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Des tartelettes à ses démonstrations imagées des courbes, il a apporté dans ce drame sombre de la COVID-19 un souffle d’air frais.
Dr Horacio Arruda, Directeur national de santé publique
La Presse canadienne/Jacques Boissinot
Dr Horacio Arruda, Directeur national de santé publique

Nous vivons de plus en plus dans des sociétés de l’instantané, où le futur n’est souvent pas plus loin que demain, une société toujours en recherche avide de nouvelles vedettes à consacrer, de nouveaux dieux à aimer, de nouveaux héros. On les veut rapidement. On les crée en quelques heures. On les veut comme sur Netflix pour se détendre.

C’est pour cela que maintenant sans crier gare, un homme ou une femme qui se distingue de la masse par sa fraîcheur, son charisme ou sa sincérité se voit actuellement dans notre société trop souvent catapulté, propulsé dans l’espace médiatique à des hauteurs stratosphériques auxquelles personne ne les avait préparés.

Et lorsque l’armure, l’apparat, qu’on leur a obligée à revêtir montre des faiblesses, des fissures, et bien ces mêmes gens qui l’ont mis sur le trône s’empressent alors de détourner leur regard de leurs actions. L’idole d’hier se voit alors dirigée vers le purgatoire près de la porte de Lucifer.

C’est la situation dans laquelle se retrouve temporairement le Dr. Horacio Arruda.

Dans ce marathon sanitaire qui n’en finit plus de s’allonger, le Dr Arruda, qui avait une course à peu près sans reproche, a commencé à faire quelques faux pas, à presque trébucher, à faire des erreurs. Et au lieu de lui donner de l’eau et une tape dans le dos pour l’encourager malgré quelques ratés, on a commencé en quelque sorte à le huer littérairement parlant dans les réseaux sociaux et autres médias. L’homme que l’on avait découvert et qui semblait parfait ne l’était plus.

Le poste que le Dr Arruda occupe comme Directeur national de santé publique du Québec commande une crédibilité inébranlable, une expertise reconnue, une feuille de route solide et une grande capacité de jugement. Horacio Arruda y répondait dans une large mesure. Mais voilà, le public s’attendait au leader parfait sans failles, en oubliant que la perfection est souvent une vue de l’esprit.

Horacio Arruda mérite certes d’être critiqué comme plusieurs de nos élus. Il a le devoir d’expliquer au public et aux médias ses décisions et de répondre de ses actions. Mais il a aussi le devoir de se tenir debout s’il croit que son analyse et celle de son équipe est la bonne.

Le masque

C’est le cas de la question touchant le port du masque. Entêtement dans ses prises de positions ou est-il convaincu que la priorité est ailleurs? Sa prise de position est certes discutable, mais il n’est pas le seul dans son clan. En fait, ce débat est international, les points de vue sont nombreux. Le Danemark, qui a un des plus bas taux de décès, à la COVID-19, ne croit pas aux masques. «Le gouvernement déconseille d’en porter et les épidémiologistes sont peu convaincus de leur utilité.»

L’OMS recommande le port du masque pour les soignants et les patients en avouant qu’il y a un débat scientifique sur cette question qui n’est pas réglée. Le fait de mal utiliser un masque peut en réalité accroître le risque de transmission au lieu de le réduire.

Au Québec également. En 2007 à la suite du SRAS, l’Institut national de santé publique du Québec indiquait dans une étude sur cette question «l’utilisation d’une protection respiratoire dans la communauté pour contrôler l’influenza ne fait pas l’unanimité.»

On pourrait continuer longtemps sur cette question très émotive et qui, du côté de la population au Québec, reçoit un grand appui.

A-t-il été réducteur dans ses commentaires en qualifiant indirectement de gérant d’estrade la conseillère scientifique en chef du Canada, la Dre Mona Nemer? Probablement.

“Le grand danger, c’est qu’on assiste à une uniformisation aseptisée du langage de nos leaders qui répèteront, pour ne pas faire de vagues, ce que le public voudrait bien entendre.”

Toutefois, concernant Dre Nemer dont la feuille de route semble très professionnelle, je n’ai cependant trouvé (sauf erreur) aucune intervention de celle-ci dans les médias de décembre à la fin mars pour demander au gouvernement Trudeau de prendre des mesures sévères dans les aéroports pour obliger la quarantaine, pour critiquer Ottawa pour les passoires aux frontières au chemin Roxham.

Où étaient les scientifiques du gouvernement Trudeau comme Mme Nemer? Combien de personnes infectées sont ainsi entrées au Québec? Sans doute des milliers, dont un grand nombre allaient aboutir à Montréal-Nord. Durant ce temps, Justin Trudeau vivait sur une autre planète. Le 5 mars, il déclarait que le Canada n’interdirait pas aux voyageurs étrangers en provenance de pays aux prises avec la COVID-19 d’entrer au pays.

L’approche Arruda

Quant au côté populiste du Dr Arruda, des tartelettes à ses démonstrations imagées des courbes, il a apporté dans ce drame sombre de la COVID-19 un souffle d’air frais. Est-ce qu’il en a fait trop? Probablement, mais avait-il quelqu’un à ses côtés comme l’ont des personnages publics cet agent ou cet attaché de presse pour l’aider à filtrer les nombreuses demandes de collaboration qu’il recevait? On connaît la réponse.

On voudrait aujourd’hui sa tête, ce que réclame certains chroniqueurs, le remplacer par un glacial fonctionnaire dont les propos respecteront les normes certes, mais dont l’écoute suscitera autant d’émotions et de réactions que la lecture de la page Web d’un CIUSSS.

Attention

Le grand danger, c’est qu’on assiste à une uniformisation aseptisée du langage de nos leaders qui répèteront, pour ne pas faire de vagues, ce que le public voudrait bien entendre.

Même le ton employé par le premier ministre François Legault et qui faisait l’unanimité va-t-il aussi peut-être finir par lasser un public qui en veut toujours plus et dont les humeurs amoureuses sont si changeantes? Certains réclament de lui une prise de position plus ferme, comme passer de l’approche gentille de «papa a raison» à l’approche d’un décideur de Wall Street, froid, direct, sans compromis et qui ne se préoccupe que des résultats.

Il va falloir se brancher.

Comme la grande dame de l’opinion publique est implacable et exigeante, les candidats risquent bientôt d’être nombreux sur l’autel des anciens amants.

Le veut-on vraiment?

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