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Santé mentale: l'inclusion des familles se fait toujours attendre

Combien y a-t-il de ces histoires de parents qui amènent leur enfant à l'hôpital dans une incompréhension totale de ce qui se passe?
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Dans le cadre de la Semaine nationale de la santé mentale, prenons le temps de souligner l'apport des membres de l'entourage d'une personne vivant avec une problématique de santé mentale. Trop souvent, on néglige leur contribution inestimable dans le rétablissement de ces personnes, de même qu'en regard du tissu social de la société.

Rendons hommage à ces mères, à ces pères, aux sœurs et aux frères, aux conjointes et conjoints, à ces filles et fils, de même qu'aux collègues de travail, aux voisins et aux amis, à tous ceux qui accompagnent un proche qui traverse des difficultés. Toutes ces personnes peuvent être amenées à vivre une pléiade d'émotions et de sentiments, parfois contradictoires : colère, tristesse, culpabilité, amour. Puis il y a tous les besoins de ces individus, à travers les questionnements, les dilemmes, les remises en question, les incertitudes. Comment aider sans m'épuiser ? Vers quelles ressources m'orienter, pour mon proche et pour moi ? Comment faire au quotidien pour que l'autre aille mieux ? Jusqu'où doit aller mon rôle d'aidant ? Le défi est de taille pour les familles, qui plus est quand la Santé mentale se maintient comme un parent pauvre du système de santé et des services sociaux.

Être membre de l'entourage, c'est dans certains cas, pour des parents, d'envoyer de force – et à contrecœur - leur fils à l'hôpital alors qu'ils ne le reconnaissent plus, que ce dernier est devenu méfiant voire imprévisible et peut-être même menaçant. Combien y a-t-il de ces histoires de parents qui amènent leur enfant à l'hôpital dans une incompréhension totale de ce qui se passe? Alors qu'ils souhaiteraient comprendre, connaître de quoi souffre leur enfant, certains membres de l'entourage se heurtent au manque de considération de la part du personnel soignant. Sous le couvert de la confidentialité, ils n'ont pas toujours accès à l'information et au support auxquels ils auraient droit.

Le vécu et les inquiétudes ne sont pas toujours pris en compte, pire certains intervenants refusent même de leur parler.

Le vécu et les inquiétudes ne sont pas toujours pris en compte, pire certains intervenants refusent même de leur parler. Toutefois, au moment de libérer le patient, souvent précocement, le centre hospitalier mise sur le fait que les parents pourront reprendre leur enfant à la maison. De retour à la maison, sans savoir s'il y a un diagnostic, s'il y a un traitement offert, si leur enfant a un suivi et s'il va mieux, on ne peut s'étonner que ces mêmes parents, d'inquiétude et de peur, en viennent à mettre une chaise en dessous de leur poignée de chambre, marqués par les derniers événements.

Malheureusement, ce type de situation est tangible et s'inscrit dans une variété de situations ayant réellement cours. Et c'est ainsi que le droit d'être informé, de transmettre des observations à l'équipe traitante, la question de la confidentialité, le droit d'être accompagné, la nature confidentielle de l'avis de tiers, demeurent des enjeux d'importances. Lors de la Journée des proches aidants organisée par le Comité régional des organismes d'aide aux proches (CROP) en 2017, les participants ont fait état d'éléments facilitateurs dans la relation entre les membres de l'entourage et les employés du réseau, parmi ceux-ci : un dialogue ouvert avec les intervenants ; agir avec bienveillance ; marier humanisme et confidentialité ; impliquer les familles dans les démarches ; aller au-delà des symptômes ; une référence systématique aux organismes d'aides aux membres de l'entourage ; aider à définir les rôles et poser les limites.

Il est essentiel que les membres de l'entourage continuent de prendre leur place dans le réseau et qu'on leur reconnaisse un rôle de premier plan (tables décisionnelles, participation à l'élaboration des politiques) : «Les familles doivent être identifiées comme des interlocuteurs valables et des agents de première ligne dans le traitement de leurs proches [...] un écart existe toujours entre le discours politique et ce qui se fait concrètement sur le terrain», de soutenir Marie-Hélène Morin, professeure en travail social à l'UQAR.

Parlons-en du « discours politique ». Dans le Plan d'action en santé mentale 2015-2020, il est mentionné l'importance du rôle des membres de l'entourage, de même qu'il est reconnu que dans l'exercice de leur rôle d'accompagnateur, ils sont parfois maintenus à distance de l'équipe traitante, rendant ardue la transmission d'observations pouvant être utile au niveau clinique. On affirme que « L'implication de membres de l'entourage contribue à une diminution de la détresse psychologique de ceux-ci tout en réduisant le nombre de rechutes chez la personne atteinte de maladie mentale. » S'en suivent des mesures envisagées par le gouvernement, dont celle d'inclure des actions et modalités de suivi concernant leur implication dans le processus clinique, de même que la mise en place d'«un mécanisme d'orientation systématique» vers les associations de familles.

Si les normes d'agrément en vigueur prévoient plusieurs recommandations pour faciliter, impliquer et reconnaitre la participation et le rôle des membres de l'entourage, il demeure que l'application pratique fait défaut, l'organisation ne sachant pas toujours comment transformer leurs pratiques dans le concret. La volonté semble là, mais encore faut-il savoir comment s'y prendre et encadrer les gestes à poser. D'où les démarches entreprises par le Réseau avant de craquer et ses membres pour créer un Guide de bonnes pratiques - tout est prêt pour élaborer ce Guide, manque plus que le financement.

Finalement, il est à espérer que le gouvernement du Québec mettra tout en œuvre pour que les dispositions du Plan en santé mentale touchant les membres de l'entourage se réalisent pour de bon, et ainsi amener davantage de sens et cohérence dans les interventions auprès des familles.

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