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L'épidémie d'Ebola: un échec de gestion de crise humanitaire

Est-ce que cette crise aurait pu être mieux contrôlée? Si l'émergence de ce genre d'épidémie est difficilement évitable, il aurait été certainement possible d'en réduire l'ampleur. Il est notamment navrant de constater qu'il ait fallu attendre que les pats donateurs se sentent «menacés» avant qu'une réaction significative ne se fasse sentir.
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L'épidémie qui frappe l'Afrique de l'Ouest est sans précédent. Alors que le nombre de décès atteindra sous peu les 4000, le Centers for Disease Controle and Prevention des États-Unis qui n'est pas reconnu pour être inutilement alarmiste, avance le million de personnes infectées dans les prochains mois. Avec des taux de mortalité de 50%, il s'agirait de la crise humanitaire la plus meurtrière depuis des décennies. En effet, ces estimations font craindre les pires scénarios pour une région du monde qui se relève à peine de conflits sanglants.

Il faut se rappeler que les principaux pays touchés par l'épidémie partent de loin. Le Libéria, mais également la Sierra Leone et la Guinée ont tous souffert des conséquences d'un conflit qui s'est terminé il y a un peu plus de 10 ans. Ce conflit aura laissé la région traumatisée par des violences atroces, des infrastructures en décrépitude et des gouvernances fragiles et en reconstruction.

L'Afrique de l'Ouest n'est donc pas au bout de ses peines. Comme le président Obama le mentionnait lors de son discours aux Nations Unies en septembre dernier, la situation s'altèrera drastiquement avant qu'elle ne s'améliore. Ainsi, la courbe du nombre de cas de personnes ayant contracté le virus continuera de croitre, mais la tangente variera selon l'aide effectivement investie, la vitesse avec laquelle cette aide sera acheminée, mais surtout, l'efficacité de la coordination qui reste encore un point de friction pour toutes réponses humanitaires.

Est-ce que cette crise aurait pu être mieux contrôlée ? Si l'émergence de ce genre d'épidémie est difficilement évitable, il aurait été certainement possible d'en réduire l'ampleur. Premièrement, la réaction tardive des pays donateurs comme le Canada est déplorable. Il est effectivement navrant de constater qu'il faut que les pays donateurs se sentent « menacés » avant qu'une réaction significative se fasse sentir. En effet, c'est en raison de la crainte populaire que l'épidémie s'étende au-delà des frontières de l'Afrique que les décisions de soutenir la région touchée se sont concrétisées. L'arrivée du premier cas en Amérique du Nord envoie d'ailleurs un nouveau souffle sur la braise de la crainte d'une contagion.

Ainsi, malgré les alarmes répétées de certaines organisations humanitaires et en premier lieu de Médecins sans Frontière et de sa présidente Johanne Liu, les États donateurs et les Nations Unies ont été particulièrement lents à réagir. Alors qu'en avril dernier on avait déjà pris connaissance des risques, ce n'est que cinq mois plus tard, avec les conséquences que l'on connaît et alors que l'épidémie a pris des proportions démesurées, que les États-Unis ont pris des moyens plus considérables pour tenter de contrôler le virus. Le Canada s'étant contenté de suivre une parade qui avait déjà pris trop de retard pour des milliers de personnes.

Deuxièmement, l'indifférence explique qu'aucun vaccin ne soit sur le marché à ce jour. Étant donné la clientèle potentielle, l'Occident et ses compagnies pharmaceutiques ne se sont pas intéressés à investir dans la recherche d'un médicament contre le virus Ebola et cela, même si cette maladie est connue depuis plus de 40 ans. Dans ce contexte, cette déresponsabilisation de la part des pays donateurs équivaut à prendre cette population touchée en otage. En effet, l'expertise nécessaire pour la production d'un vaccin, et pour gérer ce genre d'épidémie est étrangère. La gestion de clinique de mise en quarantaine et la prise en charge médicale sont d'autant de techniques qui devraient faire en sorte que des pays qui disposent de ces capacités, comme le Canada, s'impliquent activement et promptement.

Deux questions se posent dans la situation actuelle : est-ce que l'aide actuelle est suffisante ? À ce jour, seulement le tiers du milliard de dollars estimé par l'ONU a été amassé. La mise sur pieds de nouveaux centres d'accueil, les traitements pour les patients, la gestion adéquate des corps, mais également le personnel qualifié coûtent de l'argent. La gestion clinique de l'Ébola nécessite jusqu'à 4 aides-soignants par patient. Aujourd'hui, l'aide internationale n'est simplement pas suffisante. Non seulement les ressources manquent, mais les messages des experts du terrain concordent pour dire que nous n'avons pas de plan coordonné. Cette absence de plan est un autre indicateur de l'échec de la gestion de cette crise.

La seconde question que l'on doit se poser vient du fait que c'est une organisation non gouvernementale, à savoir Médecins sans Frontière, qui a le leadership de la gestion de cette épidémie. Où sont les Nations Unies, mais surtout les États membres, qui ont la responsabilité d'investir dans le développement de projets de santé globale ?

Certes l'agenda humanitaire international est bien rempli cette année : de Gaza à la Syrie, du Sud-Soudain à l'Ukraine et de l'Irak en passant par la République centrafricaine sans compter l'impact humanitaire lié à l'émergence de l'État islamique, autant de crises qui affectent des millions de personnes et garnissent l'agenda de demande d'aide internationale. Ce contexte ne justifie pas pour autant cette indifférence et les pays donateurs ont la responsabilité de considérer cette crise avec le sérieux qu'elle mérite afin de réduire le risque qu'elle se propage au reste de l'Afrique.

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