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11 astuces pour détecter les mensonges comme les pros

Soyez prudent et ne jouez pas les apprentis sorciers, vous pourriez accuser quelqu'un de mentir alors qu'il est parfaitement honnête...
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En regardant District 31, sur IciTouTV, j'ai été interpellé par le nombre de fois où les services de police utilisent le polygraphe, aussi appelé injustement «détecteur de mensonges». Cet appareil, tout droit sorti de la guerre froide, sert à repérer l'apparition de variations émotionnelles. En mesurant le rythme cardiaque, la respiration et la sudation, les enquêteurs peuvent déterminer si la personne interrogée ressent un changement émotionnel.

La technique repose sur l'observation des trois courbes, en relation avec une série de questions. Lorsqu'une variation apparaît au moment où une question est posée, il peut être tentant de penser qu'il s'agit d'un mensonge. "La personne ne dit pas tout", "elle cache quelque chose", "elle veut protéger quelqu'un", "elle ment!", etc.

Les choses ne sont pas si simples

Un détecteur de mensonges relève les variations émotionnelles, et non l'apparition de mensonges. Un individu peut être mort de peur, il générera les émotions négatives par série. Cela n'en fait pas un coupable! Il y a donc toujours un risque de se tromper.

Attention aux jugements hâtifs et dangereux.

Le psychologue Paul Ekman indique que le détecteur de mensonges aurait un taux de réussite de 54% s'il est utilisé par une personne non formée aux techniques de détection. Une fois formée, le taux de réussite monte à plus de 83 %. Cela fait tout de même 17% d'incertitude... presque 1 chance sur 5 de se tromper!

Dans son livre "Telling Lies" ("Je sais que vous mentez"), à l'origine de la série Lie To Me, et sur son site "Truth about Lie To Me", il insiste fortement sur le fait qu'il n'existe aucune méthode infaillible. Il met aussi largement en avant que la série est aussi, et avant tout, une fiction. C'est du cinéma!

Il n'existe aucun signe exact et précis de tromperie.

Il y a seulement des indices signalant que les émotions exprimées par la personne ne sont pas en accord avec ce qu'elle dit verbalement. Le nez de Pinocchio n'existe pas!

L'individu est peut-être mal préparé, tendu, stressé. Dans ce cas, il est intéressant de savoir quelles en sont les raisons.

11 impératifs à respecter pour détecter les mensonges

1. Établir un comportement de référence avant l'analyse.

L'observateur doit toujours établir le comportement de référence (aussi appelé ligne de référence ou baseline) de la personne, avant de procéder à une analyse comportementale. On ne peut détecter un mensonge qu'à partir du moment où l'on sait comment se comporte l'individu en situation normale. L'observation des gestes et l'écoute de la voix et des mots nous renseigneront sur le style de cette personne. Certains s'expriment rapidement, d'autres lentement. D'autres encore ont besoin d'un temps de réflexion avant de parler, marquent des pauses ou parlent par saccades.

2. Le principe de normalité: quelles attitudes sont normales dans cette situation?

Demandez-vous comment vous seriez dans la situation que vit cette personne. Si vous ressentez aussi un stress, dites-vous que c'est normal, pour vous, comme pour celui que vous observez. Ne déduisez pas trop vite que la personne ment. Elle est peut-être simplement stressée, car elle n'a pas l'habitude de cette situation.

Posez-vous ces deux questions:

  1. Quelles sont les attitudes normales dans ce type de situation?
  2. Quelles sont les réactions normales dans cette situation?

Vous avez un doute? Et vous, quelle aurait été votre attitude? Comment auriez-vous réagi?

3. Prenez en compte le ressenti de la personne

N'oubliez pas de prendre en considération que votre interlocuteur pourrait avoir peur d'être vu comme un menteur alors qu'il a peut-être seulement peur de ne pas être cru. Pas de déduction trop hâtive!

4. Observation

L'observation consiste à relever des indices comportementaux en relation avec la situation en cours. S'il s'agit d'une conversation, vous mettrez donc l'observation des gestes en relation avec le verbal et le vocal. Il vous faudra analyser la cohérence avec les mots.

Idéalement, l'observateur est accompagné d'une personne qui se chargera de poser les questions. Un binôme observateur-interviewer est efficace, surtout si les deux personnes sont capables d'analyser les comportements et les émotions. Elles peuvent prendre la parole tour à tour, en fonction des sujets abordés et de la pression à mettre à la personne interrogée.

Interrogatoire de police, entretien de recrutement, négociation ou autres réunions professionnelles, un binôme obtiendra toujours de meilleurs résultats

5. Pas de préjugés!

C'est une règle: jamais de préjugés! Ne faites pas confiance en votre première impression, et méfiez-vous de tous vos préjugés. Ils pourraient vous pousser à commettre des erreurs d'analyse plus souvent que vous ne le pensez. Personne n'est infaillible.

6. Pourquoi mentirait-il?

La personne est peut-être en train de mentir. Se demander pourquoi il ment et quels intérêts il aurait à mentir est aussi intéressant.

