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Vivre avec le plus mortel des cancers féminins

Nous devons parler haut et fort de l'importance des tests génétiques, afin qu'ils soient offerts à l'ensemble des femmes qui présentent des antécédents familiaux de cancer de l'ovaire ou du sein.
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Mon histoire débute par ce qui est sans doute votre pire cauchemar. Après une fantastique carrière en travail social, me voilà prête à passer à la prochaine étape de ma vie, qui s'annonce pour le moins excitante: la retraite, des voyages à travers le monde avec mon mari, une foule de nouvelles expériences, du bon temps passé avec mes enfants et mes petits-enfants... Malheureusement, la vie se moque bien de nos plans.

En 2011, je suis passée presque immédiatement des célébrations de mon départ à la retraite à la table d'opération, pour combattre le cancer de l'ovaire qu'on venait de me diagnostiquer. Par la même occasion, on m'a aussi découvert une tumeur au sein qui, bien que petite, a conduit les médecins à soupçonner la présence d'une mutation génétique. Les tests ont effectivement révélé que je suis porteuse d'une mutation du gène BRCA1. La tumorectomie et la radiothérapie ont donc été ajoutées à mon cocktail de traitements.

Bien entendu, le voyage de retraite soigneusement planifié en Europe et en Asie a dû être annulé.

Cette année, 2 800 Canadiennes recevront un diagnostic de cancer de l'ovaire, et plus de 1 700 femmes perdront leur combat contre cette maladie au pays. Il n'existe aucun examen de routine ou test de dépistage permettant de détecter efficacement le cancer de l'ovaire. Ainsi, la majorité des patientes reçoivent leur diagnostic lorsque la maladie se trouve à un stade avancé et qu'elle est plus difficile à traiter. Le taux de survie au-delà de cinq ans est donc très faible, faisant du cancer de l'ovaire le plus mortel des cancers féminins.

Quelques mois avant que ne tombe le diagnostic, j'avais commencé à ressentir des douleurs anormales au bas du ventre, de même que certains des symptômes courants du cancer de l'ovaire, notamment un besoin fréquent d'uriner qui me forçait à me lever plusieurs fois pendant la nuit et des nausées. Mais la femme ménopausée que j'étais a eu vite fait de balayer ces symptômes du revers de la main - jusqu'à ce que les douleurs abdominales se fassent persistantes.

Mon gynécologue étant en vacances, je me suis dirigée vers mon médecin de famille, qui m'a immédiatement prescrit une batterie de tests: échographie abdominale, échographie transvaginale, colonoscopie... Tous se sont avérés négatifs, mais un important marqueur sanguin, appelé CA 125, s'est révélé particulièrement élevé. Quelque chose ne tournait pas rond.

Un mois plus tard, un deuxième dosage sanguin a indiqué une hausse marquée du taux de CA 125. Mon médecin m'a immédiatement demandé si j'avais des contacts dans un quelconque service oncologique; l'heure était grave et j'allais devoir jouer le tout pour le tout. Heureusement, j'avais effectivement un excellent contact dans le milieu, qui m'a permis de consulter un chirurgien oncologue trois jours plus tard. J'ai rapidement subi une importante réduction tumorale; le chirurgien s'est montré consterné que j'aie dû attendre si longtemps avant de recevoir un diagnostic.

À la lumière de mes connaissances actuelles et de mon expérience, je réalise que j'aurais dû être plus consciente de ma prédisposition au cancer et mieux préparée à un diagnostic éventuel. Ma mère est décédée des suites du cancer du sein à 49 ans; cet important facteur de risque aurait dû être un signal d'alerte. Même si je connaissais l'existence de tests génétiques, je faisais partie de cette cohorte de femmes qui prétendent qu'elles «ne veulent pas savoir».

Les tests génétiques n'ont jamais fait l'objet de discussions, et mon gynécologue ne m'a jamais sérieusement exposé leur importance, malgré mes antécédents familiaux. Et parce que je n'étais pas sensibilisée aux facteurs de risque du cancer de l'ovaire, j'ai ignoré plusieurs de mes symptômes initiaux, pensant qu'ils étaient courants chez la femme ménopausée.

Depuis l'apparition de mon cancer, j'ai vécu quelques périodes de stabilité; malheureusement, j'ai connu trois récidives depuis 2011. J'ai subi deux rondes de chimiothérapie, qui ont rapidement entraîné des résultats encourageants. J'ai également eu la chance d'avoir accès à un programme de soins de compassion aux États-Unis, où j'ai pu faire l'essai d'un médicament expérimental qui n'est pas encore approuvé au Canada. Avec l'appui de mes médecins à Montréal et à Boston, j'évalue actuellement de nouvelles options de traitements à associer à la chimiothérapie traditionnelle pour vaincre ma plus récente récidive.

Bien entendu, mon parcours n'a pas été de tout repos. Je suis toujours suivie au Centre de cancer Segal de Montréal, par l'une des meilleures équipes soignantes en oncologie. Et grâce à la combativité et à la grande débrouillardise de mon fils, j'ai obtenu des consultations auprès de certains des plus éminents spécialistes en Amérique du Nord. Mon expérience démontre que «l'équipe soignante» s'étend bien au-delà des murs de l'établissement médical: elle comprend aussi la patiente et son réseau de soutien, composé de sa famille et de ses amis.

Les patientes doivent adopter une approche proactive face à la maladie: demeurer informées, aller chercher de l'information sur les traitements existants et en développement, poser des questions, et insister pour obtenir des réponses claires et rapides. Les groupes de soutien, comme Cancer de l'ovaire Canada, sont des ressources inestimables vers laquelle les patientes devraient se tourner.

J'ai maintenant accepté le fait que mon cancer est une maladie chronique. Pas moyen de venir à bout de ces satanées cellules résistantes aux traitements! Je dois conserver une attitude positive devant la maladie, compléter mes traitements médicaux par un programme composé d'exercices physiques, de détente et d'activités de réduction du stress, et continuer d'interagir aussi activement que possible avec ma famille, mes amis et ma communauté. Mon objectif est de réagir de façon éclairée à chaque nouvelle récidive dans l'espoir de profiter des percées scientifiques dans les domaines du profilage génétique, de l'immunothérapie et d'autres secteurs de recherche émergents.

Je crois fermement qu'une meilleure information sur les signes et les symptômes du cancer de l'ovaire, de même qu'un accès accru aux services de dépistage, sont des stratégies fondamentales de lutte contre la maladie. Nous devons parler haut et fort de l'importance des tests génétiques, afin qu'ils soient offerts à l'ensemble des femmes - et des hommes - qui présentent des antécédents familiaux de cancer de l'ovaire ou du sein, ou qui sont préoccupés par leur niveau de risque. Les hommes comme les femmes peuvent être porteurs de mutations génétiques, qui sont ensuite transmises à leurs enfants, garçons ou filles, dans 50 pour cent des cas.

Je crois que les médecins généralistes et, bien entendu, les spécialistes en gynécologie, devraient être les premiers à engager ces discussions, et qu'elles devraient faire partie intégrante de leurs interventions de routine auprès des patientes. Ces professionnels de la santé doivent être conscients de leur rôle clé dans le dépistage précoce et la prévention de la maladie.

Je profite de tous les beaux moments que m'offre la vie; plus que jamais, je suis consciente de leur fugacité. Comme je l'ai fait lors de mes deux récidives précédentes, je m'attaque à cette rechute avec toute la sagesse dont je dispose. J'ai bon espoir d'avoir devant moi encore bien des années productives et gratifiantes.

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Mai 2017

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