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La technocratie contribue à la démission politique du Québec

Dans, Simon-Pierre Savard-Tremblay livre un virulent plaidoyer contre l'élite libérale appelée à transcender les frontières par l'imposition du déracinement économique. Ultimement, il propose de rétablir la forme traditionnelle de l'État.
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Simon-Pierre Savard-Tremblay, 28 ans, est essayiste et sociologue. Dans son deuxième ouvrage L'État succursalepublié récemment chez VLB, il se penche sur un phénomène qui a beaucoup contribué à ce qu'il appelle «la démission politique du Québec». Ce phénomène a un nom: la technocratie. SPST livre un virulent plaidoyer contre l'élite libérale appelée à transcender les frontières par l'imposition du déracinement économique. Ultimement, il propose donc de rétablir la forme traditionnelle de l'État.

L'auteur commence son ouvrage en retraçant les principaux mécanismes institutionnels ayant mené, dans le cas du Québec, à une libéralisation de l'économie aux effets pervers sur le plan identitaire. SPST associe surtout la libéralisation de l'État québécois au règne du PLQ sous Jean Charest (2003-2012) et montre que ce processus s'est accompagné de la perte de souveraineté de l'Assemblée nationale. Grosso modo, le pouvoir grandissant des multinationales nuirait à l'autonomie du Québec dans un Canada motivé à faire de ses provinces de simples entités administratives dénuées de toute vitalité politique.

Il faut souligner que si le propos de l'auteur semble rejoindre celui de plusieurs organisations de gauche favorables à l'État-providence et aux mesures interventionnistes, Savard-Tremblay n'adopte jamais complètement leur perspective. Si l'essayiste s'oppose aux diverses formes de domination économique engendrées selon lui par le libre-échange, c'est d'abord pour des motifs nationalistes qui feraient frissonner bien des adeptes du multiculturalisme. Le point de vue défendu dans cet essai relève moins d'une allergie enfantine au capitalisme qu'on retrouve chez Québec solidaire que d'un conservatisme intelligent, plus populaire en Europe qu'en Amérique du Nord.

L'un des chapitres les plus intéressants du livre concerne les effets de la mondialisation et de la «technocratisation» sur les universités. Pour SPST qui fait actuellement un doctorat en sociologie à l'Université Laval, les universitaires seraient devenus des fonctionnaires du savoir obligés de se soumettre aux impératifs du marché. Au Québec, la recherche universitaire serait même devenue dépendante de l'application de critères économiques (et idéologiques) par le gouvernement fédéral. Selon lui, «la dérive de l'université est marquée par la transformation des programmes d'enseignement en véritables techniques professionnelles, dont on valorise les plus utilitaires d'entre elles.»

Mais l'auteur ne s'arrête pas là: non seulement le chercheur moyen agirait comme un apparatchik du système, mais il serait aussi le serviteur d'un clergé garant du politiquement correct visant à supprimer toute identité nationale au nom du vivre-ensemble. Autrement dit, l'Université serait devenue une annexe de l'État succursale. Son rôle serait maintenant d'encourager la jeunesse à se prétendre citoyenne du monde, sans pour autant lui fournir les outils nécessaires au développement d'une véritable ouverture d'esprit. Évidemment, la critique de l'Université formulée dans cet essai pourrait très bien s'appliquer à d'autres établissements d'enseignement supérieur ailleurs dans le monde.

Enfin, la désignation par l'auteur d'une élite coupable (l'overcalss) pourrait malgré tout faire sourciller ceux et celles qui se méfient avec raison des théories de la conspiration dont le propre est d'accuser un tout petit réseau de diriger le monde à lui seul. Mais SPST ne franchit jamais cette ligne. Dans ce livre audacieux qui pourrait s'imposer comme un classique du genre, il choisit encore la raison contre les théories fumeuses.

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