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À Wuhan, la ruée vers les urnes funéraires y reflète-t-elle le nombre réel de morts du coronavirus?

Des photos, censurées par Pékin, laissent planer le doute sur le nombre réel de morts de la COVID-19 en Chine.

Depuis le début de la pandémie de coronavirus dans le monde, la Chine a enregistré, au lundi 30 mars, 81 470 cas, dont 3304 morts et 75 448 guérisons.

À Wuhan, épicentre de la pandémie, 50 000 personnes ont été contaminées pour 2538 décès, selon les chiffres officiels délivrés par les autorités chinoises.

Mais ces chiffres sont-ils les bons? Alors que les habitants de Wuhan recommencent à sortir dans les rues, avec la levée progressive du confinement, de nombreux habitants ont été photographiés dans d’interminables files d’attente pour récupérer les cendres de leurs proches décédés, notamment dans un reportage du média d’investigation chinois Caixin. Des clichés qui ont été censurés par Pékin et qui interrogent dans le monde sur la véracité des bilans chiffrés chinois.

Certains témoignages font état de six heures d’attente, par manque de personnel pour faire face à cet afflux soudain. Sur la photo ci-dessous à droite, ce sont 3500 urnes qui sont réunies dans la même pièce, selon Caixin.

«Certains crématoriums à Wuhan ont commencé à permettre aux gens de récupérer les cendres des membres de leur famille décédés après le confinement.»

«À Wuhan, des queues interminables pour récupérer les cendres des morts du coronavirus jettent des doutes sur les chiffres.»

Entre 40 000 et 60 000 décès à Wuhan?

Cette ruée vers les crématoriums entretient les doutes sur la sincérité du bilan officiel de la COVID-19 dans la ville de 11 millions d’habitants, et plus généralement dans toute la Chine.

«Dans la population, quasiment personne ne croit ces chiffres (les chiffres officiels, NDLR)», écrit ainsi le site américain Radio Free Asia, ajoutant que des riverains ont constaté que les crématoriums ont fonctionné 24 heures sur 24 pendant des jours.

De nombreux habitants de Wuhan seraient convaincus que plus de 40 000 personnes seraient mortes dans la ville depuis le début de la quarantaine le 23 janvier, selon Radio Free Asia.

Un journaliste lanceur d’alerte, sous le pseudonyme de «Regard froid sur la finance», a calculé, en se positionnant devant l’un d’entre eux, que 500 urnes sont rendues chaque jour par les huit crématoriums de la région, rapporte France Inter. Ce journaliste estime, lui, à 59 000 le nombre de décès pour la seule ville de Wuhan.

Alors que la Fête des morts est célébrée en Chine le 5 avril, les proches de défunts se pressent pour récupérer leurs cendres avant cette date, alors qu’ils n’ont pas été autorisés à se rendre aux crématoriums durant la quarantaine. «Il n’est (donc) pas forcément anormal qu’il y ait des milliers d’urnes à récupérer. Mais pas des dizaines de milliers», écrit Le Monde.

Sur BFMTV, ce mardi 31 mars, Lu Shaye, l’ambassadeur de Chine en France, a tenté d’expliquer. «D’après les statistiques de la municipalité de Wuhan, en 2019, on y a compté 51 200 décès pendant toute l’année, donc à peu près 4000 par mois en moyenne. Et comme en hiver il fait plus froid, il y a plus de décès que les autres mois. En janvier et février, peut-être 5000 décès par mois. Ce sont des décès normaux, en dehors de l’épidémie», commente-t-il.

«Il faut rester circonspect»

Il précise aussi que «du 23 janvier au 23 mars, on cesse de livrer les urnes funéraires». «Pendant cette période, mis à part les décès causés par l’épidémie, il y aurait à peu près 10 000 décès causés par d’autres raisons», indique encore Lu Shaye.

Au fil des semaines, des médecins, ONG et institutions internationales ont accusé la Chine de mentir sur ses données transmises sur la COVID-19 et de censurer ou retenir certaines informations; ce qui a pu avoir comme conséquence d’aggraver la crise sanitaire mondiale actuelle.

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) est aussi aujourd’hui accusée par certaines voix d’être trop complaisante avec Pékin, s’appuyant sans sourciller sur les chiffres délivrés par le régime depuis le début de la pandémie.

«La Chine a certainement déployé l’effort d’endiguement d’une maladie le plus ambitieux, agile et offensif de l’histoire», écrivait même dans un rapport publié le 28 février l’OMS, après qu’une équipe d’une dizaine de scientifiques s’était déplacée sur site pour vérifier que l’épidémie avait bien été contenue dans le pays.

Selon Citizen Lab, un institut canadien spécialisé dans le contrôle de l’information, la Chine avait aussi commencé à censurer en ligne toute référence au nouveau coronavirus des semaines avant de reconnaître officiellement l’étendue de la pandémie.

Au nom de la stabilité, il est courant en Chine pour les géants de l’internet d’épurer les contenus considérés comme politiquement sensibles ou indésirables, souvent qualifiés de «rumeurs».

Plusieurs médecins de Wuhan, qui avaient donné l’alerte après l’apparition du virus, ont ainsi été accusés par la police de propager des rumeurs, à l’image du docteur Li Wenliang, mort du virus début février et qui fait désormais figure de héros national.

Ce texte a été publié originalement dans le HuffPost France.

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