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Projet de loi 9: affrontement entre Simon Jolin-Barrette et Guillaume Cliche-Rivard

«Pour moi, c'est non seulement inhumain et injuste, mais c'est aussi contraire à la Charte des droits et libertés.»

QUÉBEC - Le premier face-à-face entre le ministre de l'Immigration, Simon Jolin-Barrette, et le président de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration (AQAADI), Guillaume Cliche-Rivard, a donné lieu à quelques flammèches.

Les deux hommes se voyaient pour la première fois à l'occasion des consultations pour le projet de loi 9, qui vient réformer le système d'immigration, après des affrontements par médias interposés.

D'entrée de jeu, M. Cliche-Rivard a dit vouloir agir dans un esprit de «collaboration». Mais il est clair, à son avis, que le projet de loi 9 tel qu'écrit est anticonstitutionnel.

L'AQAADI est d'avis que le gouvernement ne peut pas imposer des conditions aux ressortissants étrangers - tel que le fait de l'obliger à vivre dans une région donnée, par exemple - pour devenir résident permanent. Cette clause serait une «épée de Damoclès» sur la tête de certains nouveaux arrivants, dit-il.

Le président de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, Guillaume Cliche-Rivard, et le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Simon Jolin-Barrette.
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Le président de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration, Guillaume Cliche-Rivard, et le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Simon Jolin-Barrette.

«Quand un résident permanent devient résident permanent, il devient résident permanent du Canada au complet, et non pas d'une ville ou d'une profession, décrit M. Cliche-Rivard. S'il veut changer de ville de résidence, on ne peut pas lui dire qu'il va perdre son statut. Pour moi, c'est non seulement inhumain et injuste, mais c'est aussi contraire à la Charte des droits et libertés.»

Le ministre Jolin-Barrette a référé son interlocuteur à une clause quasi identique négociée par l'ancien gouvernement Bourassa, qui prévoit des conditions pour assurer «la satisfaction des besoins régionaux ou sectoriels de main-d'oeuvre spécialisée», entre autres.

C'est quand même ça, le nom de votre Ministère, le Ministère de l'Inclusion, et non pas de la CoercitionMe Guillaume Cliche-Rivard

Le ministre reproche au gouvernement Couillard d'avoir «abdiqué» à ce pouvoir du Québec lors de la présentation de la précédente politique sur l'immigration, en 2016, par l'ex-ministre Kathleen Weil.

Dans sa présentation, le président de l'AQAADI a fait valoir que l'article en question avait été retiré à l'époque parce qu'il mettait des gens dans une situation de précarité, puisqu'il obligeait des individus à rester dans une relation conjugale difficile, par exemple.

Il maintient que du moment où quelqu'un devient un résident permanent, il ne devrait pas y avoir de conditions au maintien de celle-ci.

«J'aimerais ça qu'on puisse discuter à savoir si on ne pourrait pas plutôt y aller avec une approche d'intégration, d'inclusion - parce que c'est quand même ça, le nom de votre Ministère, le Ministère de l'Inclusion et non pas de la Coercition», a relevé M. Cliche-Rivard.

«Écoutez, je prends note de votre éditorial», a laissé tomber le ministre Jolin-Barrette.

Quelles solutions rapides pour les 18 000 dossiers?

L'AQAADI a réussi la veille à obtenir une courte injonction pour forcer Québec à traiter les quelque 18 000 dossiers d'immigration en attente dans l'ancien système. Mais le gouvernement doit aller plus loin pour sauver ces demandes, estime M. Cliche-Rivard.

Il a rappelé que la grande majorité des dossiers ont été déposés dans les trois ou quatre dernières années.

«Je n'ai pas de fleurs à lancer à personne. C'est trop long, a martelé le président de l'AQAADI. Cela étant dit, ce n'est pas en jetant ces dossiers à la poubelle qu'on règle le problème.»

À son avis, le ministère devrait prioriser les quelque 4 500 dossiers en papier qui ont été envoyés avant 2015 et qui sont complets, mais aussi les dossiers des personnes qui se trouvent déjà en territoire québécois.

Mais il n'est pas question d'oublier les personnes qui vivent à l'extérieur et qui «ne savent plus où donner de la tête» après avoir investi beaucoup d'argent et de temps pour soumettre une demande en immigration.

M. Cliche-Rivard émet la suggestion que ces dossiers devraient être transférés, puis traités en priorité «sans préjudice» dans le portail Arrima, puisque ces demandeurs attendent depuis longtemps.

Radio-Canada révélait vendredi que le ministère de l'Immigration comptait traiter à peine 400 dossiers de personnes ayant déposé une déclaration d'intérêts dans Arrima pour le reste de l'année 2019. C'est trop peu, avance l'AQAADI.

En pleine pénurie de main-d'oeuvre, une conversation sera nécessaire sur le seuil «discutable» de 40 000 nouveaux arrivants qui seraient admis cette année, selon une promesse du gouvernement Legault.

M. Cliche-Rivard se demande si le gouvernement ne pourrait pas prévoir une «exception» pour ces gens dont le dossier est en attente. Ces personnes auraient déjà un «droit acquis» et ne devraient pas être comptabilisées dans le seuil de cette année, selon lui.

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