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Trois priorités du pape François

Trois grands sujets importants me semblent avoir été soulevés lors du voyage du pape François aux États-Unis et à Cuba: les migrants, le respect de la création et la liberté religieuse.
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Pour ceux qui ont suivi de près ou de loin le voyage du pape François aux États-Unis et à Cuba, une chose vous a certainement sauté aux yeux. Ce pape maintenant passé maître dans les gestes éloquents et qui réussit à toucher les cœurs les plus endurcis a laissé dernière lui l'image d'un homme donnant tout pour sa cause. En effet, l'énergie avec laquelle il prononçait ses discours et paradait dans les centres-villes des plus grandes villes américaines, et l'évidente faiblesse corporelle qui se manifestait parfois me permettent de deviner l'effort physique extrême dont le pape Bergoglio a dû faire preuve. Cette cause pour laquelle il donne tout, c'est celle de l'Église catholique, qui a pour fin première le «Salut des âmes».

Cependant, trois grands sujets importants et plus «terre à terre» me semblent avoir été soulevés: les migrants, le respect de la création et la liberté religieuse.

Un pape immigrant

La présente crise des migrants n'épargne personne. Que ce soit les migrants eux-mêmes, qui vivent tous une épreuve qui marquera à jamais leur vie, ou ceux qui, de force ou de bon gré, devront vivre avec les nouveaux arrivants, tous auront à sortir de la logique du confort pour se mettre à la suite d'idéaux beaucoup plus nobles. Cette transition n'est facile pour personne et c'est dans ce contexte que les discours du pape argentin aux États-Unis doivent être compris.

S'adressant au Congrès américain, le pape François a clairement demandé aux Américains de privilégier l'accueil à la fermeture: «Nous, le peuple de ce continent, nous n'avons pas peur des étrangers, parce que la plupart d'entre nous était autrefois des étrangers. Je vous le dis en tant que fils d'immigrés» .

À l'âge où l'idée de construire des murs semble de plus en plus populaire, l'évêque de Rome insiste sur le souci que tous doivent avoir de ne pas laisser la peur prendre le dessus. Ce message, il ne le réservait pas uniquement à la classe politique et à la société civile. Il allait également faire cette même demande aux évêques réunis à la cathédrale de Washington. En effet, «Je sais [...] que les tentations sont nombreuses de s'enfermer dans les murs de la peur, à se "lécher les blessures", se rappelant une époque qui ne reviendra pas et planifiant des réponses dures aux résistances qui sont d'ores et déjà âpres».

Ainsi, pour le pape François, la transformation de ce monde avec la libre circulation des idées, des biens et des cultures, semble irréversible. Il serait donc inutile de vouloir combattre une tendance qui pourrait être, au contraire, salutaire pour l'Église catholique. C'est pourquoi ses discours ont porté davantage sur la bonne façon de vivre cette nouvelle ère qui s'annonce.

Un respect intégral de la création

Rien ne manifeste davantage la porosité actuelle des frontières géographiques que les diverses crises climatiques auxquelles nous faisons face. Pour le pape, auteur de la première encyclique sur l'écologie, il est absolument fondamental que les leaders politiques et économiques comprennent que l'avenir de la planète dépend de l'avenir de l'homme et du respect de sa dignité. Pour le pape, il est essentiel de saisir que le «La Règle d'Or nous rappelle aussi notre responsabilité de protéger et de défendre la vie humaine à chaque étape de son développement». Défendre la vie et l'environnement est donc une seule et même chose. Que ce soit:

«la victime innocente de l'avortement, les enfants qui meurent de faim ou sous les bombes, les immigrés qui se noient à la recherche d'un lendemain, les personnes âgées ou les malades dont on voudrait se débarrasser, les victimes du terrorisme, des guerres, de la violence et du narcotrafic, l'environnement dévasté par une relation prédatrice de l'homme avec la nature, en tout cela, est toujours en jeu le don de Dieu dont nous sommes les nobles administrateurs, mais non les maîtres».

Apprendre à devenir de bons administrateurs de la création (ce qui comprend l'être humain), telle est la mission que le pape a voulu confier aux Américains lors de ce voyage historique. Mais pour cela, le pape a voulu offrir une piste de solution.

Plaidoyer pour la liberté

Fidèle aux grandes intuitions du Concile Vatican II sur l'inculturation, papa Francesco a invité le peuple américain à redécouvrir les grands idéaux de la constitution américaine. Ce pays d'hommes libres devra donc retrouver l'évidence «que tous les hommes sont créés égaux, qu'ils sont dotés par leur Créateur de droits inaliénables, que parmi ceux-ci, figurent la vie, la liberté et la recherche du bonheur» (Déclaration de l'Indépendance, 4 juillet 1776) .

Se rendant au Liberty Hall de Philadelphie et s'assurant par le fait même que son message serait bien compris, le pape a voulu rappeler que la liberté fondamentale qui les suppose toutes est la liberté religieuse. Celle-ci signifie «certainement le droit d'adorer Dieu, individuellement et en communauté, comme notre conscience le dicte. Mais la liberté religieuse, par sa nature, transcende les lieux de culte ainsi que la sphère des individus et des familles».

Message simple mais combien nécessaire à l'époque où les relations entre le gouvernement et les évêques des États-Unis sont tendues sur des questions de liberté de conscience. En effet, certaines lois enfreindraient la liberté de conscience d'institutions comme les hôpitaux et les écoles catholiques. Le battage médiatique entourant la rencontre du Pape avec Kim Davis montre bien que les divers acteurs de ce débat semblent s'éloigner de plus en plus les uns des autres.

La liberté religieuse n'est pas uniquement une affaire qui ne regarde que les catholiques. Et le pape François n'a pas manqué de le rappeler lors d'une rencontre avec les leaders de plusieurs dénominations religieuses au mémorial de Ground Zero. Dans son discours, le pape a réaffirmé que ce droit à la liberté religieuse impliquait par le fait même de grandes responsabilités, spécialement dans la construction de la paix et l'acceptation des différences. Pour François, toutes les religions se doivent «de partager et de réaffirmer le désir d'être des forces de réconciliation, des forces de paix et de justice dans cette communauté [de New York] et partout dans notre monde». En ce sens, la liberté de culte et d'expression raisonnable dans l'espace public semble être une condition sine qua non à la construction d'un monde plus pacifique, plus respectueux des différences et, donc, plus humain.

Le voyage du pape François aux États-Unis prendra forcément plusieurs mois d'analyse et ses effets réels sur la société prendront peut-être des années à se faire sentir. Cependant, nous pouvons dès aujourd'hui affirmer que le pape François a été fidèle à lui-même et à son message d'écologie intégrale. Que ce soit dans ses prises de position sur les migrants, le respect de la vie et de la liberté, le Pape voit que le souci actuel pour les bouleversements climatiques ne pourront porter des fruits que si ces mêmes principes sont respectés par tous.

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