rodéo de St-Tite ou le Grand Prix de Trois-Rivières pour faire vivre notre industrie touristique. Il y aussi le Festival du cochon de Sainte-Perpétue et sa jolie course au cochon graissé. Si vous pouviez voir le sourire qu'a le petit cochon quand dix brutes humaines lui courent après... Il en couine un coup au grand plaisir des humains. Si ce n'est pas du sport, ça, c'est que vous habitez sur le Plateau Mont-Royal à caresser la tête de vos petits chats comme un poète urbain qui n'a jamais rien vu.

Un certain Bouddha prétendait que faire souffrir les animaux nuisait à notre karma. Il disait n'importe quoi ce gars-là. On n'a jamais vu ça, un karma. La vie spirituelle? C'est du domaine de l'invisible ça aussi. Alors que la bière, les hot-dogs et les sourires des spectateurs c'est du concret. Du monnayable. De quoi faire vivre l'agence de publicité, les restaurants, les hôtels et bien sûr les médias traditionnels.

Les maudits défenseurs des animaux voudraient s'en prendre aux petits plaisirs de la vie. On les a laissés mettre fin aux combats de coqs, puis aux combats de chiens. C'est vrai que ces activités étaient un peu plus sanguinaires qu'un rodéo où l'on ne fait qu'attacher les testicules des animaux avec des sangles en leur donnant des décharges électriques pour les exciter un tout petit peu. C'est un jeu viril auquel nos buveurs de verveine ne comprennent rien. Si nous leur prêtions toujours attention, il n'y aurait bientôt plus aucun stationnement asphalté. Les voitures seraient brisées par des branches. On ramasserait des tonnes de feuilles à l'automne. Ce qui fait plutôt sauvage et malpropre.

Ne revenons surtout pas avec cet argument fallacieux selon lequel les Autochtones se souciaient de respecter le Grand Cercle de la Vie. Ce ne sont pas avec des prières que l'on bâtit des chemins de fer. Les bisons d'Amérique et les Sioux n'avaient qu'à ne pas se trouver là où la civilisation et la chasse sportive venaient s'installer pour le plus grand bien de tous. On ne fait pas des omelettes sans casser des oeufs et ce n'est pas une petite extinction qui viendra faire sourciller l'amateur de tous ces bons plaisirs qui rendent la vie plus supportable et moins ennuyante.

***

En fin de semaine dernière, c'était la Fête de la pêche au Parc Pie-XII de Trois-Rivières. Pour cette grande occasion, on avait ensemencé l'étang dudit parc avec 2000 truites. Elles sont toutes mortes et la Fête de la pêche a été annulée.

Ces truites auraient pu terminer directement dans les assiettes de nos pauvrichons. Cependant, il faut bien apprendre aux gens à «pécher» (sic!) plutôt que de tout leur donner tout cru dans le bec. De plus, les gens ont tendance à demeurer enfermés toute la sainte journée dans la maison. Un peu d'air frais ne pouvait que leur faire du bien.

Se pourrait-il que l'eau de l'étang soit polluée outre mesure? Ou bien que l'air que nous respirions soit de mauvaise qualité? On n'en sait rien. Surtout quand on est un hurluberlu de Montréal ou bien un intellectuel de Trois-Rivières.

Il semble que l'eau de l'étang n'était pas très fraîche puisque les 2000 truites sont mortes d'un coup sec. Des hurluberlus, dont moi, se permettent même d'avancer que la papetière Kruger pourrait être mise en cause. Elle est située à moins de huit cents mètres et éjecte tous les jours cette fumée pestilentielle qui sent le caca bouilli. Se pourrait-il que l'eau de l'étang soit polluée outre mesure? Ou bien que l'air que nous respirions soit de mauvaise qualité? On n'en sait rien. Surtout quand on est un hurluberlu de Montréal ou bien un intellectuel de Trois-Rivières. Bref, un imbécile qui n'a jamais arraché les ailes des mouches.

La culture de la mort fait partie des valeurs de notre civilisation. Il faut bien vivre avec.

Le Grand Cercle de la Vie? Ce sont des sottises. Les Autochtones n'ont jamais bâti un Colisée ou bien un amphithéâtre. On ne fait pas d'omelettes sans crever des yeux.

La Mauricie est parfois surnommée la Mort Ici. On n'aurait jamais dû y bâtir une université. Ça finit par les rendre fous, les ultrasensibles de la région que personne n'écoute fort heureusement. Ils se mettent à renier notre belle culture locale et à importer les idées des hurluberlus de Montréal.

Ça nous prendrait un code de vie, comme celui de Hérouxville, pour nous rappeler que nous taquinons le poulamon, les chevaux et les cochons en Mort Ici. Mourir fait partie de la vie. Souffrir aussi. N'en faisons pas une injonction...

Nous aidons même les moribonds du Centre hospitalier régional à se désennuyer au doux son des bolides du Grand Prix avant leur dernier souffle.

Nous savons vivre en Mort Ici.

Nous ne sommes pas des lopettes.

Nous sommes des hommes qui ne se laissent pas impressionner par des buveurs de tisane...

***

Bon, je cesse d'ironiser.

Vous aurez compris que je m'oppose aux mauvais traitements infligés tant aux animaux qu'aux êtres humains.

Nous ne sommes jamais trop sensibles. Jamais.

Il se peut que nous ne le soyons jamais assez.

Le Grand Prix, le rodéo et la course au cochon graissé sont des activités largement financées par l'argent de nos taxes et de nos impôts.

Les gouvernements et les commanditaires potentiels se doivent de savoir qu'ils contribuent à légitimer la cruauté envers les animaux, voire la pollution.

C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment.

Pardonnez-moi cette longue tirade.

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