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Autochtones à la télé: Natasha Kanapé-Fontaine souhaite dépasser les clichés

L’actrice, écrivaine, poétesse et activiste autochtone se confie sur son parcours, son rôle dans «Unité 9» et la place des Autochtones au sein du paysage culturel québécois.
(c) Les Films du 3 Mars

«Ma grande leçon de vie, c’est que j’ai appris à m’aimer assez pour continuer à donner mon énergie, continuer à créer. Finalement, ça m’a redonné le goût, l’amour pour ce que je fais.»

Le plus grand apprentissage qu’a fait Natasha Kanapé-Fontaine au cours des dernières années, entre autres après avoir participé au documentaire de Santiago Bertolino, NIN E TEPUEIAN - MON CRI, sur sa carrière, c’est d’apprendre à s’apprécier en tant qu’individu. En entrevue au HuffPost Québec, l’actrice, écrivaine, poétesse et activiste autochtone s’est confiée sur son parcours, son rôle dans Unité 9 et la place des Autochtones au sein du paysage culturel québécois.

Changer pour mieux avancer

Quand elle crée, Natasha Kanapé-Fontaine veut «participer à cette avancée ensemble - Autochtones et non-Autochtones.» Après NIN E TEPUEIAN - MON CRI, elle a réalisé qu’on peut bien vouloir changer les choses au point de vue collectif, mais que ça s’inscrit aussi et d’abord au plan personnel.

«En visionnant le résultat [du film], ça m’a rappelé aussi à quel point, personnellement, je ne m’aimais pas, à l’époque. La grande leçon que j’aie en visionnant ce film-là, c’est vraiment à quel point je faisais tout ça pour tout le monde, je faisais ça pour la communauté, pour la société. Mais dans le fin fond de moi-même, c’est ce que j’ai appris au cours des dernières années: j’ai appris à m’aimer profondément - assez pour continuer la lutte, pour continuer à forcer les mouvements sociaux, à devenir le modèle de ceux qui deviennent les leaders en ce moment, qui se préparent à prendre de plus en plus la parole.»

(c) Les Films du 3 Mars

Si le rôle d’Eyota Standing Bear dans Unité 9 lui a donné une grande visibilité, l’artiste et activiste d’origine innue a également compris qu’avec ce personnage venait aussi une certaine responsabilité. «Quand j’ai pris la décision d’embarquer dans ce rôle-là [celui d’Unité 9], je prenais aussi l’engagement que j’allais devoir changer par rapport à celui-ci.[...] Si je ne m’étais pas sentie prête pour ça, je ne l’aurais pas fait. Il fallait quelqu’un pour présenter ce personnage-là, mais aussi le défendre. Toute mon expérience de militante m’a donné le bagage pour pouvoir le faire et pour répondre à ceux qui pensent que c’est juste un stéréotype ou un cliché

Après avoir interprété ce personnage qui a eu une grande résonance au Québec, elle a commencé à prendre des moyens concrets pour avoir une meilleure hygiène de vie. «Après ça, j’ai vraiment pris des engagements personnels; maintenant, je prends vraiment plus soin de moi. Je ne consomme plus d’alcool. Il y a beaucoup de leaders dans nos nations qui sont sobres. C’est comme une condition; si tu veux être un bon leader, tu ne dois pas te mettre en danger. Donc, on arrête de consommer.»

Réapprendre sa propre langue

Pour Natasha, le fait d’être un modèle pour sa communauté passe non seulement par le fait d’avoir une hygiène de vie saine, mais surtout par celui de pouvoir communiquer dans sa langue maternelle. «Le fait de parler ma langue me permet vraiment d’avoir des fondations pour faire tout ce que je veux faire en ce moment, avec la chance que j’ai, avec la tribune que j’ai, et de montrer l’exemple.» Une chose vitale pour elle, parler l’innu est une façon d’accorder de la reconnaissance à sa culture et à la philosophie qui s’y rattache.

(c) Les Films du 3 Mars

Aller au-delà du cliché

L’actrice déplore le fait qu’encore aujourd’hui, peu de rôles sortant des carcans préétablis sur les Autochtones lui sont présentés. «J’ai vraiment eu la piqûre [de la télé]. J’ai reçu quand même quelques propositions jusqu’ici, mais je n’en étais pas encore satisfaite. [...] La plupart [des rôles] qu’on m’a offerts, ça ressemblait beaucoup trop au personnage d’Unité 9. Ce genre de rôle-là ne devrait justement plus nécessairement exister en grande quantité dans le paysage télévisuel québécois.»

Natasha Kanapé-Fontaine invite donc les créateurs québécois à aller plus loin que le cliché, à travailler ensemble pour faire émerger de nouvelles collaborations porteuses d’espoir et de sens pour les communautés autochtones. Elle exhorte aussi à s’intéresser à la relève: «De plus en plus, les jeunes créent des affaires que ma génération ne connaît pas. Eux, ils font juste s’enlever des carcans qu’on se donne et ils vont beaucoup plus loin que ma génération. »

L’artiste multidisciplinaire prépare un spectacle solo qui sera présenté au théâtre Lachapelle à la fin août. Elle travaille aussi sur un spectacle de musique beaucoup plus intime, qui sera en duo avec le musicien Manuel Gasse. Ils seront en tournée dans quelques théâtres au Québec à partir de l’automne.

Le film NIN E TEPUEIAN - MON CRI sortira en salle en janvier 2020. En attendant, vous pourrez le visionner en grande première en ouverture du festival Présence autochtone le mardi 6 août à la BANQ. Il sera aussi projeté pour le grand public le dimanche 11 août à 20 h 45.

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