Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Quand le New Hampshire se prend pour l'Amérique

La classe politique du New Hampshire se plait à répéter qu'il y a dans le choix de l'État une annonce du résultat final.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Le New Hampshire n'est pas l'Iowa et le vote de ce soir ne sera pas une répétition de celui de la semaine dernière.

Une semaine à peine après le premier scrutin, dans l'Iowa, les candidats à la présidentielle américaine vont solliciter les votes des habitants d'un autre État, le New Hampshire. Les conséquences de ce vote ne seront pas les mêmes car elles pourraient bien ébranler les fondations du système des primaires, qui dit que le New Hampshire vote avant tous les autres États.

Deux votes, deux systèmes

Le match qui se joue mardi reposera sur un autre type de scrutin: alors que l'Iowa était replié sur un caucus, le New Hampshire a fait le choix d'une primaire. Le caucus est un choix réservé aux militants d'un parti. Les votants se prononcent en fonction de motivations parfois très locales avec une décision qui provient de raisons aussi diverses que des pressions sociales, l'appartenance à un même syndicat pour un groupe de votants, à une association, l'influence de quelques amis, qui vont voter ensemble, dans un même lieu et par un vote public.

Une primaire, dont celle du New Hampshire, obéit à une autre logique, le bulletin étant déposé dans une urne, lors d'un vote secret, vote cependant ouvert à tous ceux qui le souhaitent, pour peu qu'ils se sentent proches des idées du parti qui sollicite leur participation.

Toutefois nous avons affaire à deux petits États, dans lesquels le nombre de suffrages exprimés reste très limité. Chaque parti pouvait compter sur à peine 150 000 votants dans l'Iowa; il y en aura tout juste 100 000 dans le New Hampshire pour chaque camp, moins de 10% de la population totale. La petite taille du New Hampshire et son nombre réduit d'habitants a entrainé le développement d'une campagne de proximité, que l'on appelle retail politics aux États-Unis, parce que la pratique est semblable à un commerce de quartier en comparaison à la vente en hypermarché.

Ce qui distingue également le New Hampshire c'est le choix «raisonnable» qui sort généralement des urnes et qui ressemble au final au vote exprimé par l'ensemble des Américains, ce qui en fait un scrutin très particulier, très observé et commenté et qui justifie au yeux des dirigeants des deux grands partis sa légitimité à figurer au nombre des deux premiers États qui votent dans le long processus de sélection.

Premier dans la Nation

Car le New Hampshire, un État de la côte Est, n'a pas grand chose à voir avec l'État du centre des États-Unis qu'est l'Iowa. L'histoire dit que ses habitants y cultivent le bon sens et le pragmatisme. Ainsi, si on se concentre uniquement sur le Parti républicain, les deux derniers vainqueurs en Iowa, en 2008 et 2012, ont été des outsiders que personne n'attendait, Mike Huckabee et Rick Santorum. La surprise de la semaine dernière, avec une élection plutôt confortable de Ted Cruz s'inscrit dans cette logique. On explique cela par un vote puissant des protestants évangéliques. Dans le New Hampshire, le choix fut en 2008 celui de John McCain et en 2013 de Mitt Romney, les deux futurs gagnants dans le camp républicain.

Les votes traduisent un projet différent ici de ce qu'il est en Iowa. Sa préoccupation est plus collective, s'inscrit dans une attente plus globale, le bien du pays, la grandeur de la fonction et la qualité du candidat. Depuis 1916, date à laquelle cet État a choisi les primaires plutôt que des caucus, l'importance de cet État n'a cessé de croître: de victoire psychologique, la réussite dans le New Hampshire est presque devenue un présage car, à partir de 1952, presque tous ceux ont gagné ici ont été vainqueurs à la fin.

En 1975, l'État a voulu pérenniser son statut de «premier à voter» (First in the Nation - FITN) et a adopté une loi par laquelle sa date d'élection était aussitôt avancée si un autre État prévoyait de voter plus tôt dans l'année. La classe politique du New Hampshire se plait à répéter qu'il y a dans le choix de l'État une annonce du résultat final. À priori, donc, cet État qui se dit raisonnable devrait couronner des candidats modérés et est immunisé contre un Donald Trump et ses provocations répétées.

Les sondages s'affolent

À en croire les enquêtes d'opinion, il y a pourtant un phénomène inhabituel qui se prépare cette année. Les Républicains semblent empêtrés dans l'effet Trump, qui domine largement la course en tête au plan national et même dans le New Hampshire: 33% des sondés localement déclarent qu'ils s'apprêtent à lui donner leur voix, alors qu'ils ne sont que 14% à préférer Marco Rubio, 11% Ted Cruz et moins de 10% pour chacun des autres candidats. D'ailleurs, comme rien ne va plus, même chez les Démocrates, Hillary Clinton devrait elle-aussi subir une cuisante défaite, de plus de 20 points, face à un surprenant Bernie Sanders qui n'a rien de classique non plus.

Le côté policé et raisonnable des New Hampshiriens est un peu écorné si on se souvient que, en 2008, Ron Paul, le libertarien, avait réalisé ici un de ses meilleurs scores captant 23% des suffrages et une deuxième place plutôt inattendue. À y regarder de plus près, il est vrai aussi que Pat Buchanan, un populiste qui se présentait avec la même base anti-immigration que Donald Trump l'avait, -lui-, emporté, en 1996.

En cas de victoire massive du milliardaire new-yorkais il y aura certainement une tentation de la part des cadres du Parti républicain à vouloir en minimiser les effets; le rôle de vigie du New Hampshire sera alors peut-être remis en cause. On parlera de mauvaise humeur locale, de sécurité, de problèmes de drogue, de Daech. À la tribune, Trump rappellera alors l'histoire inédite de cet État qui a tant de fois couronné des futurs rois, ou plutôt des futurs présidents.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST (Disponible en anglais seulement)

New Hampshire vota

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.