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À l'ère où partager sur Facebook ou Twitter une photo de miséreux avec quelques écriteaux semble être un geste suffisant d'information, s'informer sur les enjeux qui maintiennent ces contradictions devient crucial. Prendre le temps de savoir, être au courant, oui. Mais aussi comprendre. Comprendre pourquoi une armée étrangère contrôle des mines de coltan en RDC, que 75% de sa population est sous-alimentée ou que le diamant et l'or qui se trouvent là-bas font partie des raisons menant au viol des femmes comme tactique de guerre, c'est déjà, en mon sens, un bon point de départ.
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Je veux juste ouvrir une petite parenthèse. Rien de trop long. Après on pourra continuer à spéculer sur les prochaines élections provinciales et à partager des photos sur Facebook en espérant changer le monde. Vraiment, c'est une petite parenthèse.

La République Démocratique du Congo. Vous voyez là, le pays d'Afrique Centrale? Eddy King a fait un sketch qui parlait de ça.Tsé, Tintin au Congo. Ça vous dit de quoi? Ok, ben c'est de ce pays là que je parle. La République Démocratique du Congo (RDC).

Comme je disais à mon équipe de basket, là-bas sévit une grave crise humanitaire; c'est le conflit le plus meurtrier depuis la fin de la seconde guerre mondiale (plus de 5,4 millions de morts en lien à cette crise depuis 1998 et 45 000 morts par mois depuis). Je ne suis pas là pour étaler des statistiques ou miser sur le sensationnalisme des chiffres et de la misère d'autrui pour faire réagir et secouer l'indifférence. Ce serait un manque de respect envers les victimes. Non. Je veux juste situer l'ampleur de la situation et l'urgence qui vient avec.

« Ok mais si c'est aussi grave que ça, pourquoi ce n'est pas médiatisé? On a parlé du printemps arabe, on parle de la Syrie, on continue jusqu'à ce jour de commémorer les victimes de l'Holocauste. Si c'est si grave au Congo, pourquoi on n'en parle pratiquement pas!? »

Bah, peut-être parce que les exploitants canadiens en RDC (les entreprises minières principalement; les Banro, Kinross-Forrest, Barrick Gold, Emaxon, Lundin (Tenke Fungurume Mining), Mindev, Anvil Mining de ce monde) s'y partagent ressources et infrastructures d'une valeur approximative de 300 milliards de dollars ? Ou parce que le Canada appuie ces entreprises avec une législation favorable, en plus de leur donner un appui diplomatique à l'étranger? Ce serait aussi peut-être parce certaines de ces compagnies ont assisté des groupes armés dans les régions conflictuelles et qu'il ne vaudrait mieux pas trop élaborer sur le sujet (on a une réputation internationale à garder quand même!)?

Peut-être que le conflit en RDC reste sous silence parce que notre État et sa feuille d'érable, avec ses copains de la communauté internationale et leurs bouche-trous et mercenaires africains, les Kagamé, Kabila et Museveni (celui que voulait armer Jason Russell pour capturer Kony... ouais, c'était son plan #fail) s'y partagent des intérêts économiques et géostratégiques afin de se garantir un accès privilégié aux ressources abondantes?

« Ok, mais ça sonne théorie du complot ton truc »

Bah, j'dirais plutôt que c'est le Monde dans lequel on vit...

Ce Monde où il se passe plusieurs choses cools et d'autres moins cools. C'est cool de prendre des photos de ses enfants avec son téléphone cellulaire, mais c'est moins cool de forcer des enfants à aller chercher le coltan qui s'y retrouve dans une mine contrôlée par l'armée rwandaise. C'est cool d'avoir le choix entre 75 restaurants dans les centres commerciaux, mais c'est moins cool quand 75% de la population souffre de sous-alimentation. C'est cool d'offrir des bagues de diamant et d'or aux femmes qu'on aime, mais c'est moins cool quand le diamant et l'or sont une des causes du viol systématique et massif des femmes qu'on aime.

Devant ces contradictions, on se trouve facilement impuissant ou perplexe, le fameux « mais qu'est-ce que je peux faire? ». Nous sommes au courant, nous savons, mais par la suite quoi, qu'est-ce qui se passe?

Je ne sais pas si on peut y trouver une réponse exacte, mais Bertolt Brecht nous dit :

« J'ai appris une chose et je sais en mourant

Qu'elle vaut pour chacun :

Vos bons sentiments, que signifient-ils

Si rien n'en paraît en dehors?

Et votre savoir, qu'en est-il

S'il reste sans conséquence?

[...]

Je vous le dit:

Souciez-vous, en quittant ce monde,

Non d'avoir été bon, cela ne suffit pas,

Mais de quitter un monde bon »

À l'ère où partager sur Facebook ou Twitter une photo de miséreux avec quelques écriteaux semble être un geste suffisant d'information, s'informer sur les enjeux qui maintiennent ces contradictions devient crucial. Prendre le temps de savoir, être au courant, oui. Mais aussi comprendre. Comprendre pourquoi une armée étrangère contrôle des mines de coltan en RDC, que 75% de sa population est sous-alimentée ou que le diamant et l'or qui se trouvent là-bas font partie des raisons menant au viol des femmes comme tactique de guerre, c'est déjà, en mon sens, un bon point de départ.

Pis tsé, Bercht parlait qu'avoir été bon ne suffit pas, mais qu'il faut quitter un monde bon. Ben ça implique, m'semble, qu'une fois qu'on sait, il faut agir en conséquence. Parce que nos « bons sentiments, que signifient-ils si rien n'en paraît en dehors? Et [notre] savoir, qu'en est-il s'il reste sans conséquence? ».

Je ferme la parenthèse (en espérant que d'autres la rouvriront jusqu'à ce que ce ne soit plus nécessaire).

#camconcerne

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