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Pour en finir avec le culte de la minceur

L'Institut universitaire en santé mentale Douglas s'attache à prodiguer des soins aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Derrière l'institution, les visages de ceux qui se consacrent à prodiguer soins et bien-être aux plus vulnérables sont nombreux. Portraits.
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L'Institut universitaire en santé mentale Douglas s'attache à prodiguer des soins aux personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Derrière l'institution, les visages de ceux qui se consacrent à prodiguer soins et bien-être aux plus vulnérables sont nombreux.

Portrait d'Howard Steiger, chef du programme des troubles de l'alimentation à l'Institut universitaire en santé mentale Douglas et professeur titulaire en psychiatrie à l'Université McGill

Il y a quelques semaines, l'image belle et forte d'une mannequin taille forte à la Une d'un grand magazine féminin a déchainé la chronique et enflammé les réseaux sociaux. On saluait l'initiative comme étant avant-gardiste ou on la dénonçait comme un coup de pub hypocrite, c'était selon. Mais personne ne restait indifférent. Tactique de marketing ou effort réel pour casser les stéréotypes? Qui peut trancher? En tous les cas, la démarche détonnait dans un univers morose d'uniformité où la minceur, non, la maigreur, impose sur toutes les plateformes son diktat absolu.

Ce diktat, le Dr Howard Steiger s'attache depuis des années à le pourfendre. De longues années de démarches patientes, en partenariat avec des pairs, des élus, des gens influents de toutes avenues pour faire évoluer les mentalités et les perceptions. Un corps émacié n'est pas un idéal.

Car le chef du Programme des troubles alimentaires de l'Institut en santé mentale Douglas connait bien les ravages causés par les troubles alimentaires. Depuis 1986, Howard Steiger a accueilli, suivi, encadré et soigné dans sa clinique des centaines de patients, des patientes surtout, tous et toutes touchés par les multiples déclinaisons de maladies alimentaires. Sans drame, mais avec conviction, il parle de sa voix à l'élocution élégante des ravages que la boulimie et plus encore peut-être l'anorexie peuvent faire dans les vies : toutes ces existences terrées dans le secret, la honte, ces années perdues dans le repli social. Avec à la clé de graves problèmes de santé pouvant mener à l'hospitalisation et même, regardons les choses en face, jusqu'à la mort. Peu de gens savent en effet que l'anorexie nerveuse possède le taux de mortalité le plus élevé de tous les troubles de santé mentale (5%).

Il n'y a pas de solutions simples aux maladies alimentaires et beaucoup de zones d'ombre demeurent pour en comprendre les mécanismes. Howard Steiger pense que si le déclenchement de ces troubles ne peut certainement pas être réduit aux pressions socioculturelles, et que si les recherches comme celles menées au Douglas tendent à indiquer qu'une composante héréditaire entre en ligne de compte, la pression collective vers un pseudo-idéal de perfection physique doit à tout prix s'alléger. Le chercheur et clinicien tient à préciser que l'idée n'est pas d'écarter à tout prix la minceur des images véhiculées, mais plutôt d'offrir une saine diversité dans les modèles présentés, surtout ceux destinés aux jeunes femmes. Il voit l'urgence de propager ce message : la beauté a bien des visages, et surtout bien des formes.

En 2009, à la suite d'une pétition lancée par deux jeunes femmes et à l'initiative du Secrétariat à la condition féminine, Howard Steiger a participé à un comité de travail se donnant pour mission d'établir une Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée. L'idée était aussi et surtout d'amener les acteurs des milieux influents à adhérer à des pratiques propices à cultiver la diversité physique et une saine approche par rapport à l'alimentation.

Fait rare, ce groupe, dont les membres ont fluctué au fil des années, a réussi à réunir autour d'un même objectif tant des décideurs que des entrepreneurs du monde de la mode, des magazines féminins, de la publicité, mais aussi des professionnels de la santé et du monde scolaire.

Aujourd'hui, Howard Steiger juge que cette initiative a porté fruit, se disséminant dans plusieurs milieux. C'est vrai, dit-il, les mentalités changent. Il souhaite maintenant que les entreprises elles-mêmes reprennent à leur compte les engagements de la Charte pour les porter plus loin. Et dans ce domaine comme dans le traitement des patients, Howard Steiger ne croit absolument pas en une approche coercitive, mais au contraire à un engagement pleinement volontaire: à une époque, face à un patient en état grave de dénutrition, on intervenait de force, explique le psychiatre. Or on s'est rendu-compte que l'effet d'une telle approche sur le rétablissement était plutôt contre-productif. Il en va de même avec les entreprises. Pour être durable et profonde, l'adhésion doit être volontaire, dit-il.

En espérant qu'un jour un mannequin enrobé en Une d'un magazine ne constitue plus une curiosité et un sujet de controverse sur les réseaux sociaux.

Signer la Charte ici.

L'Institut universitaire en santé mentale Douglas est un institut de renommée mondiale affilié à l'Université McGill et à l'Organisation mondiale de la santé. Il a pour mandat de soigner des personnes atteintes de maladie mentale en leur offrant espoir et guérison. Les équipes de spécialistes et de chercheurs de l'Institut font continuellement avancer les connaissances scientifiques, les intègrent aux soins des patients et les partagent avec la communauté en vue d'accroître la sensibilisation et de mettre un terme aux stigmas entourant la maladie mentale.

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Avril 2018

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