7. Toujours rester objectif

Plus facile à dire qu'à faire... et pourtant c'est la base de toute analyse sérieuse.

8. Ne restez pas sur vos impressions

Votre perception d'une personne ou d'une situation peut biaiser complètement votre analyse. En reposant la question d'une autre manière, vous permettrez à l'interlocuteur de réagir de nouveau à ce que vous lui demandez. Si vous avez la possibilité d'enregistrer l'entretien en vidéo, vous pourrez faire des arrêts sur image et lire certains passages au ralenti. C'est ainsi que l'on perçoit le mieux les micro-expressions.

9. Une analyse complète

L'observation d'indicateurs comportementaux ne signifie pas qu'il y a une preuve de mensonge, mais bien qu'un inconfort est ressenti. Cet inconfort peut être en relation avec une tentative de mensonge, mais aussi relié à d'autres facteurs. Certaines personnes peuvent présenter des signes d'inconfort dès qu'elles s'expriment ou sont dans une situation nouvelle. Une situation non maîtrisée, ou une explication chaotique, n'est pas une preuve de mensonge en soit. Il faut toujours relier les signes.

C'est très important de procéder à une analyse globale sur une durée suffisante. Si la personne prend la parole et donne une explication confuse, elle est peut-être simplement perturbée durant les premières secondes ou les premières minutes à cause de la situation. En revanche, si un individu semble à l'aise et qu'au bout de 20 minutes il s'enlise dans ses explications, il y a peut-être une tentative de tromperie en cours. L'apparition de gestes de réconfort et de micro-expressions est un indice que quelque chose est en train de se produire. Cela ne signifie pas que la personne ment. Elle est simplement stressée.

10. Absence d'émotions ou de signes de mensonges.

Une personne qui ne montre pas de variations émotionnelles n'est pas forcément honnête. Ce n'est pas une preuve de vérité! Avec un peu d'entraînement, une bonne préparation au mensonge ou une réussite antérieure du mensonge dans une situation similaire, il est possible que le menteur n'exprime aucune émotion détectable, même par un œil expérimenté. Certaines personnes sont totalement inexpressives.

11. Pas d'analyses trop précises.

Enfin, n'essayez pas de faire des analyses trop précises. Éviter les experts qui vous proposent des décryptages du moindre geste ou de la moindre variation comportementale. Celui qui a une démangeaison aura envie de se gratter. Celui qui a mal au dos aura envie de changer de position sur sa chaise. Celui qui a mal aux jambes aura envie de les croiser. Ce n'est pas parce que votre interlocuteur change de position qu'il est mal à l'aise et vous ment ; ou qu'il se met en retrait de la conversation, ou autre chose. Il a peut-être une douleur physique ou simple ment une envie de changer de position.

En conclusion

Soyez prudent et ne jouez pas les apprentis sorciers, vous pourriez accuser quelqu'un de mentir alors qu'il est parfaitement honnête...

Percevoir un indicateur comportemental en lien avec une variation émotionnelle n'est pas une preuve de mensonge. Lorsqu'un tel signal apparaît, il s'agit de repérer le moment de son apparition.

  • Quelle question a été posée?
  • Quel sujet a été évoqué?
  • Y a-t-il un point sensible qui a généré son apparition?

La personne peut commettre une erreur: les fuites apparaissent, la personne ne les maîtrise pas.

Il y a aussi les indices de tromperies. Ils révèlent que les propos de l'interlocuteur sont faux. L'analyse du verbal en relation avec le non verbal vous mettrons sur la piste.

Vous entendrez peut-être des contradictions: la personne apporte une information dans un premier temps, et dit le contraire plus tard. Cette forme d'erreur a une intensité variable en fonction de l'importance de la situation ou de la contradiction. La personne qui a mal préparé son mensonge risque de devoir faire fréquemment appel à sa créativité pour être parfaitement cohérente. Or, nous savons que cela est compliqué quand il faut en plus gérer le regard de l'autre.

La cohérence existe sur le plan verbal ou non verbal. Au niveau verbal, l'interlocuteur peut inclure des pauses dans son discours, peut-être des ruptures dans le langage. Ses phrases sont ponctuées de mots parasites tels que: "euh", "ben", "pfft", etc.), alors que l'individu est censé savoir ce qu'il doit dire ou ce qu'il va exprimer.

Attention cependant au style habituel de la personne. Si l'analyste a correctement établi le comportement de référence avant d'approfondir ses investigations, il doit être capable d'identifier ces ruptures. Il est aussi tout à fait possible que cette personne s'exprime d'ordinaire de cette manière: ses phrases peuvent être habituellement coupées par des mots parasites. D'où l'importance d'établir le comportement de référence. Côté non verbal, les incohérences se présentent souvent dans les situations où il y a une probabilité de mensonge. La personne peut paraître effrayée, coupable ou agitée. Ses expressions ne sont pas cohérentes avec ce qu'elle dit verbalement.

Eric Goulard
Eric Goulard
Eric Goulard

Eric Goulard est l'auteur de plusieurs livres en communication non verbale et crédibilité.

Vous pouvez le contacter via www.ericgoulard.com ou Twitter.

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