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Quand les internautes marocains réagissent à la grâce du pédophile espagnol

Jamais une affaire n'a cristallisé autant l'opinion publique marocaine. Jeudi, un avocat informe un site d'information, que son client, détenu pour pédophilie, fait partie de la liste des 48 prisonniers espagnols qui auraient bénéficié de la grâce royale. Il aura fallu attendre 48 heures, pour le premier communiqué du cabinet royal.
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Jamais une affaire n'a cristallisé autant l'opinion publique marocaine. Les faits: jeudi, un avocat informe un site d'information que son client, détenu pour pédophilie, fait partie de la liste des 48 prisonniers espagnols qui auraient bénéficié de la grâce royale. Très vite, l'information est relayée sur les réseaux sociaux, un (curieux) communiqué de presse du ministère de la Justice qui se lave les mains de l'erreur commise est publié et une manifestation est réprimée vendredi soir à Rabat.

Il aura fallu attendre samedi, soit 48h, pour le premier communiqué du cabinet royal annonce "qu'une enquête approfondie soit diligentée en vue de déterminer les responsabilités et les points de défaillance qui ont pu mener à cette regrettable libération et d'identifier le ou les responsables de cette négligence afin de prendre les sanctions nécessaires. Les instructions seront également données au ministre de la Justice afin de proposer des mesures de nature à verrouiller les conditions d'octroi de la grâce à ses différentes étapes".

La premère référence à "l'opinion publique" marocaine

Notons qu'à ma connaissance le terme "opinion publique" est pour la première fois cité dans un communiqué du palais royal, pour avoir une idée sur la réaction de l'opinion publique, revenons à quelques déclarations faites sur Facebook, là où la mobilisation a démarré:

  • Anouar Zyne, leader de la jeunesse du parti Union constitutionnelle a déclaré sur sa page Facebook "le Roi écoute directement son peuple, quand ce dernier crie dignement et respectueusement"
  • Ahmed Ghayat, journaliste, et président de l'association Marocains pluriels a publié sur son mur un long texte dont voici les extraits: "Les réactions ont d'abord été dans l'émotion et le sit-in organisé à Rabat était une façon pacifique de l'exprimer: le profil des manifestants est - dans leur grande majorité - celui de citoyens inquiets et sincères, des parents, des jeunes, des leaders d'opinion... Pour ne citer que ceux qui ont été en vue, parce que meurtris dans leur chair, tels Nadia Lamlili, Fad Wa Maroub ou Younes Lazrak... Gageons que leurs blessures physiques guériront plus vite que leur meurtrissure morale! Le Roi a franchi une ligne et - au-devant de la scène - a répondu à son peuple, c'est le début de quelque chose, c'est le début d'autre chose et si chacun dans son rôle le ressent, le comprend ce peut être annonciateur de bien des avancées. Et si - au bout du compte - c'est nous tous, Roi et Peuple qui en sortions plus forts?! Et si de cette épreuve naissait une ''opinion publique'' prise en compte?! Ce serait alors à mettre au crédit du Souverain que de savoir, en période tendue, trouver la voie pour que notre pays, et donc nous tous, en sortions par le haut..."

Au-delà de la réaction positive d'une majorité de citoyens, certains leaders d'opinion ont révélé qu'il y a eu tentative de manipulation et récupération comme l'explique le blogueur marocain Riad Essbai "je viens de rentrer chez moi après la manifestation de Kénitra, et tout ce que je peux vous dire c'est que je suis déçu et dégoûté de la récupération politique d'un cri du peuple et le transformer en une action qui sert l'agenda de certains arrivistes", expliquant par la suite qu'il s'agit des membres du parti marxiste leniniste "la voie démocratique".

De son côté, la journaliste Sanaa Elaji a lancé un cri "Je suis écoeurée par certains "militants" de la dernière heure. Au lieu de défendre des causes nobles, ils se trompent souvent de cause. Ils se positionnent d'abord comme "Anti-quelque chose" avant de chercher la cause. Dans l'affaire de l'Espagnol pédophile ayant été gracié, et au lieu de s'indigner contre cette grave atteinte aux droits des enfants et de toutes les victimes des abus sexuels, on parle déjà des "prérogatives du Roi", de "pourquoi Ramid a été décoré?", "Roi Irresponsable"... Le fait est très grave. Le débat qui avait commencé à avoir lieu au sujet de la pédophile au Maroc ne doit pas être atteint, ni éteint. Au nom de toutes les victimes de pédophilie et des abus sexuels, au nom de toutes les causes nobles, ne nous trompons pas de combats et ne récitons pas nos vieux slogans à toute occasion."

Finalement, de cette affaire, il y a eu confirmation de l'existence d'une réelle société civile forte et dynamique au Maroc. Le souverain a prouvé qu'il est à l'écoute de cette société civile. Les partis politiques, qui ont brillé par leur absence, sont les plus grands perdants de cette histoire. Gageons que cette mobilisation soit l'occasion pour définir un plan d'action national de lutte contre la pédophilie, parce que je pense que le meilleur remède des victimes de viol est de savoir que, dans l'avenir, il y aura le moins de victimes possibles quitte à rêver de l'éradication totale de ce crime!

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