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Face à Donald Trump, Joe Biden devra éviter ces erreurs de Clinton

Quatre ans après Hillary Clinton, c'est au tour de Joe Biden d'affronter Donald Trump en débat.
Donald Trump et Joe Biden s'affronteront lors d'un premier débat ce mardi 29 septembre.
AFP
Donald Trump et Joe Biden s'affronteront lors d'un premier débat ce mardi 29 septembre.

C’est l’un des rendez-vous très attendus de la campagne présidentielle. Ce mardi 29 septembre, Donald Trump et Joe Biden s’affronteront lors d’un premier débat télévisé, deux autres suivront d’ici le scrutin du 3 novembre. Donné – pour le moment – en avance sur son adversaire dans les sondages, Joe Biden aura fort à faire pour ne pas tomber dans les pièges que lui tendra immanquablement l’actuel locataire de la Maison-Blanche.

Si en 2016 Hillary Clinton avait systématiquement été donnée gagnante des affrontements télévisuels avec le magnat de l’immobilier, certains écueils ont certainement participé à sa défaite. Pour faire le point sur ces erreurs à éviter, le HuffPost a interrogé Jean-Eric Branaa, politologue spécialiste des États-Unis, maître de conférences à l’université Paris 2-Assas, et auteur de Joe Biden. L’homme qui doit réparer l’Amérique (Nouveau Monde).

Ne pas se laisser pousser dans un coin

En 2016, lorsque Hillary Clinton se présente, elle vient de passer quatre ans à la tête du secrétariat d’État, en charge des Affaires étrangères. Sans surprise donc, elle maîtrise les débats quand il s’agit d’évoquer les grandes questions internationales. Un point fort que le candidat Trump se pique alors de retourner contre elle. “Il a très rapidement compris que c’était le point fort de Clinton, que sur la connaissance technique des dossiers elle était très bonne, alors que lui était meilleur sur le côté spectacle. Il l’a [enfermée] là-dedans”, analyse Jean-Eric Branaa. “Quand elle parlait de l’Irak, de l’Afghanistan, de Benghazi, tout cela paraissait très loin depuis par exemple l’Arkansas ou le fin fond du Missouri. Trump jouait là-dessus et lui répondait en lui parlant du scandale de ses courriels”, ajoute le spécialiste.

Pour autant, veut-il croire, Joe Biden a tous les atouts pour ne pas paraître aussi éloigné que Hillary Clinton a pu parfois l’être. “Biden a lui aussi évidemment des grandes connaissances techniques sur les dossiers de Washington, mais chez les démocrates, c’est aussi l’un de ceux qui parlent le mieux aux ouvriers”, ajoute Jean-Eric Branaa.

Macho-man

Il y a quatre ans, “Trump n’avait rien à perdre et tout à gagner” et a pu multiplier les sorties misogynes à l’égard des femmes, imposant l’image du “mâle alpha”. Une stratégie qui n’a pas forcément eu l’effet escompté pour la campagne d’Hillary Clinton. “Hillary Clinton pensait qu’en laissant Trump déblatérer ses remarques sexistes et misogynes, elle s’attirerait naturellement de la sympathie. Ce n’est pas ce qui est arrivé”, commente Jean-Eric Branaa. C’est également ce que reconnait sur Politico un ancien de la campagne de Clinton qui avait notamment entraîné la candidate à l’exercice du débat: pour certains le machisme de Trump est un gage de force et donc de crédibilité à occuper les plus hautes fonctions.

“On entend beaucoup la rhétorique trumpiste de “Joe l’endormi”, mais en réalité le candidat démocrate est un excellent débatteur. Face à Trump, il ne devrait pas hésiter à utiliser les mêmes armes que Trump, à montrer les muscles, et à le renvoyer dans ses cordes, ils sont les deux des hommes blancs, de la même génération”, détaille Jean-Eric Branaa.

Le spécialiste présente pour preuve cette phrase qu’a eue Joe Biden en mars 2018. “Si nous étions au lycée, je l’emmènerais derrière le gymnase et je le tabasserais”, avait-il déclaré lors d’un événement à l’Université de Miami (voir vidéo ci-dessou), en évoquant les propos outranciers de Donald Trump envers les femmes.

Les scandales et les affaires

Lors des débats face à Hillary Clinton, Donald Trump avait largement agité le scandale de la gestion de sa boite de courriels. L’ancienne secrétaire d’État avait continué d’utiliser sa boîte personnelle au mépris des règles de sécurité. Une aubaine pour le candidat républicain, qui n’a eu de cesse de la ramener à cette affaire.

Pour Joe Biden, le flanc exposé est sans aucun doute incarné par son fils Hunter et ses affaires commerciales en Chine et en Ukraine. Des sénateurs républicains viennent de publier un rapport particulièrement gênant pour le fils du démocrate. Pour autant, estime Jean-Eric Branaa, Joe Biden saura trouver la parade. “On voit bien qu’avec ce rapport publié par des républicains, Trump essaie de relancer la même machine. Biden ne devra pas rentrer là-dedans en s’excusant, mais devrait simplement dire “C’est moi qui suis candidat, pas mon fils”″, détaille-t-il.

Prendre l’avantage physique

La télévision est une affaire d’image, et comme le relève Jean-Eric Branna, il ne faut pas sous-estimer la dimension physique de Trump. “Dans les débats, il bouge, il s’agite. En 2016, toute sa campagne était axée sur les “losers” et les “winners” [ndlr: les gagnants et les perdants]. Physiquement, Hillary Clinton était desservie parce qu’elle est plutôt menue, et la gestuelle de Trump donnait d’elle l’impression qu’elle appartenait justement au côté des perdants”, analyse Jean-Eric Branaa. Il recommande donc à Joe Biden d’occuper plus l’espace physiquement.

Les arrangements de Trump avec la vérité

Qu’il s’agisse de ses discours ou de ses interventions publiques, Donald Trump procède parfois à quelques arrangements avec la vérité afin de mettre son bilan personnel et politique en avant, allant de l’exagération au faux pur et simple.

Cependant, comme le relève Jean-Eric Branaa, la situation n’est pas du tout la même en 2020 qu’en 2016. “En 2016, on découvre Trump et on découvre à quel point il a un effet hypnotique. Un phénomène que Clinton découvre aussi dans les débats. Plutôt que de relever les moindres erreurs de Trump, sa campagne fait le choix de l’évitement, de ne pas relever. Avec toutefois une erreur, quand elle a estimé qu’une bonne partie des électeurs de Trump étaient “lamentables”. En faisant ça, elle fédère autour de Trump ses électeurs, une base qu’il cherchait et dont il avait besoin pour accéder à la Maison-Blanche”, détaille Jean-Eric Branaa.

Mais la situation n’est plus la même aujourd’hui, Donal Trump est cette fois dans la position défensive, et surtout relève le spécialiste “les indécis ne sont plus le cœur de l’élection, contrairement à 2016”. Si Trump choisissait par exemple à nouveau d’accuser Biden de vouloir définancer la police, cela n’aurait pas d’impact au-delà de la base de Trump, estime-t-il. “C’est comme si en France on accusait François Bayrou de vouloir faire du collectivisme. Ce n’est pas crédible. Biden incarne parfaitement le “raisonnable et le pragmatisme”, et c’est ce qui fera sa force dans les débats aussi”.

Ce texte a été publié originalement sur le HuffPost France.

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