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J'hésite encore à dire ce qui me perturbe le plus entre ses mots ou l'attitude qu'ils cachent. Elle le dit avec une telle franchise et une telle simplicité. Comme si c'était correct d'être à la tête d'un ministère et de ne pas faire ce qu'on est supposé faire parce qu'on n'aime pas ça.
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Tout le monde sait qu'il ne fait pas beau ces temps-ci dans la politique au Québec. On porte nos tuques, on met nos manteaux et on n'est plus surpris par ce qui est annoncé au téléjournal. Et quand on croit avoir tout vu, tout entendu; quand on pense que de toute façon, rien ne va changer; quand le cynisme est une monnaie courante; alors, on se fait surprendre par une tempête comme celle qui a déferlé sur le Québec avec l'enquête sur la Société Immobilière du Québec.

Pour ma part, j'essayais d'être dans l'ambiance morne et dépressive du mois de novembre. Mais malgré ça, on m'a jeté à terre avec l'écoute électronique des journalistes. Puis, alors que j'avais encore du mal à y croire : le reportage sur la SIQ, ses magouilles alléguées presque très probables, ses immeubles vendus pour quoi? Pour qui? Et ces ventes justifiées par une logique déconcertante. Le pire, c'est quand Monique Jérôme-Forget, ancienne ministre responsable du Conseil du Trésor et par conséquent de la SIQ, a lancé dans le reportage que tout ce qui concernait la SIQ ne l'intéressait pas. Incroyable.

À peine quelques minutes plus tôt, elle m'avait bien fait rire avec sa logique expliquant comment vendre un immeuble qui nous appartenait pour ensuite en devenir le locataire était un excellent choix économique.

Si ça n'avait été que ça, je l'aurais pris comme on prend une rafale mordante d'un moins 30 avec le facteur vent: en baissant la tête entre mes épaules et en chignant. Eh non, ce n'était pas tout. Madame Jérôme-Forget, quand elle trônait au ministère, ne s'intéressait pas aux petites affaires de la SIQ. Pourtant, superviser la SIQ était partie intégrante de son mandat. Ce qui me révolte, c'est de l'entendre dire ça comme si de rien n'était. Moi, j'enseigne le français au secondaire. Si je disais que l'enseignement de la lecture, ça ne m'intéresse pas; que la correction, ça ne m'intéresse pas; ou qu'évaluer des apprentissages, ça ne m'intéresse pas. J'ai pas le choix de le faire quand même parce que c'est mon travail. C'est ce pour quoi je suis payé. Ça fait partie de mon mandat. Quelle est la différence avec l'ancienne ministre alors?

Refuser de blâmer ces propos revient à cautionner cette attitude terriblement préoccupante. Il serait donc normal, pour le gouvernement libéral, d'adopter une telle désinvolture face à ses fonctions, aussi importantes soient-elles? C'est tout simplement consternant.

J'hésite encore à dire ce qui me perturbe le plus entre ses mots ou l'attitude qu'ils cachent. Elle le dit avec une telle franchise et une telle simplicité, comme une enfant qui nous informe que son suçon n'est pas bon. Comme si c'était correct d'être à la tête d'un ministère et de ne pas faire ce qu'on est supposé faire parce qu'on n'aime pas ça. Cette attitude est pire que ses mots finalement. C'est l'attitude d'une enfant-roi, l'attitude d'une personne qui a oublié qui l'a placée là, c'est-à-dire ceux qui l'ont élue, ceux qu'elle représente, ceux qui font très souvent des choses qui ne les intéressent pas, par obligation.

Le reportage, plusieurs personnes l'ont vu et nombre d'entre elles ont été indignées tout comme moi. Les journaux en ont parlé et ont déploré, l'opposition a protesté et continue de le faire, malgré tout je n'ai toujours pas entendu de blâmes officiels de la part du gouvernement. Refuser de blâmer ces propos revient à cautionner cette attitude terriblement préoccupante. Il serait donc normal, pour le gouvernement libéral, d'adopter une telle désinvolture face à ses fonctions, aussi importantes soient-elles? C'est tout simplement consternant.

C'est même une insulte pour quiconque se donne à 100%, peu importe son travail. Et c'est encore pire pour ceux qui se donnent plus que ça, à l'intérieur d'un système public qui peine à maintenir le rythme. C'est un immense manque de respect envers les enseignants, les infirmières, les policiers, les pompiers, les éducatrices, envers des milliers d'hommes et de femmes qui, chaque jour, se battent becs et ongles pour le faire fonctionner du mieux qu'ils le peuvent. Qui, chaque jour, font beaucoup plus que ce qu'on leur demande. Qui, chaque jour, s'étendent le soir devant la télé et écoutent les nouvelles avec un cynisme de plus en plus assumé.

Madame Jérôme-Forget, au nom de toutes ces personnes, au nom de toutes celles qui ont été outrées par vos propos dans le reportage d'Enquête, j'exige des excuses. Des excuses publiques, à mon avis, seraient la moindre des choses et permettraient à ce cynisme gangrenant de s'estomper, ne serait-ce que timidement.

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Mai 2017

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