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Mondial 2014 au Brésil: la coupe est pleine

Le Brésil bien qu'il soit unifié par un drapeau dont la devise est issue des Lumières, et par un État fédéral est davantage qu'un pays, c'est un continent. Ce pays multiple est depuis longtemps devenu synonyme de football.
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Le Brésil, bien qu'il soit unifié par un drapeau dont la devise est issue des Lumières, et par un État fédéral est davantage qu'un pays, c'est un continent. Quoi de commun entre Porto Allegre, où il neige parfois l'hiver, Florianopolis, sorte de Côte d'Azur brésilienne, Campo-Grande au Mato Grosso do Sur, immense grenier à O.G.M. touchant la zone protégée du Pantanal où vivent encore des panthères sauvages, des tamanoirs et des tapirs? Qu'est-ce qui rapproche Sao Paolo mégapole de 23 millions d'habitants avec son avenida paolista sorte de Ve avenue à New York et ses favelas innombrables, au climat subtropical, Rio de Janeiro, ancienne capitale fédérale, image caricaturale du Brésil pour les européens, avec son Corcovado, son pain de sucre et ses favelas, en arrière-plan des plages de Copacabana et d'Ipanema?

Comment comparer le Nordeste atlantique avec ses alizées constants son climat tropical humide ou plus sec, vers l'intérieur des terres, et avec ses plages de rêve comme Pipa, Pititingha, Caraubas, Maracajau, la zone amazonienne qui s'initie à Belem (Parà), ville touchée par une immense pauvreté et un climat équatorial, ou encore Manaus (Amazonas) dominée par l'immensité de l'Amazone, Satarém, sur le même fleuve, Benjamin Constant à la frontière avec la Colombie, etc. Comment penser ce territoire de presque 195 millions d'habitants, qui fait 16 fois celui de la France (5e superficie du monde), 5000 km d'ouest en est et 6000 km du Sud au Nord comme homogène, comme unifié?

La diversité ou la disparité?

Ce territoire fédéral qui à l'origine s'appelait États-Unis du Brésil est en outre partagé entre des zones d'une immense richesse, comme l'avenida paolista à São Paolo, et des zones d'une immense pauvreté comme les innombrables favelas qui peuplent les villes. Malgré des progrès très importants associés aux actions du Parti des travailleurs (Lula Da Silva et aujourd'hui Dilma Roussef) dans la lutte contre la pauvreté, le Brésil compte encore en 2010 plus de 6000 favelas (ce nom est associé à la première qui s'était développée à Rio de Janeiro) dans 323 des 5565 villes du pays c'est-à-dire 11,4 millions d'habitants soit 6% de la population totale du pays.

Ce chiffre est en diminution cependant au cours des quatre dernières années du fait de l'allocation de scolarisation accordée aux plus démunis, mais aussi parce que les favelas elles-mêmes sont en voie d'amélioration, avec l'électricité de plus en plus fréquemment, des constructions en dur, des bribes d'adduction d'eau ou de tout-à-l'égout. Les villes les plus touchées par ce phénomène sont Belem avec 54% des habitants vivant dans des favelas (l'immense zone qui se situe derrière la gare routière de Belem est particulièrement significative de ce phénomène) et Rio de Janeiro 22% de la population vit dans une des 900 favelas ce qui représente 1,4 millions des habitants de cette ville. Les favelas de Rocinha Almão et Da Maré sont les plus grandes favelas du pays, même si elles sont elles aussi en cours d'amélioration. Dans ce pays-continent 10% de la population possède 75% de la richesse du pays.

La langue

Enfin, même si la langue parlée est bien le portugais, entre la langue paoliste et la langue nordestine ou amazonienne il peut y avoir un monde. Des éléments dialectaux autochtones imprègnent ce portugais métissé de Guarani, de Nambikwara, de Bororo, de Macuxi ou de Mundurucu, etc... Par exemple, le manioc si consommé et si prisé au Brésil, notamment dans le nord, devient macaxeira dans le nordeste et mandioca dans le sud ou ailleurs pão de pobre. Carioca mot si bien connu de la mythologie brésilienne signifie "maison du blanc" en Tupi. Mais on pourrait citer mille exemples de cette florescence linguistique, en effet 180 langues sont reconnues par le système scolaire brésilien. Bref, on comprend que parler du "Brésil" est une aberration. Il convient davantage de parler des Etats du Brésil ou "des" Brésils.

Le football roi?

Ce pays multiple est depuis longtemps devenu synonyme de football. Mais on oublie là de dire qu'il est aussi synonyme de capoeira, Angola ou Regional, de volley-ball et surtout de beach-volley ou de nombreuses pratiques autochtones ou endémiques pourrait-on dire. Le football brésilien a longtemps été un sport de pauvres, mais il s'est considérablement transformé, comme dans tous les pays du monde en se professionnalisant et en devenant avant tout un spectacle. Cependant même s'il a remporté à 5 reprises la Coupe du monde, s'il a été 7 fois finaliste et deux fois troisième et s'il a fait émerger des joueurs considérés comme des rois par la planète football (Pelé, Ronaldo, etc...), on ne peut pas considérer ce pays seulement comme le pays du football au sens professionnel et spectaculaire du terme. Le football qui se joue au Brésil est comme le volley-ball, un football de plage et parfois de rue ou des champs. Les stades ne sont qu'une des facettes du football spectacle et professionnel. Le Brésil est surtout le pays du "jeu" de football. Si les classes populaires sont relativement inconditionnelles de la pratique du football et sont souvent affiliées à un club (Flamengo, Botafogo, Atlético Paranaense, Bahia, Fluminense, Cruzeiro, Corinthians, etc.) les classes moyennes sont moins impliquées dans ce spectatorat sportif.

Le sport spectacle devenu très onéreux sépare de plus en plus les classes moyennes et les classes populaires. Même en faisant d'énormes sacrifices il devient de plus en plus difficile pour un pauvre Brésilien d'accéder aux tribunes du club qu'il idolâtre depuis sa naissance pourrait-on dire.

Le monde du football est touché par ailleurs par un phénomène de hooliganisme similaire à celui qui a endeuillé les clubs européens il y a quelques années. La violence parcourt de plus en plus souvent les rues adjacentes des stades et même leurs tribunes comme en France, en Allemagne ou en Angleterre il y a peu. La fédération brésilienne de football croit voir comme solution à cette violence endémique l'augmentation du prix des places dans les stades et un changement des populations qui les fréquentent. Plutôt que les classes populaires ce sont maintenant les classes moyennes en plein essor qui sont visées comme public du football brésilien. Cela contribue bien sûr à couper la masse du peuple brésilien des stades.

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