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La rencontre de Nancy Audet avec celle qui lui a sauvé la vie

«Elle était touchée de voir que j’étais devenue maman.»
Nancy Audet a finalement retrouvé Rose-Aimée, la dame qui l'a accueillie chez elle à deux reprises quand elle était jeune, et elle a pu lui présenter sa fille Launa.
Courtoisie
Nancy Audet a finalement retrouvé Rose-Aimée, la dame qui l'a accueillie chez elle à deux reprises quand elle était jeune, et elle a pu lui présenter sa fille Launa.

Les grandes retrouvailles ont finalement eu lieu. Quelques semaines après la publication de notre série La DPJ a 40 ans: voici mon histoire, dans laquelle la journaliste sportive Nancy Audet racontait son enfance et son histoire avec la Direction de le protection de la jeunesse (DPJ), elle est finalement retournée dans son Abitibi natale pour visiter Rose-Aimée Vallée, la dame qui l’avait accueillie dans sa demeure à deux reprises, et lui avait ainsi «sauvé la vie».

Nancy avoue qu’elle était très nerveuse avant cette rencontre, qui a eu lieu à la mi-avril. Finalement, les retrouvailles se sont très bien passées, comme si les deux femmes ne s’étaient jamais quittées.

«Je pleurais beaucoup, j’étais très émotive. Elle a collé son front sur mon front, son nez sur mon nez, et j’ai senti une grande vague d’amour me traverser.»

Rose-Aimée Vallée a aujourd’hui 76 ans. Quand la petite Nancy avait 7 ans, elle l’a hébergée dans sa demeure en tant que famille d’accueil. La mère de Nancy était violente physiquement et psychologiquement avec elle, et la DPJ l’avait convoquée dans une rencontre après un signalement de mauvais traitement. C’est lors de cette rencontre que la mère de Nancy s’était levée pour dire: «je ne veux plus de cette enfant-là.»

Revoyez notre entrevue avec Nancy Audet. Le texte se poursuit après la vidéo.

Nancy a pu présenter à Rose-Aimée sa fille, Launa, âgée de trois ans. «On a passé la journée ensemble, raconte-t-elle. Elle était tellement chaleureuse... pareille comme dans mes souvenirs! Ça m’a vraiment fait du bien de la retrouver.»

“Ça m’a fait du bien que quelqu’un me parle de l’enfant que j’étais de façon positive.”

- Nancy Audet

La dame était enchantée de rencontrer la petite Launa, et touchée de voir que Nancy était maintenant maman. Et elle lui a raconté à quel point la petite Nancy était adorable, toujours prête à aider les autres enfants, quand elle vivait sous son toit.

«Elle m’a confortée dans mon rôle de maman, confie Nancy. Elle m’a raconté à quel point j’avais toujours eu ça en moi, et ça m’a fait du bien que quelqu’un me parle de l’enfant que j’étais de façon positive. Parce que dans ma tête, j’étais un monstre, quand j’étais un enfant.»

«On a eu une belle braille!» résume de son côté Rose-Aimée, que le HuffPost Québec a joint par téléphone en Abitibi.

«J’en ai eu beaucoup, des enfants, chez nous, mais elle... c’était spécial. Je l’ai tellement adorée... c’est comme si elle avait été ma petite fille à moi», ajoute-t-elle.

Et maintenant qu’elle l’a retrouvée, elle n’a plus l’intention de la laisser aller, lance la dame.

«Je n’étais pas capable»

Il faut dire que Nancy, qui a aujourd’hui 42 ans, a longtemps jonglé avec l’idée de retrouver celle qui lui avait donné de l’amour et du réconfort quand elle en avait le plus besoin. Mais elle ne s’en sentait pas la force.

«Il y a dix ans, je suis allée à Amos et j’avais envie de la retrouver, de la voir. Mais je n’étais pas capable.»

Sa décision de raconter son histoire pour la première fois, en acceptant de se confier au HuffPost Québec, l’a convaincue de foncer et d’entreprendre des démarches en ce sens. Après un appel à tous sur Facebook, elle a trouvé le numéro de téléphone de Rose-Aimée et l’a appelée.

«On s’est parlé au téléphone pendant une heure et demie, je l’ai bombardée de questions», raconte Nancy, qui a finalement décidé d’aller la voir quelques semaines plus tard.

Rose-Aimée a vieilli, et elle souffre maintenant de la maladie d’Alzheimer. Mais heureusement, elle est encore stable pour le moment.

«Je pense que j’arrive dans la vie de Rose-Aimée à un bon moment, où c’est à son tour d’avoir besoin d’aide, et je vais faire ce qu’il faut pour être dans sa vie, continue Nancy. Tout ce que je peux faire, je vais le faire. Je vais retourner plus souvent en Abitibi. Je vais être avec elle jusqu’au bout.»

Même si Nancy est revenue à Montréal, elle parle à Rose-Aimée toutes les semaines, au téléphone. «Des fois, elle me laisse un message pour me dire: ″bonne journée, je t’aime″», raconte Nancy, touchée.

La fillette de Granby: «ça aurait pu être toi»

L’histoire de la fillette de Granby, qui est morte après avoir été maltraitée par son père et sa belle-mère - dont les funérailles ont lieu aujourd’hui -, a beaucoup ébranlé Nancy Audet.

«Je n’ai pas dormi pendant deux jours, j’étais complètement bouleversée. J’ai beaucoup pleuré. Je suis encore fragile.»

Plusieurs personnes ont déposé des animaux en peluche devant la maison de Granby où a été retrouvée la fillette de 7 ans, la semaine dernière, en très mauvais état. Elle est finalement décédée à l'hôpital.
Paul Chiasson/La Presse Canadienne
Plusieurs personnes ont déposé des animaux en peluche devant la maison de Granby où a été retrouvée la fillette de 7 ans, la semaine dernière, en très mauvais état. Elle est finalement décédée à l'hôpital.

«Mon père aussi a beaucoup pleuré. Il m’a écrit: ″ça aurait pu être toi″.»

Quand Nancy a découvert, comme le reste du Québec, des détails sur la façon dont la fillette de 7 ans était traitée, notamment le fait qu’elle était séquestrée, cela lui a rappelé beaucoup de mauvais souvenirs.

«Je me souviens que ma mère avait mis un crochet sur la porte de ma chambre pour ne pas que je puisse l’ouvrir, raconte-t-elle. Je montais sur mon bureau et je la voyais partir avec mon frère et ma soeur au parc.»

Elle constate avec beaucoup de douleur qu’il y a encore «plein de petites Nancy au Québec», dont il faut prendre soin. Comme cette fillette de Granby, qui avait été confiée à son père et à sa belle-mère, malgré que la DPJ savait que la violence était omniprésente dans la résidence familiale.

«J’espère qu’elle n’est pas morte en vain, et qu’on va lui rendre hommage en changeant le système, pour que ça n’arrive plus jamais.»

La journaliste martèle qu’il y a plusieurs façon d’aider: en devenant famille d’accueil, en devenant Grand frère ou Grande soeur, ou encore en faisant un don à la Fondation des Centres jeunesse.

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