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Disséquer une grenouille

Au Québec, bien que la situation du français soit en meilleure posture qu'il y a 50 ans, notre situation géographique et « mondialisante » nous rappelle toujours qu'il nous faut rester vigilant.
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Lors de son passage à l'émission de Christiane Charrette - 125, Marie-Anne - dimanche dernier, Christian Rioux a fait, à mon avis, l'éloge de la langue française, l'éloge de notre spécificité culturelle, l'éloge de notre peuple.

Fait étrange, personne ne l'a applaudi dans la salle.

On applaudissait plutôt Jimmy Hunt qui proclamait haut et fort que le français dit normatif/international n'est pas une langue et que, même si elle en était une, nous ne la parlions pas au Québec.

Il y faisait référence comme la langue de « jamais » en opposition à la langue de « demain » que défend le groupe rap Dead Obies. Cette langue dite de « demain » est un mélange de français et d'anglais. Un terrain d'entente, un espace commun. Un langage que seuls les initiés peuvent comprendre. M. Rioux la dénonce parce que, bien sur, il ne comprend rien. Comme nous tous d'ailleurs.

Le commentaire de M. Hunt est vrai. Au Québec, nous parlons le québécois. Il affirmait lui aussi, dans un sens, notre spécificité langagière, notre spécificité culturelle.

Certes, notre langue québécoise tient son essence du métissage historique qui nous caractérise et de notre interculturalité actuelle, mais de là à valoriser le fait que notre langue québécoise parlée et chantée se « franglicise » de plus en plus - surtout à Montréal - et que ce soit, par-dessus le marché, la langue de « demain », ça c'est une autre histoire.

Nous ne voulons pas parler deux langues secondes!

Toutes les langues empruntent des mots à d'autres langues. En anglais nous disons : ménage à trois, faux pas, rendez-vous, pour ne nommez que ces exemples. Les Français font du shopping avec leur voiture qu'ils ont laissée dans le parking. Les Québécois chill sur leur balcon avec leurs chums. Il n'y a pas de mal à ça.

Là où il y a un danger - ou peut-être un malaise, c'est selon - c'est lorsque l'on sent qu'une langue est en train d'en manger une autre. Au Québec, bien que la situation du français soit en meilleure posture qu'il y a 50 ans, notre situation géographique et « mondialisante » nous rappelle toujours qu'il nous faut rester vigilant. Qu'on le veuille ou non, notre langue commune est le français. Notre langue, c'est nous. En la valorisant, c'est nous que nous valorisons. Colorons-la comme nous le voulons, mais ne la négligeons pas, ne l'oublions pas, ne la regardons pas se faire dévorer et digérer. Elle est le centre de notre identité.

Là était, pour moi, le sens des propos de Christian Rioux. Il analysait et il dressait l'état des lieux d'une nation qui ne cesse de vouloir se redéfinir au lieu de s'assumer.

Il disséquait une grenouille.

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