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Travailler à la retraite: tête première dans une deuxième carrière

«Sur le plan humain, je reçois dans mon travail actuel plus de gratitude que j'en ai eu en 40 ans dans le monde de l'éducation.»
Monique Bédard
Annie Simard
Monique Bédard

Monique Bédard a oeuvré pendant une quarantaine d’années dans le secteur de l’éducation tout en s’impliquant activement au sein de divers conseils d’administration. Le travail a toujours occupé une place importante dans sa vie.

Au terme d’une fructueuse carrière, elle aurait pu se diriger vers une retraite bien méritée, comme le font de nombreux sexagénaires. Elle a plutôt choisi de plonger dans l’inconnu en relevant un défi professionnel inattendu.

Elle n’aurait pas imaginé en être là à 66 ans, d’autant plus qu’elle s’était donné l’occasion d’expérimenter la réalité de retraitée quelques années auparavant. Mais madame Bédard a rapidement réalisé, après un an sans emploi, qu’elle n’était pas prête pour un tel mode de vie. «J’étais un petit peu dépressive et je sentais que j’avais moins d’intérêt pour tout, se souvient-elle. Je m’ennuyais.»

Depuis un peu plus de deux ans, Monique Bédard est coordonnatrice des campagnes de financement dans une entreprise du secteur alimentaire bien connue à Québec, la Pâtisserie Michaud.

“J’avais l’adrénaline nécessaire pour débuter un nouveau projet.”

- Monique Bédard

L’opportunité d’emploi à la Pâtisserie Michaud s’est présentée par l’entremise de son frère, qui connaissait les propriétaires. Monique Bédard a tout de suite été emballée à l’idée de se lancer dans un défi qui la sortirait de sa zone de confort. «Je n’aurais jamais pensé faire ce travail-là un jour, admet-elle. Mais je n’ai pas peur du changement. J’avais l’adrénaline nécessaire pour débuter un nouveau projet.»

Bien qu’excitée d’entreprendre cette nouvelle aventure, elle a vite constaté qu’une période d’adaptation s’imposait. «Les premières semaines, je revenais chez moi la tête pleine.» Monique Bédard avait beaucoup à apprendre, dont apprivoiser les termes et les façons de faire de l’industrie alimentaire et s’adapter à la réalité du privé, après avoir travaillé toute sa vie dans le secteur public. «Je ne connaissais rien là-dedans», concède-t-elle.

«Quand j’étais autour de la table lors des premières réunions, je sentais que certains collègues avec plus d’expérience dans le domaine se disaient que je partais de loin.» Mais Monique Bédard ne s’en est pas trop inquiétée et a tranquillement su faire sa place. «Pour une personne de mon âge qui retourne travailler, je pense que la clé c’est de prendre son temps, de ne pas précipiter les choses. C’est plus facile pour nous de s’adapter à eux, que eux à nous», croit-elle.

Aujourd’hui, madame Bédard se dit très à l’aise dans ses fonctions. «Je dirais que c’est un travail où ça prend une personne qui a de l’expérience et du vécu, quelqu’un qui est capable de transférer ses connaissances et ses aptitudes.»

Tisser des liens entre générations

Non seulement est-elle à l’aise dans son nouveau travail, mais ses collègues apprécient grandement sa présence dans l’équipe. Ils viennent l’embrasser le matin pour lui souhaiter bonne journée et parfois lui apportent de petits cadeaux.

«Ils me disent qu’ils se sentent bien quand je suis là. Sur le plan humain, je reçois dans mon travail actuel plus de gratitude que j’en ai eu en 40 ans dans le monde de l’éducation, constate celle qui considère que son travail la garde jeune. «C’est une deuxième famille que j’ai trouvée là.»

À la pâtisserie, Monique Bédard est amenée à travailler avec des collègues de tous âges. D’ailleurs, elle n’aime pas l’expression «conflit des générations.» «Ce n’est pas des conflits, ce sont des différences de générations», nuance celle qui raconte se faire aider à l’occasion par les plus jeunes pour les questions d’informatique, alors qu’elle peut, en retour, partager son savoir en matière de rédaction et de français. «Chacun apporte quelque chose d’intéressant à l’autre.»

Des obstacles pour les travailleurs d’expérience

De plus en plus de travailleurs expérimentés souhaitent donner un deuxième souffle à leur carrière, et c’est pour vanter leur valeur auprès des entreprises que le programme Générations au travail, réussir ensemble! a été lancé. L’Association québécoise de gérontologie, derrière la campagne, estime que l’âgisme est un obstacle auquel plusieurs travailleurs de plus de 50 ans peuvent être confrontés.

Monique Bédard n’a pas rencontré ce genre de difficulté, mais elle se dit déçue de l’inaction gouvernementale en matière fiscale, alors que la pénurie de main-d’oeuvre se fait bien sentir au Québec. «Le gouvernement ne nous aide pas du tout, il vient tout chercher en impôts, déplore-t-elle. Au final, il ne m’en reste pas épais sur ce que je gagne.» Selon elle, cette réalité freine beaucoup de retraités, qui ont peur d’être pénalisés à partir d’un certain montant, à retourner sur le marché du travail. «On est motivé, on a du vécu et de l’expérience. Le gouvernement devrait s’adapter.»

Par moments, les proches de Monique Bédard lui disent «T’es folle!» quand elle évoque son travail. «Mais ils m’ont aussi vue dépérir et perdre un peu le moral l’année où je m’étais retirée du marché du travail. Là, ils me voient allumée et ils me disent que c’est la Monique qu’ils ont toujours connue qui renaît.»

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