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Des filles comme les autres, des filles comme nous

Quand on parle de prostitution juvénile au Québec, c'est toujours en l'analysant par le filtre d'un stéréotype: celle d'une adolescente souffrant de problèmes de santé mentale, provenant d'un milieu pauvre et dysfonctionnel.
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Les réseaux sociaux les ont appâtées. Les mêmes réseaux sociaux les ont sauvées. Ces adolescentes traversaient les rues, emmitouflées, anonymes, invisibles aux yeux de ceux qui n'ont jamais eu le luxe d'avoir ouvert leurs yeux sur le genre de vie qu'elles mènent. Les réseaux sociaux nous ont enfin tous désaveuglés.

Je ne souhaite pas ici vous parler de toutes les hypothèses sur les facteurs poussant des jeunes à se prostituer parce que non seulement plusieurs études ont déjà été faites à ce sujet, mais aussi parce que, justement, ce sont des facteurs et non des liens de cause à effet. Souvent, ces facteurs s'entremêlent jusqu'à créer un tout complexe, difficile à cerner pour monsieur et madame Tout-le-Monde lisant le journal le matin, un café à la main. Ce réseau de facteurs est unique pour chaque jeune dépendamment de son vécu. Carence affective? Goût du risque? Perte de sens? Pression des pairs? Toutes de bonnes réponses, mais là n'est pas la question.

Ce que l'on sait est que la prostitution juvénile est un fléau que notre société occidentale sous-estime cruellement, un jugement s'expliquant en partie par la nature illégale du travail du sexe. D'une part, ce ne sont pas tous les cas qui sont rapportés à la police ou aux centres d'aide. D'autre part, plusieurs jeunes minimisent l'ampleur du phénomène, en mentant sur leur âge véritable ou en prétendant ne pas faire de la prostitution s'ils ne sollicitent pas des clients dans la rue ou s'ils considèrent que leur proxénète les «aime».

Mais le débat sur les chiffres est loin d'être la seule excuse pour notre ignorance du problème. Notre conscience se plaisait à croire que cela n'arrive que dans les reportages que nous transmettent les médias en direct de Bangkok ou de Cancún. Et quand on en parle au Québec, c'est toujours en l'analysant par le filtre d'un stéréotype: celle d'une adolescente souffrant de problèmes de santé mentale, provenant d'un milieu pauvre et dysfonctionnel, séchant fréquemment ses cours pour des fréquentations douteuses, au point où on la condamne hâtivement à un avenir sans succès social ou professionnel.

D'où notre incrédulité de voir des adolescentes sans casier judiciaire, sans trouble psychique apparent et premières de classe fuguer de leur foyer aimant et se prostituer pour de l'argent ou de la drogue. C'est triste qu'il ait fallu le cri du cœur d'un père et près d'une dizaine de noms circulant sur Facebook pour que les Québécois réalisent que la délinquance n'est pas réservée qu'aux cancres.

Donc oui, ces filles peuvent bien être n'importe qui. Une voisine comme une connaissance, un membre de la famille comme une étrangère... Mais il est réducteur de déclarer que ces mêmes filles soient condamnées à un futur médiocre à cause de leur vécu difficile.

La majorité de ces adolescentes, aussi rebelles qu'elles puissent paraître au premier regard, apprennent de leurs erreurs et pourront espérer tourner la page si on leur donne un encadrement solide, mais aussi beaucoup d'encouragement - deux qualités que les récentes coupures ont transformées en fardeaux lourds à porter pour nos intervenants psychosociaux.

À titre d'exemple, je vous invite à lire Girls Like Us de Rachel Lloyd, une ancienne victime de prostitution juvénile aujourd'hui fondatrice du Girls Educational and Mentoring Services (GEMS) à New York, qui a réussi à sortir des centaines de filles de Harlem des griffes de proxénètes sans scrupules.

La série sur la Santé mentale des enfants (Young Minds Matter) est une nouvelle initiative du Huffington Post destinée à ouvrir un débat sur la santé mentale et émotionnelle des enfants, de sorte que les plus jeunes se sentent aimés, appréciés et compris.

À cette occasion, son Altesse Royale la duchesse de Cambridge est rédactrice en chef invitée. Nous allons discuter des problèmes, des causes et surtout des solutions face à la stigmatisation entourant la santé mentale chez les enfants.

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Mai 2017

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