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Inciter ses concitoyens à voter pour une option pour en bloquer une autre, c'est une manière peu efficace de convaincre et une façon terriblement cynique de faire de la politique.
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Non seulement ce n'est pas une manière convaincante de faire, mais un vote dit «stratégique» est infiniment moins fiable qu'un vote par conviction.
THE CANADIAN PRESS/Paul Chiasson
Non seulement ce n'est pas une manière convaincante de faire, mais un vote dit «stratégique» est infiniment moins fiable qu'un vote par conviction.

La semaine dernière, voyant son étoile pâlir de sondage en sondage, François Legault a imploré ses «amis péquistes» de l'appuyer pour renverser le gouvernement libéral, plaidant que le PLQ gagnerait à nouveau s'ils en faisaient autrement. À peine cinq jours plus tard, c'était au tour de Jean-François Lisée, en débat local dans sa circonscription de Rosemont, d'inciter les gauchistes à faire front commun derrière le Parti québécois au détriment de Québec solidaire pour bloquer les partis de droite le premier octobre.

Visiblement, c'est à la mode d'appeler au «vote stratégique» ces temps-ci pour les chefs de parti, tantôt pour bloquer le Parti libéral, tantôt le centre droit tout entier. Pourtant, est-ce un argument politique efficace que de demander l'appui de quelqu'un en se présentant comme un moindre mal, plutôt que comme le meilleur parti?

Plutôt que de dépenser toute cette énergie et cette salive à se dépeindre comme un deuxième choix vivable, les chefs auraient tout avantage à vanter leur programme pour tenter de susciter une adhésion sincère, l'argument du «vote stratégique» étant des plus éphémères. Venant de la bouche d'un chef de parti, cette incitation est dangereuse...

Un argument à double tranchant

Le soir de son élection à la chefferie du Parti québécois, Jean-François Lisée s'est adressé, dans un discours-fleuve qui est resté dans les mémoires, aux sympathisants de tous les autres partis dans le but de les rallier par opposition au Parti libéral.

Citant son fameux «chemin des victoires», le nouveau chef péquiste déclarait solennellement: «Malgré nos divergences, travaillons pour le bien commun afin que les libéraux ne gouvernent plus le Québec.» S'il y en a bien un qui doit rire jaune aujourd'hui, c'est Jean-François Lisée: son appel à l'unité contre le PLQ a résonné dans la population, qui s'est tournée... vers la CAQ pour le concrétiser, plutôt que vers lui. En effet, la défaite des libéraux ne passait par le PQ que si celui-ci était le mieux placé dans les sondages pour devancer le parti au pouvoir, ce qui ne s'est plus reproduit depuis la mi-2017.

Il en va de même pour François Legault, qui a commencé à monter en flèche dans les sondages lorsqu'est apparue la possibilité que son parti triomphe de Philippe Couillard le jour du scrutin, et c'est ce qui le maintient en vie depuis.

Plus que sur son propre programme, la CAQ compte sur le ras-le-bol justifié des Québécois envers le PLQ pour gagner, ce n'en est même pas subtil. Dans le cahier «20 idées pour le Québec» lancé par le Journal de Montréal en début de campagne, l'idée avancée par le spin doctor de la CAQ, Benjamin Bélair, était de... battre les libéraux, tout simplement.

Dans un texte à l'argumentation pauvre comme la gale intitulé «Legault pour battre les libéraux», Bélair incite le lecteur à appuyer son parti parce qu'il est premier dans les sondages, tout simplement. Et si Legault était troisième, que le Parti québécois était le plus même de remporter le pouvoir, serait-il pertinent d'appuyer la CAQ? Selon cette logique, pas du tout.

Convaincre pour vrai

Inciter ses concitoyens à voter pour une option simplement pour en bloquer une autre, c'est non seulement une manière peu efficace de convaincre, mais aussi une façon terriblement cynique de faire de la politique.

Après tout, céder à l'argument du «vote stratégique» correspond à avouer, en quelque sorte, que son propre programme n'est pas à même de convaincre les électeurs, qu'un autre pourrait s'avérer plus intéressant, mais qu'il faudrait se marcher sur le cœur et appuyer un programme moins séduisant par «nécessité».

Non seulement ce n'est pas une manière convaincante de faire, mais un vote dit «stratégique» est infiniment moins fiable qu'un vote par conviction. Surtout, on peut vraiment se questionner sur l'état de notre démocratie si, pour obtenir la faveur populaire, on doit démoniser ses adversaires plutôt que de mettre en valeur ses propres idées.

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