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Le pape François ou l'évangélisation à double sens

Nous le savons, l'évangélisation est au cœur du pontificat de François. L'exhortation apostolique Evangelii Gaudium est un bon exemple de la conversion missionnaire souhaitée par le Pape pour l'Église catholique.
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Image: Courtoisie de CNS

Nous le savons, l'évangélisation est au cœur du pontificat de François. L'exhortation apostolique Evangelii Gaudium est un bon exemple de la conversion missionnaire souhaitée par le Pape pour l'Église. En effet, selon ce dernier, « la Corée est devenue désormais une terre de missionnaires »[2].

Sa posture était donc celle d'un missionnaire rencontrant d'autres missionnaires, manifestant ainsi l'attitude qu'il désire que les chrétiens adoptent entre eux. Son voyage peut donc être, en partie, compris comme un enseignement gestis verbisque[3] -par les paroles et les gestes- sur la façon d'être un authentique évangélisateur puisque « évangéliser est, en effet, la grâce et la vocation propres de l'Église, son identité la plus profonde »[4]. Pour ce faire, l'Église doit être «constamment en sortie vers le monde et, spécialement, vers les périphéries de la société contemporaine»[5]. Comment donc être disponible à la sollicitude de tous sans se laisser emporter dans la logique du monde parfois visiblement en contradiction avec l'Évangile ?

Pour François, et il est en cela en totale continuité avec Paul VI, «un sens clair de l'identité propre de chacun et une capacité d'empathie constituent le point de départ pour tout dialogue» [6]. En effet, si les chrétiens ne savent pas ou très peu ce qu'ils sont, leur capacité d'annoncer et de convaincre sera bien pauvre. Il est donc urgent de continuer le travail de formation à la foi et de formation humaine et «de prendre soin de façon spéciale de l'éducation des jeunes, en soutenant dans leur mission indispensable non seulement les universités, mais aussi les écoles catholiques de tout niveau».

Pour le Pape, la société contemporaine et la Corée ne font pas exception, le relativisme, la superficialité et le formalisme/légalisme y sont des obstacles majeurs puisqu'ils «affaiblissent toute identité» et donc l'«engagement à adorer Dieu seul et à nous aimer les uns les autres»[7].

Dialogue avec les cultures

Un autre thème majeur abordé par le pape François tout au long de sa visite apostolique en Corée fut de manifester comment le tournant missionnaire de l'Église demande un dialogue constant avec les différentes cultures. Ce message étant d'intérêt pour l'Église universelle, il est important de savoir que la Corée n'a pas été évangélisée « de l'extérieur » comme nous sommes habitués de le voir, à l'exemple des martyrs canadiens venus porter la bonne nouvelle en Amérique. L'évangélisation de la Corée est venue de la quête de vérité des Coréens eux-mêmes. Cette évangélisation a, comme l'affirme le pape François, « commencé par une rencontre directe avec la Parole de Dieu. Ce furent la beauté intrinsèque et l'intégrité du message chrétien [...] qui ont impressionné Yi Byeok et les nobles anciens de la première génération » [8]. Les théologiens appellent cela les « semences du verbe » c'est-à-dire une certaine préparation exercée mystérieusement par l'Esprit Saint dans le cœur des hommes pour les préparer à entendre et à accepter la Parole de Dieu. Le dialogue comme élément fondamental de l'évangélisation concerne aussi les méthodes qui doivent « être adaptées à l'âge, à la culture, à la capacité des personnes, en cherchant toujours à fixer dans la mémoire, l'intelligence et le cœur, les vérités essentielles qui devront imprégner la vie tout entière »[9]. En effet, selon le pape, l'évangélisation demande des chrétiens une certaine adaptation afin que l'interlocuteur puisse découvrir et reconnaître le Christ eux. Il y a donc tout un travail de discernement à effectuer pour voir ce qui dans une culture représente une préparation à l'Évangile et, donc qui peut être assumé, et ce qui représente un obstacle à la vie chrétienne et qui doit donc être purifié. En ce sens, les différents messages du pape François au peuple coréen sont une merveille d'évangélisation puisqu'il a réussi, à manifester aux Coréens les éléments compatibles et incompatibles entre la foi chrétienne et la culture coréenne « originaire » en donnant en exemple un élément faisant désormais partie de cette même culture : les martyrs coréens.

De fait, les martyrs coréens ont eux-mêmes assumé tout ce qu'il y avait de beau et de grand dans leur culture. Que ce soit leur désir de connaître la vérité, l'importance de la charité, la connaissance sublime de la liberté et de la dignité des laïcs[10], tous ces éléments de la culture coréenne ont trouvé une maison stable dans l'Église.

D'un autre côté, le processus de purification culturelle reste toujours à refaire. Aujourd'hui, les martyrs coréens sont un exemple de purification pour les Coréens eux-mêmes et pour l'ensemble des chrétiens puisqu'ils nous aident à contrer : par leur espérance, «la pauvreté spirituelle» causée par «les germes d'égoïsmes d'hostilité et d'injustice [trop souvent liés] à la grande prospérité matérielle»[11] ; par leur fidélité, la tendance « de faire des compromis sur la foi, de diluer les exigences radicales de l'Évangile »[12] ; par leur liberté et leur charité « les structures sociales rigides de leur temps »[13].

Le voyage du Pape fut donc une authentique rencontre. Non seulement le souverain pontife avait-il quelque chose à apprendre aux catholiques coréens et aux Coréens dans l'ensemble, mais ceux-ci, indépendamment de leur attachement à l'Église, ont pu enrichir l'ensemble de l'Église des dons propres que le Seigneur leur avait donnés. Le grand défi des catholiques de notre temps est de comprendre le mystère d'unité de l'Église qui « ne détruit pas la diversité, mais qui la reconnaît, la réconcilie et l'enrichit ». Et bien que « l'esprit du monde semble loin de cette magnifique vision et de ce projet »[14], selon le Pape, ils ne doivent pas cesser d'espérer en cette capacité de Dieu de transformer les cœurs les plus endurcis . Ainsi, ils pourront dire avec le pape François que « le visage de l'Église est en premier lieu le visage de l'amour»[15].

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