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La courte victoire d'hier (moins de 1% de différence avec le PLQ, quatre sièges d'écart) a un goût doux amer ce matin, d'autant plus avec les événements tristes et déplorables du Métropolis. Cette victoire n'offre pas au PQ les marges de manœuvre nécessaires à la réalisation de son programme. Surtout, les résultats décevants d'hier traduisent bien l'état d'esprit d'une population et d'un électorat souverainiste peu enthousiasteset qui peinent encore à se reconnaître dans le parti qui formera le prochain gouvernement et ce, malgré neuf années de règne libéral. Aujourd'hui, alors qu'il est appelé aux commandes, le PQ se doit de faire un premier bilan politique.
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CP

Ça y est. Les élections générales sont désormais choses du passé et Pauline Marois deviendra dans quelques jours la première femme à occuper le poste de premier ministre du Québec.Près de dix ans après la défaite électorale de 2003, il s'agit donc d'un retour au pouvoir pour un parti qui peine, depuis de nombreuses années, à reconquérir le cœur des Québécois et clairement redéfinir ses orientations politiques. La courte victoire d'hier (moins de 1% de différence avec le PLQ, quatre sièges d'écart) a un goût doux amer ce matin, d'autant plus avec les événements tristes et déplorables du Métropolis. Cette victoire n'offre pas au PQ les marges de manœuvre nécessaires à la réalisation de son programme. Surtout, les résultats décevants d'hier traduisent bien l'état d'esprit d'une population et d'un électorat souverainiste peu enthousiastes et qui peinent encore à se reconnaître dans le parti qui formera le prochain gouvernement et ce, malgré neuf années de règne libéral. Aujourd'hui, alors qu'il est appelé aux commandes, le PQ se doit de faire un premier bilan politique.

Une démocratie usée

Rarement l'état de décrépitude de notre édifice démocratique ne nous aura apparu plus flagrant que durant cette élection. Des partis qui en appellent au « vote stratégique », à « bloquer » un parti plutôt que d'en élire un autre et qui procèdent à des campagnes de peur, plutôt que d'en appeler à notre raison ou de nous convaincre par les valeurs de leur programme. Une campagne où l'on aura fait de la culpabilisation des petits partis un argument de vente, plutôt que de tenter de comprendre les raisons qui ont poussé des milliers de Québécois à regarder ailleurs et à chercher de nouveaux porteurs de projets. Des élections où les grands médias auront étouffé la voix des formations politiques non-institutionnalisées, alors que certains de leurs représentants brillaient par leur absence aux débats organisés par les grands réseaux, malgré le fait qu'elles soient représentées au sein même de notre Assemblée nationale. Et surtout, une élection qui couronnera un parti qui, malgré le fait qu'il soit rejeté par près de 70% de la population, pourra exercer, dans sa totalité ou non, la réalité du pouvoir dans les prochains mois...

En 1970, le Parti Québécois s'engageait formellement, dans son programme électoral, à réformer le mode de scrutin et nos institutions en faisant explicitement une place plus grande à la proportionnalité. L'on s'y engageait à réformer ce système que René Lévesque lui-même jugeait infect afin qu'il soit plus représentatif de la volonté populaire, exprimée par les suffrages. Quarante-deux années plus tard, et malgré dix-huit années passées au pouvoir, non seulement le PQ n'a jamais réformé ce mode de scrutin désuet, mais il a même évacué formellement sa réforme de son programme électoral, s'en remettant plutôt à une commission qui serait chargée de reprendre encore une fois les travaux déjà effectués par la Commission jadis dirigée par Jean-Pierre Charbonneau. Il suffirait pourtant, afin de trancher la question, d'avoir le courage politique d'en appliquer les conclusions...

Il y avait quelque chose de pathétique à voir le PQ culpabiliser les électeurs ayant choisi de donner leur appui à Québec solidaire ou Option nationale. On leur reprochait de favoriser l'élection de Jean Charest ou de François Legault, ou même de nuire à la réalisation de l'indépendance du Québec, plutôt que de tenter de comprendre les raisons profondes de leurs choix politiques. L'on ne quitte jamais un parti de gaité de cœur, encore moins lorsque l'on s'aventure sur ce long chemin de Damas qu'est la formation d'un « tiers parti » dans notre système britannique bipartisan.

Le PQ devrait comprendre qu'au moment où l'opinion publique n'est plus campée entre deux options, mais bien partagée dans un spectre politique qui balaie de nombreux enjeux ou préoccupations (le résultat d'hier en est une illustration brillante), il aurait eu avantage à favoriser une réforme du mode de scrutin qui aurait donné une représentation aux autres formations politiques souverainistes et progressistes. Cela aurait été, à mon sens, un signe de maturité évident et un message fort envoyé aux citoyens du Québec : votre vote compte! Un message fort envoyé aux Québécois pour leur dire que notre Assemblée nationale ne sera plus le théâtre de ces joutes partisanes pitoyables, mais sera bien dirigée par une coalition gouvernementale regroupant tant les péquistes que les solidaires ou les optionistes.

