MUSIQUE - Non, YouTube n’interdira pas cette musique et ses clips non plus. Le “drill”, un courant du hip-hop, est régulièrement accusé d’incitation à la violence mais pour la plateforme vidéo, la liberté d’expression passe avant tout.
“Bien que certains aient soutenu que la musique drill n’avait pas sa place sur YouTube, nous croyons que nous pouvons aider à offrir une place à ceux qui sont trop souvent sans voix”, écrit Ben McOwen Wilson, le patron de YouTube au Royaume-Uni dans une tribune publiée dans le quotidien The Telegraph ce vendredi 12 juillet.
Chez nos voisins britanniques, les détracteurs de cette musique sont nombreux. Début mai, une vingtaine de femmes, couvertes de faux sang, avaient manifesté devant les locaux de la filiale de Google à Londres, accusant YouTube de contribuer à l’essor des attaques à l’arme blanche en hébergeant des vidéos violentes réalisées sur du drill, une musique extrêmement populaire auprès des jeunes Londoniens.
Avec ces vidéos, “YouTube favorise la promotion et la glorification d’armes illégales comme les pistolets, les couteaux, les machettes” et permet la diffusion de “menaces de les utiliser pour mutiler, torturer ou tuer”, avait dénoncé ces militantes du mouvement Operation Shutdown, rassemblant des femmes et hommes endeuillés par la multiplication des attaques au couteau au Royaume-Uni.
À de multiples reprises, la police anglaise a aussi tenu la drill responsable de la recrudescence de violence dans les quartiers populaires. Scotland Yard a même demandé à YouTube de supprimer certaines vidéos du genre de la plateforme, précise la radio Nova.
Le drill UK particulièrement agressive
Le drill, une des scènes les plus populaires du rap contemporain, est caractérisé par un lyrisme sombre, violent et morbide. Originaire de Chicago aux États-Unis, elle est montée en puissance depuis 2012 et l’explosion de rappeurs comme Chief Keef, connu pour sa carrière précoce et fulgurante, la violence de ses textes et ses démêlés judiciaires.
Ses fans défendent un “reality rap”, une musique contestataire “hardcore” incomprise ou encore une échappatoire face à des situations socio-économiques difficiles.
Exportée au Royaume-Uni et façonnée à l’anglaise, elle a donné naissance à une “drill UK”, encore plus noire et agressive que son pendant américain. Sur les plateformes musicales, certaines compositions accumulent des millions d’écoutes, comme celles du groupe anglais Moscow17, dont deux des membres ont été tués en 2018. Moscow17 avait échangé insultes et menaces avec des bandes rivales, avec des vidéos postées sur internet, explique le site Francetvinfo.
Dans sa tribune, Ben McOwen Wilson reconnaît la nécessité de lutter contre “la violence des gangs”, et assure travailler avec la police, les communautés locales et des experts “pour comprendre le contexte local et prendre des mesures le cas échéant”.
À l’instar de Facebook ou de Twitter, YouTube se voit régulièrement reprocher de ne pas faire assez pour supprimer rapidement des contenus prônant la haine, la violence ou colportant des théories du complot, dont l’audience a explosé avec l’avènement des réseaux sociaux.
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