Au moment où nous devons procéder à de profonds changements sociaux et politiques, comment imposer une quelconque vision et s'appuyer virtuellement sur une courte « légitimité populaire » alors que 68% des Québécois ont, dans les faits, tourné le dos au nouveau gouvernement? La réforme du mode de scrutin apparaît aujourd'hui, encore plus qu'hier, nécessaire. Notre démocratie et l'évolution normale de nos institutions y sont préparées depuis longtemps.

L'obligation de ne pas décevoir

Après un mois d'une campagne convenue aux messages parfois contradictoires (était-ce une élection contre Charest, une élection entre progressistes et conservateurs ou un scrutin en vue de réaliser l'indépendance?) et aux engagements parfois inversés (amiante, référendums d'initiative populaire, etc.), le PQ devra faire preuve d'un réel aplomb s'il espère survivre dans une situation minoritaire. La dernière expérience fédérale nous aura révélé que l'aplomb et la détermination, bien plus que la modération et la concertation, sont souvent les meilleures armes face à une opposition certes majoritaire, mais souvent frileuse à renverser un gouvernement et replonger la population en élections. Si tous sont prompts à parader et montrer leurs muscles, personne ne veut porter l'odieux de devoir expliquer aux électeurs les raisons du disfonctionnement du parlement... Comme disait Danton, il faudra au PQ de l'audace, de l'audace, encore de l'audace!

Depuis le gouvernement de Lucien Bouchard, les appuis du PQ se sont lentement étiolés, d'élection en élection, d'année en année. De près de 43% en 1998, ils étaient à 35% en 2008, après un creux de 28% en 2007.Hier, le parti de Pauline Marois recueillait 31,94% des suffrages. L'application du déficit 0 par Lucien Bouchard a fait migrer, petit à petit, nombre d'électeurs de gauche vers l'UFP et Option citoyenne qui allaient donner naissance, en se fusionnant, à Québec solidaire qui a réussit a défaire Nicolas Girard dans Gouin. L'ambigüité du PQ à propos de la question nationale (« conditions gagnantes », « assurance morale de gagner », « gouvernance souverainiste ») a provoqué le départ de nombreux militants, ces « caribous » dont parlait François Legault, qui se sont dotés d'un nouveau véhicule avec Option nationale. Tous ces gens ne sont pas revenus au bercail le 4 septembre et le PQ n'a pu compter que sur la division du vote fédéraliste et la lassitude de la population afin d'arracher un gouvernement. Il faudra plus que des formules incantatoires pour que le PQ puisse rebâtir, petit à petit, une base électorale plus large; à défaut de changer et de comprendre les motivations des souverainistes en rupture de banc, le PQ est condamné à voir QS et ON lui faire compétition dans les mois et années à venir. Il lui reste, cependant, une dernière carte. Si Pauline Marois devait renouer clairement dans les prochains mois avec les racines social-démocrates de sont parti, plutôt que de s'enferrer dans le discours rigoriste du centre bien pensant ; si le PQ devait malgré tout reprendre la pédagogie de l'indépendance, à défaut de pouvoir enclencher un processus référendaire; si le PQ devait ignorer les considérations égoïstes de sa députation pour enfin aller au-delà des mesures cosmétiques (élections à date fixe, abaissement des contributions) et proposer une refondation de notre système démocratique ; oui, si le PQ devait faire tout cela, il pourrait connaître une seconde vie. Surtout, la détermination et l'engagement de la nouvelle première ministre sur de nombreux dossiers pourraient rapidement lui permettre de jeter les bases politiques sur lesquelles mener campagne afin de décrocher la majorité parlementaire qui lui fait aujourd'hui défaut.

Trop de fois le PQ a déçu la population et ceux qui avaient mis leurs espoirs en son action. Trop de fois, la partisannerie et l'excès de prudence sont venus affaiblir son élan politique. Le PQ a le devoir de ne pas décevoir et cette tâche sera d'autant plus difficile en situation minoritaire. S'il devait encore manquer à ses engagements ou renier ses principes fondamentaux, il connaîtra le sort de ces formations qui, comme l'Union nationale de Daniel Johnson, sont lentement disparues de notre paysage politique après un bref et fugace regain d'énergie. Le PQ est aujourd'hui seul, face à lui-même.

Jean Charest prononce un discours après sa défaite dans Sherbrooke

Soirée électorale du 4 septembre 2012

Jean Charest

Les chefs votent!

Jean Charest - Parti libéral du Québec

Portraits des chefs

Pauline Marois et sa candidate Djemila Benhabib, victime de racisme de la part du maire de Saguenay Jean Tremblay

Les chefs en campagne

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